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| Fausse alerte et vraie panique | |
| Auteur | Message |
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| (#) Sujet: Fausse alerte et vraie panique Sam 1 Oct 2016 - 17:18 | |
| 14 Nehaïah 1248 Elles avaient fait halte pour la nuit dans une auberge, la première qu'elles croisaient depuis leur sortie du désert de la Patience. Bien que Kharis ne roule pas sur l'or, elle avait proposé que Madène et elle profitent de cette occasion pour bénéficier d'un lit, d'un toit au-dessus de leurs têtes pour la nuit et d'un repas chaud et variant un peu des lanières de viande séchée qui faisaient maintenant leur quotidien. L'idée avait paru bonne à la Namès, qui l'avait suivie sans hésiter. Elle avait tout de même été soulagée de voir que la salle principale était quasiment vide. Il n'y avait en plus d'elles qu'un habitué des lieux, qui parlait pluie et beau temps avec le tenancier. Après un regard suspicieux à l'étrange duo, le patron leur avait accordé sa chambre la moins chère, un genre de cagibi situé au troisième et dernier étage de l'établissement, dans une mansarde sous le toit, sans même un cafuron pour laisser passer la lumière du jour et un peu d'air. Pour Madène, la petite pièce sentant le renfermé était une nouveauté, l'exotisme du voyage, bien loin de représenter leur budget restreint et les préjugés de l'aubergiste. De plus, les murs étaient sains, sans trous, et leur protection était la bienvenue contre les nuits froides et humides de ce début d'automne, surtout en comparaison avec la tente qu'elle partageait avec la liare. Après avoir entreposé la charrette de Kharis dans l'étable et déposé leurs maigres bagages au pied de l'étroit lit occupant leur chambre, les deux jeunes femmes étaient redescendues dans la salle à manger pour y prendre leur repas. La nourriture y était simple et sans originalité, mais chaude et de bonne qualité : Madène n'en demandait pas plus. Pour elle qui n'avait jamais mangé que de la viande séchée, le ragoût de viande fraîche était miraculeux. Le pain chaud et le fromage qui l'accompagnaient étaient un changement bienvenue dans le son quotidien fade. Détendue par la nourriture et le calme de la grande salle presque déserte, Madène profitait du feu qui brûlait vivement dans l'âtre et chassait le froid et l'humidité qui semblaient avoir infiltré jusqu'à ses os depuis leurs derniers jours dans le désert. Les murmures dans son esprit étaient quasiment absents ce soir-là, et elle aurait presque pu s'endormir tout net assise sur son banc, le dos et la tête appuyés contre le mur proche de la cheminée. Malheureusement, ce moment de grâce ne pouvait être éternel, et rattrapée par la nature, la jeune femme dû se résoudre à se lever et quitter ce cocon de chaleur et de bien-être. À regret, elle dû ressortir dans la nuit, sous la pluie fine qui s'était mise à tomber depuis qu'elles étaient arrivées, pour rejoindre la petite cabane servant de cabinets située à l'arrière de la cour de l'établissement. Une petite lanterne abritée était posée sur une étagère à côté de la porte, sûrement maintenue allumée tout au long de la journée et de la nuit par le garçon d'écurie qui somnolait dans la paille, mis au chômage technique par le manque de clients ce soir-là. Guidée par cette lumière dans la nuit, Madène trouva facilement son but. Elle se saisit de la lampe, entra, et tira le gros verrou rouillé derrière elle.
Dernière édition par Madène Calis le Sam 1 Oct 2016 - 17:42, édité 1 fois |
| | | | (#) Sujet: Re: Fausse alerte et vraie panique Sam 1 Oct 2016 - 17:39 | |
| Après s'être dépêchée de se soulager pour retrouver au plus vite la chaleur de l'auberge, Madène se prépara à affronter une nouvelle fois la pluie glaciale et déverrouilla la porte. Ou plutôt essaya. Le verrou n'avait pas glissé sans accro quand elle l'avait fermé, ce qui aurait pu la mettre sur la voie. La rouille qu'elle avait fait glissé en poussant le loquet dans un sens bloquait maintenant tout mouvement inverse. Les doigts tremblant de froid et d'angoisse, elle tenta toutes les techniques possibles pour le faire bouger : elle le poussa, se tourna pour le tirer, s'enveloppa les doigts avec un pan de tissu de ses vêtements pour avoir une meilleure prise ; rien n'y fit. Elle était coincée.
Une boule dans la gorge et les larmes aux yeux, elle essaya encore et encore de débloquer la porte, en vain. Ses doigts tremblaient de plus en plus à mesure qu'ils se refroidissaient, et la panique s'installait à grande vitesse, rendant ses gestes d'autant plus saccadés et imprécis. Plusieurs fois elle échappa le loquet en essayant de tirer dessus, et s'égratigna les mains en ripant sur le bois abîmé de la porte.
coincée coincée COINCÉE
Après plusieurs très longues minutes d'essais infructueux, la jeune femme finit par cesser de s'acharner sur le verrou et se laissa glisser au sol, le dos contre la porte. Des sanglots silencieux secouaient ses épaules ; elle se cacha le visage de ses mains, et enfouit sa tête dans ses genoux. Elle était bel et bien enfermée.
tu es coincée ici pour toujours TOUJOURS
Elle n'essaya même pas de se boucher les oreilles. La sensation d'oppression se faisait de plus en plus forte, comprimant sa poitrine, ses oreilles. La tête comme dans un étau, elle se battait pour retrouver son souffle.
elle va t'abandonner ici si tu la rejoins pas vite elle va partir et tu seras toujours coincée
Elle releva la tête, les joues baignées de larmes, pour fixer son regard sur la petite flamme de la lampe. La vue brouillée, elle ne parvenait pas à distinguer le niveau d'huile, mais elle n'osait ni se rapprocher ni essuyer ses yeux pour mieux voir. Elle avait trop peur de la réponse que cela lui donnerait. L'idée de se retrouver seule dans le noir dans ce réduit lui donnait l'impression d'avoir avalé des serpents qui se tortillaient encore dans son ventre.
dans le noir elle va s'éteindre coincée dans le NOIR
Elle finit par se relever en battant des cils pour s'éclaircir la vue, et se rapprocha de la lampe. Un frisson de panique la parcouru en constatant le niveau de l'huile. Certes la lampe n'était pas pleine quand elle était arrivée, mais à présent il ne restait qu'un petit fond de combustible. Elle avait dû passer pas loin de la moitié d'une heure à essayer d'ouvrir cette porte puis à s'abandonner à l'angoisse. Les ténèbres étaient imminentes, et les voix assourdissantes.
NOIR NOIR ABANDONNÉE PERSONNE NE TE TROUVERA
« Non, tais-toi, tais-toi ! »
Cédant à la panique, Madène commença à tambouriner à la porte, sans trop savoir ce qu'elle espérait. Elle ne risquait pas de faire bouger le panneau de cette manière et cela n'allait pas débloquer le verrou, mais elle n'était plus capable de réflexion. Après quelques minutes, les mains douloureuses, elle finit par laisser tomber et posa son front contre le bois humide. La petite flamme de la lampe crachota encore quelques instants avant de s'éteindre, arrachant un gémissement misérable à la jeune femme.
Dernière édition par Madène Calis le Jeu 27 Oct 2016 - 18:51, édité 1 fois |
| | | | (#) Sujet: Re: Fausse alerte et vraie panique Sam 1 Oct 2016 - 17:41 | |
| « Il y a quelqu'un ? » Madène sursauta, et ferma très fort les yeux. La voix était un peu différente, plus hésitante, mais elle n'allait pas se laisser berner par une ruse aussi grossière. Ces voix qui la persécutaient depuis son enfance, elle avait depuis longtemps appris qu'elles pouvaient changer, qu'elles trouvaient toujours un nouveau moyen pour la torturer. Lui donner de faux espoirs n'était qu'une méthode parmi d'autres, et de plus une qu'elle avait déjà expérimenté par le passé. « Laisse-moi tranquille, arrête de me harceler ! »
Un silence. Elle releva la tête, surprise. Au cours des années, ses invectives n'avaient encore jamais réussi à faire partir les voix, bien qu'elle ait tout essayé : les pleurs, les supplications, les cris et les insultes ; rien n'y faisait. Elle se demandait encore comment c'était possible, ce qui était différent de d'habitude, ou même si c'était seulement réel, quand des petits coups frappés à la porte la firent s'éloigner vivement, farouche.
« Mademoiselle ? Le verrou est dur, est-ce que vous vous êtes enfermée ? » Le gamin de l'autre côté de la porte semblait décontenancé par sa réaction, mais il continua quand même, la situation semblait ne pas être un événement rare pour lui. De nombreux clients devaient se cadenasser dans les toilettes et ne plus arriver à en sortir. « Il suffit de soulever un peu la porte en tirant le verrou, ça se décoince tout seul normalement ! »
Hésitante, Madène se rapprocha pour faire une dernière tentative. Soulever la porte était plus facile à dire qu'à faire, mais en s'aidant de son épaule pour monter un peu le panneau de bois, elle réussit à faire bouger le loquet. Enfin. D'abord petit à petit, millimètre par millimètre, puis il finit par venir d'un coup, débloquant la serrure. Une fois déverrouillée, la porte tourna sans difficulté dans ses gonds. À part ce maudit verrou, l'auberge était globalement bien entretenue, et les portes huilées correctement. Celui qui l'avait aidée était le garçon d'écurie qu'elle avait vu dormir dans la paille en arrivant. Il se tenait interdit devant elle, éberlué de voir cette adulte, les cheveux en bataille et les joues mouillées de larmes. Il s'écarta du passage pour la laisser passer, dans dire un mot, et elle ne se fit pas prier pour s'éloigner de cet endroit.
Elle détala à toute vitesse en direction du bâtiment principal sans se préoccuper de la pluie qui continuait à tomber, traversa en coup de vent la salle à manger où Kharis avait commencé à tailler la bavette avec l'unique autre client de la soirée, dans une bonne humeur insouciante. Elle ne s'arrêta qu'une fois réfugiée dans la chambre qui lui était destinée. Elle en repoussa la porte sans la fermer complètement, et se roula en boule aux pieds du lit, emmitouflée dans son manteau de voyage pour essayer de se réchauffer. Les émotions de la fin de soirée l'avaient entièrement vidée de son énergie, et en quelques instants elle fut endormie profondément. |
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