Edward est né à Ferèsis d'une veuve mourante, cette dernière s'éteignit peu après sa naissance le laissant seul, il fut recueillit par diverses familles Arvèles, mais finit par fuguer à l'âge de huit ans, il vécu sur les routes jusqu'à ses 11 ans avant d'être recueillit par Asphodias un vieil enseignant à l'académie des Arvèles, il débuta sa formation avant ses treize ans auprès de son père adoptif, puis il entra à l'académie où il témoigna un certain talent pour le combat.
Mais à l'âge de ses quinze ans, il commis l'irréparable.
Alors qu'il faisait l'école buissonnière il voulut libérer un esclave de l'emprise de son maître, mais à sa grande surprise, une fois le maître mis en fuite et l'esclave libéré de ses chaînes ce dernier se jeta sur lui. Après avoir lutté et tenté de le raisonner, Edward finit par tuer son adversaire de manière accidentelle, il fut attrapé par les autorités quelques heures plus tard et mené devant le juge où il demanda un duel judiciaire qu'il gagna à la surprise générale.

Le jugement

Le procès se déroulait dans un grand bâtiment à Ferèsis, trois juges s'étaient installé sur une grande table surélevée, et toisaient Edward d'un regard circonspect, le jeune homme était enchaîné à une chaise  minuscule fixée au milieu de l'immense pièce, la foule était venu voir, ce n'était pas tous les jours qu'on jugeait un meurtrier, et il était encore plus rare que ce ne soit qu'un enfant.
Edward aperçu Asphodias dans la foule ce dernier avait la mine déconfite, il semblait déçu. Le jeune homme avala sa salive et se recroquevilla sur sa chaise.
Puis le juge du milieu qui semblait diriger tapa sur la table et on fit silence. La foule avait formé un très large cercle autour du suspect et une dizaine de soldats étaient face au peuple prêt à réagir en cas de débordement. À l'intérieur du cercle il y avait Edward sur sa petite chaise, l'esclavagiste qui était installé sur une table à la gauche de l'accusé entre ce dernier et les juges, si biens que les trois participants au procès correspondaient à trois coins d'un triangle isocèle.
L'homme n'était pas attaché, et était accompagné d'une femme fluette qui semblait extrêmement sûre d'elle.

Le juge central demanda à Monsieur Demolombe, l'esclavagiste, d'expliquer sa version des faits et la femme prit la parole: elle prétendit que Monsieur Linariel avait attaqué son client et Monsieur Esta, la victime, sans raison apparente alors qu'ils étaient parti se balader.

Après qu'elle eut finit, la foule commença à gronder, mais le juge central tapa sur la table pour obtenir le silence, il se tourna alors vers Edward et lui demanda d'expliquer sa version.
Tous attendaient en silence.
Le jeune homme déglutit se repositionna sur sa chaise et commença d'une voix chevrotante :

- J'étais sortit de l'académie pour me balader, et j'ai vu le Monsieur Demolimbe...

- Demolombe ? ( demanda le juge)

- Oui, ce Monsieur qui est assis ici, il était avec l'autre personne... celle qui est... morte...

- Celle que vous avez tué ? L'interrompit la femme

Le juge la fit taire d'un coup sur la table et lui intima de ne plus intervenir.
Edward s'était recroquevillé sur sa chaise, il respira un grand coup puis reprit.

- Le Monsieur qui est mort était enchaîné au cheval de celui qui est vivant, et ce dernier lui criait dessus... ( la femme ouvrit la bouche mais se ravisa face au regard de braise d'un des juges) j'ai demandé à Monsieur Esta s'il avait besoin d'aide, mais c'est l'autre qui a répondu, il m'a dit de me mêler de mes affaires, puis il a fouetté Esta pour le faire avancer plus vite, l'homme criait et lui demandait d'arrêter, alors j'ai attaqué Monsieur Demolombe... il a prit peur et à tranché la corde qui le rattachait au... mort. ( Edward déglutit puis continua) et j'ai détaché Esta... Mais il m'a attaqué , et j'ai... ( il s'interrompit ses lèvres tremblèrent, il mit quelques secondes à reprendre contenance), j'ai essayé de l'arrêter mais je l'ai... tué sans faire exprès.

Un silence pesant s'abattit sur la salle, les juges se murmuraient des choses entre eux, puis, le juge central se tourna vers Monsieur Demolombe :

- Est il vrai que vous aviez attaché Monsieur Esta à votre monture ?

- Mensonge ! ( c'était l'esclavagiste qui avait répondu en se levant de manière théâtrale.)

- Comment expliquez vous qu'il ait des marques aux poignets ?

-Je... Je ne sais pas...

- Et comment expliquez vous qu'il ait de nombres plaies sur le dos ?

- C'est sûrement ce garçon...

- Le garçon vous a t il attaqué avec un fouet ?

- Non...

Le juge hocha la tête pensif puis il ordonna à trois gardes d'aller fouiller la demeure de Monsieur Demolombe, ce dernier prit un air résigné et se tut, la femme qui l'accompagnait demanda au jeune homme :

- Très bien supposons que vous aillez raison et que Monsieur Esta était bien attaché, pourquoi l'avoir tué ?

- Il m'a attaqué...

- En êtes vus sûr ? N'est ce pas vous qui l'avez attaqué le premier ?

- Non, après que je l'ai libéré il est devenu... comme fou et s'est jeté sur moi...

- C'est bizarre comme comportement pour quelqu'un qui vient de retrouver la liberté...

Edward ne répondit pas, il sentait qu'il n'allait pas pouvoir prouver ce qu'il avançait, il se redressa prit son courage à deux mains puis lâcha non sans chevroter :

- Je demande un duel judiciaire !

La foule fut parcourue d'un murmure, la femme soupira, le juge étudia l'accusé quelques secondes puis fit un signe de la main, un guerrier entra dans le cercle, tout en muscle il faisait bien une tête de plus que le jeune homme, il avait le visage buriné, calme, sûr de lui, il lança un regard vers Edward puis hocha a tête avec un léger sourire.

- J'accepte votre demande. Eut égard aux circonstances et à votre jeune âge vous êtes autorisé à faire usage de la vérité, si toutefois vous en avez une. Gurvald ici présent sera votre adversaire, il aura le droit de vous tuer, le gagnant sera celui qui mettra son adversaire hors de combat. Le duel aura lieu demain vous passerez cette nuit au cachot.. ( il tapa sur la table et ajouta:) la séance est levée, nous examinerons le cas de Monsieur Demolombe séparément.

Edward fut conduit à une cellule glaciale dans laquelle il passa la nuit à attendre ce qu'il pensait être la fin, il allait se battre contre l'autre montagne de muscle sans avoir correctement mangé, et il n'arrivait pas à s'endormir, plus le temps passait plus l'angoisse montait, il se frottait convulsivement pour tenter d'échapper au froid sans succès... Il finit par succomber à un sommeil agité avant d'être réveillé aux aurores pour son duel.

Les gens étaient venu nombreux, Edward déglutit il lança un regard implorant au ciel, il y vit une colombe, l'oiseau tournait autour de lui. Edward le regarda tout en marchant vers un cercle qui leur servirait de terrain de combat, on lui retira ses chaînes et on lui donna une épée, mais le jeune homme n'avait pas détaché ses yeux de l'oiseau qui tournoyait librement dans les cieux. Il reprit courage, et il sut que bientôt il serait libre lui aussi, les dieux étaient de son côté..

Gurvald l'attendait, il était torse nu laissant apparaître sa carrure monstrueuse, il avait déjà l'épée au clair.
Edward fut poussé face à lui, il se mit en garde, l'épée dans sa main droite il mis sa main gauche dans son dos et attendit l'attaque.
Le début du duel fut annoncé, il attendit son adversaire, il usa de sa vérité pour former un poignard puis se contenta d'esquiver et de dévier les attaques de l'assaillant, en attente d'une ouverture.

Gurvald était agacé, le jeune homme n'attaquait pas il esquivait et déviait avec un savoir faire impressionnant mais il n'esquissait pas la moindre réponse, il avait l'impression de se battre contre un foutu courant d'air.
De rage il lança toute sa force dans une attaque, son épée se ficha dans le sol, il la retira à temps pur parer la première attaque de Linariel, puis il sentit une douleur cuisante sur sa cotte droite, le gamin venait de lui enfoncer un poignard dans le bide...
Gurvald était sonné, il recula et le gamin attaquait sans discontinuer, le guerrier reculait, il n'arrivait plus à réfléchir correctement, il balança un coup qui n'atteint que le vide, puis l'accusé lui répondit par un croche patte qui l'entraîna au sol, lorsqu'il rouvrit les yeux Gurvald avait une lame sur la gorge, il concéda le duel...

L'accusé fut gracié par la volonté des Dieux.

Edward était heureux, il couru vers Asphodias pour lui demander ce qu'il en avait pensé mais son instructeur lui tourna le dos et partit, alors que le jeune homme le rattrapait il lui lança :

- Tu as le pardon des Dieux, pas celui des hommes, ne revient plus à l'académie, je ne veux plus jamais te voir.

Edward s'immobilisa, il était soufflé, son cœur battait dans ses tempes, il regarda autour de lui, la foule le toisait avec une crainte mêlée de haine. Certains murmuraient des "meurtrier" sur son passage, il reçu un fruit pourri au visage, et un autre vint...
Le juge intervient et intima à la foule de se disperser, les soldats l'y aidèrent, et une fois le calme revenu, il lâcha pour Edward :

- Jeune homme, les Dieux t'ont innocenté et je respecte leur choix, mais je penses qu'il sera dur pour toi de vivre ici dorénavant, du moins pour le moment...

Edward hocha la tête, il avait la gorge sèche, ses jambes tremblaient sous l'émotion, ses yeux trahissait une détresse croissante, il n'avait pas envie d'être seul, il lança un regard implorant au juge, qui hocha la tête de manière négative et qui partit à son tour. Il était seul.

Le jeune homme n'avait nulle part où aller, il rassembla tout de même ses quelques affaires puis il partit sur les routes, convaincu que les Dieux ne l'avait pas épargné pour rien, il devait avoir une place qui l'attendait quelque part.

Il ne fallut pas trois jours pour qu'il finisse par croiser la route de Rolf, un chasseur de monstre qui allait changer son existence...

La rencontre

Rolf était un homme d'âge mûr, il faisait un bon mètre quatre-vingt-dix tout en muscle, il avait un visage carré, un bandana noir couvrait ce qui restait de son œil gauche, et son œil droit gris-vert fusillait le sol du regard. Selon ses estimations le jeune homme allait arriver par la route sur laquelle il se tenait, il avait envoyé un paysan lui dire qu'il était attendu sur cette route, Rolf n'avait plus qu'à attendre. Il détestait ne rien faire donc il tournait en rond en jetant toutes les trente secondes un œil plein d'espoir sur le chemin désespérément vide.
Il aurait été plus simple d'attendre le jeune homme dans un coin plus civilisé, mais il n'aimait pas trop les coins civilisés, il ne s'y sentait pas à l'aise, non qu'il n'aimait pas les gens, c'était plus qu'il n'aimait pas les imbéciles, et les gens étaient souvent des imbéciles.
Il aurait pu lui même partir à la recherche du garçon, mais il n'avait pas envie de lui imposer sa présence, il voulait qu'Edward choisisse de le rencontrer, les choses seraient plus simple ainsi.

Après un bonne centaine de tour et des dizaines de regards implorant, une silhouette finit par se découper sur la route au loin, elle approchait lentement sous le soleil qui s'était fait de plus en plus chaud en cet après midi, Rolf décida d'arrêter de tourner, il se campa sur ses positions croisa ses bras nus sur son torse et attendit que l'homme le rejoigne. Après une éternité il atteint enfin le chasseur de monstre.
Le jeune homme traînait les pieds sur le chemin poussiéreux, il suait à grosse gouttes dans son armure de cuir, il avait des plaies ouvertes sur le visage, son pantalon noir était déchiré au niveau de ses genoux qui étaient teinté de sang et ses mains était dans un état tout aussi lamentable.

Il lâcha dans une voie mi intriguée mi gémissante :

- Vous êtes le chasseur de monstre ?

Rolf hocha la tête sans un mot il toisait le nouvel arrivant, on le lui avait décrit, mais il ne s'attendait pas à ce qu'il lui vienne en si piteux état, il doutait maintenant d'en avoir la moindre utilité.

- Vous vouliez me parler ?

Rolf avait prévu un discours, mais il n'était pas bon pour les discours et il n'aimait pas spécialement parler. Il se contenta d'hausser les épaules un air circonspect sur le visage.
Edward prit une mine agacé : si ce vieux croulant l'avait fait venir jusqu'ici pour ... Edward se calma, il réalisa qu'il n'allait rien faire du tout, il se contenta de s'asseoir sur le bas-côté pour reposer ses jambes endolories, il resta silencieux, lui aussi savait tenir sa langue, de toute manière depuis quelques jours plus personnes ne le croyait, dès qu'il ouvrait la bouche on le traitait de menteur et de paria, il était aussi bien avec sa langue bien au fond de sa bouche.

Après une demi minute Rolf consenti enfin à prendre la parole :

- Je t'ai fais venir ici parce que je pensais que tu aurais pu m'être utile. Mais je ne m'attendais pas à ce que tu soit si...

Devant le regard interrogateur du jeune homme Rolf chercha comment tourner sa phrase. Il ne réussit pas à trouver une formule adéquat et sortit la première à laquelle il avait pensé :

- Je ne pensais pas que tu serais aussi faiblard, regardes-toi tu ne tiens même pas sur tes deux jambes ! Tu es bien Edward Linariel, le gamin qui a remporté son duel ?

Edward tiqua il se releva, fixa le borgne droit dans l’œil comme s'il pouvait le lui crever du regard, il ne supportait plus d'être traité comme un paria, il avait gagné son duel, il était innocent mais tous continuaient à le juger, s'il fallait se battre pour qu'on le respecte, il se battrait.... Il tendit la main droite et invoqua son épée bâtarde, elle arriva progressivement sous l'oeil curieux du chasseur qui le laissait faire.
Edward se mit en garde campé sur ses positions, il avait prit son épée à deux mains, déterminé à laver l'affront qu'on lui avait fait.

Rolf le regarda, il n'y avait pas besoin de parler pour comprendre où il voulait en venir.

- Je déteste les imbéciles...

Lâcha t il en sortant ce qui semblait être une faucille relié à une chaîne de plusieurs mètres. Il se mit en garde, la faucille dans la main droite la chaîne dans la gauche, au bout de la chaîne il y avait une sorte de petite boule en fer.
Le chasseur commença à balancer sa chaîne de manière régulière, comme un frondeur qui s’apprêterait à se servir de son arme. La boule sifflait doucement à l'oreille de Rolf, le gamin ne se dégonflait pas, il affichait un air déterminé.
Le chasseur sourit il s'était peut être trompé sur son compte...

C'est Rolf qui céda le premier il balança sa chaîne vers Edward qui sembla quelque peu décontenancé, le jeune homme para, mais son épée fut entourée par l'arme de son adversaire et ce dernier la lui arracha des mains.
Rolf avait le sourire de celui qui était fier de son coup, il allait sonner la fin des hostilités quand il se rendu compte que l'épée bâtarde avait disparu et que le jeune homme lui sautait dessus avec un poignard dans la main gauche.
Rolf esquiva l'attaque sans réelle difficulté et se permit même de faire un croche pied au jeune homme qui s'étala de tout son long, ce dernier se retourna directement vers lui et lui lança son poignard, le chasseur l'esquiva d'un mouvement du bassin, mais resta concentré sur ce qu'allait faire le gamin il avait déjà recommencé à former l'épée bâtarde.

Edward s'était relevé et remis en garde rapidement , il s'avança prudemment, il évita la chaîne puis la faucille, son adversaire le maintenait à distance respectable, il restait méfiant, et ses coups se faisaient de plus en pus précis, la chaîne semblait animé d'une volonté propre, elle faisait des courbes, et son adversaire pouvait l'envoyer droit devant lui, Edward ne pouvait espérer parer que la faucille mais elle allait à une telle vitesse et fouettait le vent si puissamment qu'il était bien plus sage de l'éviter.
Il espérait une accalmie en priant pour qu'elle lui permette de saisir sa chance.

Rolf regardait son adversaire avec un sourire carnassier, il jouait avec lui depuis un moment maintenant, mais le bougre esquivait plutôt bien, il l'avait mal jugé... Mais le gamin était rouge comme une tomate, couvert de poussière et de sueur, il avait quelques ecchymoses supplémentaire et devoir ré-invoquer les épées qu'on lui arrachait devait lui pomper pas mal d'énergie, il faudrait bientôt mettre fin à cette mascarade et passer réellement à l'offensive.
Rolf ralentit un peu il allait laisser le gamin attaquer et l'immobiliser sur la contre attaque, le tout était de ne pas le tuer dans l'opération...
Il fronça les sourcils, Edward lui fonçait dessus il avait vu la chaîne s'immobiliser et se jetait sur l'occasion, Rolf écarquilla les yeux, le petit imbécile venait de lui lancer son épée bâtarde dessus et s'était bien la première fois qu'il voyait ça. Il l'esquiva sans difficulté mais le petit salop n'en avait pas finit....

Edward avait chargé un peu à droite du côté de l’œil éborgné de son adversaire, ce dernier commençait à se repositionner, Ed lui lança sa dague pour lui compliquer la tâche il commença à former son épée, il était maintenant dans l'angle mort de son adversaire, il lui suffirait d'une épée à moitié formée pour transpercer les côtes de son adversaires, il mit toute son énergie pour arriver à portée, son épée était presque prête il fallait encore une demi seconde pour que la lame commence à se former, il amorça son coup qui fut bloqué, Rolf avait lâché son arme monstrueuse et se bâtait maintenant avec les troncs d'arbres qui lui servaient de bras, il en colla un en plein visage d'Edward, qui tomba à la renverse.

Le jeune homme était soufflé, il ne distinguait plus le haut du bas, et ne savait plus vraiment pourquoi il était là couvert de sueur, allongé dans la poussière le nez en sang...
La douleur le rappela à la réalité, le chasseur était littéralement sur lui, il l'avait immobilisé et s'écrasa de tout son poids sur sa cage thoracique. Edward glapit, il n'arrivait plus à respirer sous le poids du colosse, il allait s'étouffer, il chercha de l'air sans succès puis sombra dans l'inconscient.

Lorsqu'il se réveilla il faisait nuit, un feu crépitait à son oreille, on l'avait recouvert d'une peau de bête, son nez ne lui faisait plus vraiment mal. Il était au chaud, et se sentait bien. Il attendit quelque peu observant le ciel, puis il daigna enfin regarder les alentours, il était au bord de la route, le chasseur le regardait de l'autre côté du feu, il attendait qu'il soit à même de l'écouter.
Le jeune homme se tourna vers lui, et s'assit.

- Je t'ai fais venir ici, parce que je cherche un apprenti pour me succéder et faire les choses correctement, et il se pourrait bien que tu fasse l'affaire...

Edward écoutait songeur il attendait que le vieil homme poursuive.

- Je suis un chasseur de monstre, j'opère là où il y a du travail mais j'ai mon attache dans le coin. Donc soit tu viens avec moi et je t'apprend ce que je sais, soit tu continues à marcher sur les routes jusqu'à crever dans un coin...

Le jeune homme regarda les flammes qui dansaient sous ses yeux, il n'avait nulle part où aller, il y aurait des choses à faire, et peut être qu'il y trouverait sa place...

Edward accepta la proposition du vieux chasseur, et l'enseignement du jeune homme commença dès le lendemain. Rolf lui apprenait tout ce qu'ils savaient sur les monstres, la grande majorité du temps était consacré à la théorie il obligeait le jeune homme à lire des livres sur la vie des monstres illustré de quelques gribouillis fait par le chasseur lui même. Il lui apprit ensuite à se servir de la faucille à chaîne qu'il appelait « Kusarigama », il devait tous les jours s'entraîner à toucher des cibles sans faire tournoyer bêtement l'arme, et à maîtriser la chaîne comme si elle faisait partie intégrale de son corps...
Le vieil homme lui inculquait aussi sa vision de la chasse, il lui imposait la patience, le silence, l'immobilisme dans les fourrés, à attendre que la nature l'oublie et que les bêtes osent s'approcher de sa cachette.
Les journées étaient longues et épuisante, mais la récompense était de taille partir en chasse avec le maître, traquer la proie sans qu'elle s'en aperçoive, lui tomber dessus et l'achever sans la faire souffrir plus que nécessaire et récupérer la prime auprès des commanditaires.

Edward prit goût à tout cela et s'entraîna tous les jours pendant six années consécutives. Puis un jour, Rolf finit par tomber malade.

La dernière chasse

Le deux chasseurs s'étaient rendu dans la planque, un lieu caché dans la montagne de Saphir dans lequel le vieux chasseur avait entassé toutes les informations qu'il avait récolté sur les monstres du monde entier, ils avaient fait quelques quêtes du côté du désert de la patience puis étaient revenu presque bredouille et Rolf avait attrapé quelque chose sur le chemin du retour, il était allongé dans son lit pâle comme la mort, et dormait d'un sommeil agité, murmurant des bribes de paroles incohérentes.
Edward lui passa une serviette mouillée sur le front. Ils étaient passé chez le médecin à Ferèsis avant de venir jusqu'ici. Il n'y avait pas d'espoir pour le vieil homme, si ce n'était pas la maladie qui l'achevait, la vieillesse s'en chargerait... Il n'avait peut être pas choisit le bon médecin après tout...

Edward n'aimait pas rester dans la planque à regarder son maître mourir, et il avait des contrats qu'il devait finir dans le coin, d'autant plus que leur réserve de nourriture s'épuisait rapidement.
Il amena au chevet du malade ce qui restait en nourriture, et de l'eau en grande quantité, puis il sortit de la pièce.
Il déboucha dans ce qui faisait office de salon, une pièce assez grande avec deux bancs couvert des fourrure et une table en bois assistée de deux chaises au centre, les murs étaient chargés de livres, tous ne portaient pas sur la chasse. Rolf aimait bien la poésie, et la philosophie, il en avait inculqué quelques notions à Edward, sans franc succès.
Le jeune homme commença à préparer son paquetage avec seulement quelques gâteau pour tenir le voyage, il comptait chasser sur la route d'autant plus que les cibles n'étaient pas bien loin. Un ours du côté de Férésis avait causé beaucoup de grabuge et la région n'en manquait pas...
Il prit un livre sur une étagère et s'installa sur la table Rolf y avait recensé les différentes empreintes de pattes qu'on pouvait trouver dans les montagnes de Saphir. Edward les connaissait toutes il les avaient apprises par cœur. Il tournait les pages mécaniquement lorsqu'il sentit une présence derrière lui il se retourna doucement, Rolf le regardait un sourire forcé aux lèvres :

- Je viens avec toi.

Rolf n'avait jamais aimé rester à l'intérieur, il ne supportait pas ça, alors rester clouer au lit c'était hors de question.
Edward ne dit rien, il se contenta de regarder son maître, il avait le visage livide, on lisait dans son seul œil valide un océan de souffrance qui semblait assombrir ses pupilles, il avait remis ses habits de voyage, ses jambes flageolaient dans ses bottes, il se tenait au battant de la porte pour ne pas tomber.
Le jeune homme ouvrit la bouche, il la referma aussitôt, avala sa salive, ses lèvres tremblèrent comme sous le poids des mots qu'il ne se sentait pas capable de prononcer, il s'abstint hocha négativement la tête tout doucement.

Le vieux chasseur le regarda dans les yeux, on y lisait la souffrance, la peur mais aussi une certaine fierté, Rolf reprit :

- Je vais mourir Edward.

Sa voix avait été forte, comme s'il donnait un ordre, le silence se fit pesant, Edward se pencha vers les empruntes et laissa couler une larme. C'était comme si dire l'évidence à haute voix la rendait plus réelle.
Rolf continua :

- Je ne veux pas finir comme ça. Pas dans un lit à attendre qu'Uraang vienne, à compter les jours, les heures, et les minutes qui me séparent de lui.  
Sa voix manqua de se briser sur les derniers mots puis il reprit le contrôle et continua :

- J'ai vécu en chasseur de monstre, j'ai parcouru Madelle et combattu les bêtes les plus puissantes qui y vivent, j'ai vendu mes services à tous les habitants de ce monde et j'ai pu voir ce que la nature a de plus beau à offrir. Je ne veux pas finir à observer chaque pierre de ce foutu mouroir !

Sa voix résonna dans la planque, Edward s'était tu, il ne dit rien, il se leva et observa Rolf, ce dernier affichait un air déterminé :

- J'ai assez vécu.

À ce moment là Rolf parut extrêmement vieux, bien plus qu'il ne l'était vraiment, il avait l’œil de celui qui avait vu trop de choses, on y lisait maintenant un mélange de tristesse, de détermination et de résignation.

Edward ne s'opposa pas à lui, il ravala sa tristesse et se prépara à ce qu'il voulait être la plus belle de toutes les chasses.

Ils partirent aux aurores, ils voyagèrent lentement, Edward portaient les sacs et s'occupaient de tout, Rolf avait troqué sa faucille contre une épée courte et un bouclier, les deux armes étaient finement ouvragées, il avait demandé au jeune homme de l'enterrer avec au pied des montagnes une fois que la chasse serait terminée...

Rolf avait maintenant un sourire gravée sur les lèvres, plus ils approchaient de Ferèsis plus l'homme se montrait confiant, et heureux, il tenait la marche et alors qu'Edward s'était attendu à ce que le voyage se fasse en silence les deux hommes parlaient jusque tard dans la nuit, c'était comme si la maladie s'était envolée et que Rolf était redevenu le colosse invincible qu'il avait toujours été.

Ils suivirent la piste de l'Ours et finirent par le retrouver, un mastodonte de graisse et de fourrure, la bête reniflait l'air nerveusement, elle gronda à leur approche, l'animal ne semblait pas vouloir fuir, et c'était bien le gros problème qu'elle posait. Elle avait déjà rencontré d'autres chasseur, elle avait l'oeil gauche crevé et une flèche lui trouait le dos.
L'ours était immense il devait faire un peut plus de 2 mètres, il toisait les deux chasseur d'un regard mauvais, mais ne daigna pas s'avancer vers eux.
Rolf mit la main sur l'épaule de son apprenti et lui intima de ne pas intervenir.
Il saisit son épée et son bouclier et commença à s'avancer vers la bête puis il s'arrêta hésitant, se tournant vers son élève il lui dit :

- Je suis heureux d'avoir pu te transmettre ce qui fait de toi un bon chasseur. Je suis fier de t'avoir eut pour élève.

Sans qu'Edward ait pu répondre il se lança à l'assaut de la bête, cette dernière se leva sur ses pattes arrières en rugissant tendit que le chasseur l'approchait. Le combat fut rapide et violent, l'ours balaya le bouclier d'un coup de patte, son propriétaire tournoya sur lui même et stria le torse de la bête d'un filament rouge cette dernière se jeta sur lui dans un hurlement de rage douloureuse.
Rolf plia sous le poids de l'ours et fut submergé par les crocs et griffes de la bête, le vieux chasseur s'acharna tout de même à planter son épée dans les côtes de l'ursidé.
Après quelques secondes Edward s'avança à son tour, la bête releva son museau sanguinolent à son approche , elle glapit, fit quelque pas dans sa direction puis s'écroula.
Edward se pencha sur elle, mis fin à ses souffrances puis demanda le pardon de Niria. Enfin il alla voir son maître.
Rolf souriait, Edward ferma ses paupières et versa quelques larmes, avant de l'enterrer et de reprendre sa route. Le vieil homme allait lui manquer.

Il était temps maintenant temps pour Edward de chasser seul, il ne voulait pas retourner à la planque, pas maintenant, il avait envie de voir les bêtes que son compagnon avait pu voir et qu'il avait dessiné dans les livres du salon, il voulait vendre ses services au monde entier et voir, lui aussi, ce que la nature avait de plus beau à offrir.

[Fin]