Je n'ai jamais connu ma mère. Fantôme de mon passé, son absence me hante indéfiniment. De temps à autre, une voix féminine provient du fond de mon esprit pour bercer mes rêves ou me secouer un peu.
Depuis la mort de la figure maternelle, mon père s'est renfermé sur lui-même. Toute gaieté, tout bonheur semble avoir tout simplement déserté de son être. Des rumeurs stupides racontent que si son âme était à nu, elle serait aussi dur et aussi froide que la plus grosse des roches gelés en hiver. Je réponds souvent à ces affabulations que l'hiver cède souvent au printemps et que seul le temps peut creuser dans la pierre.
Mon enfance a toujours été bercé par les entraînements et les leçons de mon paternel. Chaque jour était un nouveau combat. J'ai donc appris à me défendre, à me débrouiller seule et à me forger une carapace me protégeant de la chaleur de l'amour et de l'amitié.
Parfois, j'en veut à mon père de me tailler, comme lui, un cœur d'une froideur effrayante. Certains jours, il m'arrive de rêver de me laisser aller dans les bras de l'être aimé, de sentir des baisers sur mon front et de m'endormir sous les paroles réconfortantes d'un compagnon partageant pour toujours ma vie et mes espoirs. Hélas, je semble être vouée à une existence dans la solitude et la dureté du sol.
Le seul être me démontrant sa fierté et son amour reste mon frère. Nous avons tissé un lien étroit et très particulier. Ce jeune garçon de 14 ans me rappelle ma mère, tant par son physique que par son côté bon vivant, transpirant la gaieté et la joie de vivre. C'est d'ailleurs grâce à lui que je suis devenu une gardienne.  
Un jour, alors que je m'entraînais au bord de la rivière s'écoulant près de mon village, un cri retentit. Cette voix, je l'aurais reconnu entre mille. Mon frère avait besoin d'aide. J'accourus auprès de la source y bruit et découvrit un arbre en feu. Mon cadet était perché sur une branche, ne pouvant redescendre. Sans une seconde d'hésitation, je m'élançai dans l'arbre, atteignant le jeune garçon rapidement. Alors que je l'agrippais, il se dégagea et m'ordonna de sauver le nid. Je suivis son regard et découvrit un nid où un oiseau, une mésange selon son plumage, couvait ses œufs. Elle semblait affolée devant les flammes mais refusait de quitter des futurs petits. J'hésitai un instant puis me décidai lorsqu'une flamme menaça de lécher la jambe de mon protégé. J'attrapai la structure en brindilles et sautait sur le sol, protégeant de mon corps les êtres vivants dont la vie dépendait de moi: mon frère et les oiseaux.
Peut-être l'arbre de Vie trouva dans cette action un acte héroïque mais je fut choisie comme apprentie quelques temps plus tard, à l'âge de 15 ans. Alors que les prêtres et Gardiens faisaient ce que j'appelle leur moisson, la branche sacré s'illumina entre mes mains. Après une longue cérémonie barbante, je fus prise sous l'aile d'un des Gardiens et appris beaucoup à ses côtés pendant 5 ans. Mon caractère indépendant m'aida dans ma vie loin des autres humains. Seule l'absence de mon frère m'apporta un peu de nostalgie.
Néanmoins, je protège la nature afin qu'il soit fier de moi, ayant enfin trouvé ma place dans ce monde.