…. HAEM ! Et bien, Mesdames et Messieurs, le spectacle est fini, plus rien à voir !

… Hein ? Il reste quelqu'un ? Tu devrais rentrer, petit, y'a plus rien à voir et tes parents vont s'inquiéter. Comment ça, j'ai oublié une partie ? … Bon, viens t'asseoir, mais ce que je vais te raconter reste entre nous.

Tu vois, des fois, il y a des choses dans la vie dont on est pas franchement fière… Toi par exemple, tu as déjà fait des bêtises, hein ? Bah moi, j'ai l'impression que ma plus grosse bêtise, je l'ai faite dès la naissance. Comment ça, c'est pas possible ? Et bien écoute petit, en fait… Je suis né homme.

Et voila qu'à l'entendre, tes parents rappliquent pour te récupérer, un air outré sur le visage. Comment ça peut être toléré, après tout ? Un homme vêtu ainsi en femme, c'est une anomalie, une honte, un monstre même!

Mais qu'importe, je continuerai seule mon long monologue.

On peut dire que, dès la naissance, Filéole a décidé de compliquer les choses. En plus de ne pas être du sexe que j'aurai voulu, je suis le fils d'un des prêtres du Cercle de la Lumière, celui vénérant la Mort. Et mon père été bien décidé à ce que je le devienne moi aussi. Nombre de fois, il m'a avoué sa joie d'avoir enfin un héritier mâle, après la naissance de mes cinq grandes sœurs !

Il a toujours souhaité me voir devenir prêtre. Nous priions autant de fois que cela était possible, et, pour lui faire plaisir, je m'efforçais de devenir aussi pieux que possible.

Mais quelque chose clochait. Plus je grandissais, moins je me sentais à ma place. Et par ma place, je parle de ma place d'homme. Je m'interrogeais beaucoup, me demandais pourquoi donc Mère Nature m'avait-elle fait naître homme. Et après tout, pourquoi ne pas poser directement la question à l'intéressée ? Je suis allé au temple me recueillir une nuit, et comme l'imbécile que j'étais, j'ai eu le malheur de faire ma prière et mes questionnement à voix haute.

Quelqu'un m'a entendu, et a tout rapporté à mon père. Il refusait d'y croire, a appelé un Neustro, persuadé que ce n'étais qu'un passage, une quelconque maladie qu'on pouvait guérir. Comme vous pouvez le constater, tout ça a été d'une efficacité splendide.

Plus sérieusement, suite à l’efficacité du traitement et à la gravité grandissante de ma « maladie », mon père a tout simplement décidé de me renier. Chose comprise par tous, étant donné le blasphème que je commettais malgré moi ; un refus de ma nature, ce qui causait en quelque sorte un manque de reconnaissance envers les dieux pour mon existence. Ou quand la religion va trop loin.

Du coup, je suis parti dans le désert. Non pas que j'ai été exclu, mais disons que j'y étais fortement invité. Personne ne voulait de quelqu'un comme moi… Là encore, j'ai peut-être été un peu stupide de partir comme ça. Même si j'avais prévu des réserves, j'avais sous-estimé le danger. Par chance, un nomade du nom d'Haykal m'a recueilli en cours de chemin. Il m'a guidé jusqu'à la vallée d'Accro, où d'après lui je serais accepté malgré mes différences. J'y suis resté quelques temps, où j'ai développé ma passion pour le spectacle, avant de remonter aux terres des Parlèms… Et là a débuté ma nouvelle vie.