L'histoire de Kieran ne débuta pas dans la joie et la bonne humeur, loin de là. La première chose dont ces orphelin se souvient, c'est l'explication très détaillée qu'un prêtre a fait de son état, celui d'esclave au service de la ville et des Dieux. Evidemment, il avait été élevé dans cette optique, alors il n'y trouva pas grand chose à redire. On lui avait inculqué cette morale, cet état d'esprit. Ainsi donc, il était logique dans sa petite tête que quelqu'un devait s'occuper d'entretenir la ville. Ainsi la vie était faite, il n'y pouvait pas grand chose.

Alors dès qu'il fut en âge de travailler, il ne fut nullement étonné de rejoindre les autres esclaves dans leurs tâches. Les journées étaient épuisantes, mais le repas après l'effort n'en était que meilleur. Il remerciait donc les Dieux pour cela, ainsi que pour les amis qu'il s'était fait au fil du travail et des rires le soir.

Au fur et à mesure des années, Kieran trouvait que ça devenait de plus en plus facile. Il s'était habitué à de tels efforts, son corps était devenu bien plus endurant, au même titre que celui de ses compagnons plus âgés. Certes, c'était souvent ingrat, sale, répugnant, dur, fatigant. Mais encore une fois, il fallait des gens pour le faire, et de toute façon il n'avait pas le choix.

Ce fut vers ses 15 ans, au moment de l'éveil de sa Vérité, qu'enfin Kieran put réellement décider lui-même du chemin qu'il voulait prendre. Bonne chose, n'est-ce pas ? Bon, certes il y a été plus ou moins forcé. Mais faut voir le bon côté des choses, il a pu gagner sa liberté ainsi. En tout cas, voici comment se sont déroulés ces événements...


La journée était l'une des plus chaudes qu'il ait connu. Un soleil de plomb frappait de ses rayons ardents la belle Karnès, l'enveloppant comme de coutume dans une épaisse chape de chaleur. Néanmoins, les Namès en avaient l'habitude et ainsi savaient comment le contrer, on voyait donc les citadins se déplacer dans leurs habituels habits blancs.

Néanmoins, pour les esclaves comme Kieran, c'était une autre paire de manches. Aujourd'hui, lui et quelques autres étaient occupés à creuser les fondations d'un nouveau bâtiment, travail donc extrêmement physique. Le jeune esclave de 15 avait donc choisi de travailler torse nu, son corps luisant à cause de la sueur qui dégoulinait. Ses longs cheveux lui collaient au visage et le gênaient pour travailler, alors il prit la décision de poser sa pelle et de se diriger vers l'eau pour se rafraîchir un peu. Mais il eut à peine le temps de poser le goulot sur ses lèvres desséchées que les ennuis commençaient à se montrer.

"Toi là ! Tu te crois où, hein ? C'est pas encore l'heure de la pause, alors continu de travailler. Les autres ne se défilent pas, contrairement à toi."

Cette voix caverneuse et puissante venait de leur surveillant. Kieran se retourna et le fixa dans les yeux tout en réfléchissant. Dans un sens, il n'avait pas tort, il était le seul à s'être arrêté pour boire. Mais il y avait des circonstances atténuantes qu'il convenait de rappeler. Alors, avec son sourire le plus naturel, il prépara sa réponse.

"Oui monsieur, néanmoins par ce temps on se doit de s'hydrater pour pouvoir continuer à travailler. C'est seulement parce que la construction est urgente que l'on travaille sous ce soleil, sinon on ne creuserait que la nuit", s'adressa-t'il d'un air gentil.

"Hmm, très bien... Mais que le travail soit fait, et bien., grommela alors le surveillant après avoir réfléchi, tout en serrant les dents de devoir être d'accord avec l'esclave.

Satisfait, Kieran termina ce qu'il avait commencé, s'essuya le front du revers de son poignet puis reprit son outil, prêt à retravailler. Ce qu'il fit tout en gardant son sourire, afin d'énerver un peu plus encore celui qui le fixait déjà d'un air malveillant.