Voilà un conte bien terrifiant que les plus courageux rechignent même à évoquer au coin du feu au coeur de la nuit, l'histoire de la Dame Mère, celle de l'Actuel, du dirigeant de la 5e confrérie, le seul et unique Ténébreux.

On raconte qu'elle vit le jour dans les sables chauds du désert, au coeur d'une famille pauvre, comme le veut la coutume des Namès, les fortunes matérielles n'ont pas de valeurs et doivent être concéder à l'église, ce n'est qu'en cela qu'une vie peut se trouver pure, pure dans le dénuement total. Mais enfant déjà, notre dame était animée d'un feu dévorant l'intérieur de son être, un feu qui ne pouvait s'éteindre avec les prières.

Longtemps sa famille tenta de l'aider, de la remettre sur le droit chemin, de l'encourager à abandonner ses maigres possessions, mais l'esprit d'Eden était déjà retors, elle se mit rapidement à voler et bientôt sa famille elle-même ne put plus rien pour elle, elle était perdue pourles dieux.

Ils l'abandonnèrent dans le désert, loin de toute choses, mais le feu ne s'éteint pas, alors que son corps s'asséchaît et que sa soif grandissait elle se délestait des émotions dont elle n'avait pas l'utilité, ces chaînes, ces poids qui la retenaient et l'avaient poussés dans un premier temps à essayer de retrouver sa maison.

Elle parcourut le désert, ses lèvres craquelées saignant à chaque mouvement, s'écorchant alors qu'elle sautait sur le moindre rocher pour en lêcher l'humidité rémanente, se nourrissant des seuls lézards qu'elle pouvait trouver.

Ses pas la menèrent plus loin qu'elle ne l'aurait souhaité, le feu couvant à l'intérieur de son être la poussant à chaque pas pour ne pas qu'il soit le dernier, pour ne pas qu'elle disparaisse comme elle l'avait craint, dans le dénouement.

Les terres de Farans succèdérent au désert et la petite retrouva des forces, but goulument aux sources, mangea ses prises de chasse, mais pourtant ne s'arrêta pas, elle continua toujours, plus loin vers le sud, vers un pays dont elle n'avait entendu que des rumeurs.

Elle vécut un temps en dehors des agglomérations, survivant tant bien que mal dans les terres inexplorées où elle avait élue domicile, chapardant ce qu'elle pouvait pour ne pas mourir jusqu'au jour où elle la découvrit...

Une jeune fille, qui ressemblait à l'image qu'elle se faisait encore d'elle même, belle, souriante. Elle la suivit, devint son ombre, épia sa vie pour en apprendre chaque détail et enfin lui déroba tout, jusqu'à sa vie alors qu'elle devait être envoyée à l'académie pour son 13e anniversaire.

Elle ne trompa personne une fois là-bas et fut la seule dupe du jeu qui se jouait à son insu. Deux jours après son arrivée, au coeur de la nuit, elle fut emmenée.

L'histoire ne raconte pas ce qu'il se passa dans cet intervalle, mais un an plus tard, une jeune fille ressemblant étrangement à la disparue fit son entrée à l'académie où elle suivit les cinq années avant d'être sanctionnée par le diplôme de fin d'étude et enfila la robe noire.

Les années qui suivirent la virent parcourir les terres qui l'avaient éconduites, le Faran où les jeunes paysans n'osaient plus sortir, de peur de rencontrer la "dame en noir", celle dont on ne refusait pas les sourires. Elle écuma le pays, tantôt maîtresse d'un puissant mercenaire, tantôt apparaissant au bras d'un homme de pouvoir, elle tissa lentement une véritable toile de connaissances et d'agents pour finalement retourné dans les terres inexplorées. On ignore si elle agissait de son propre chef alors ou sous les ordres d'un individu plus éminent, mais à son retour elle parvint rapidement à graver les échelons de la confrérie avant de devoir laisser le premier rôle à quelqu'un d'autre.

Car vous l'aurez compris mes amis, il est temps pour elle de laisser la place principale à quelqu'un d'autre et... vous savez bien de qui je parle...