Un lourd colis est adressé au manoir du Bois Blanc, dans les chutes de Veroni, déposé devant la porte au petit jour. Une lettre y est accrochée, écrite d’une main rapide mais élégante.

Arnlo, le 8 rosendas 1248

Elerinna,

Ma chère, nous sommes bien rentrés à Arnlo. Tant de choses nous sont arrivées que j’ai eu la sensation d’avoir quitté la ville plusieurs années, mais heureusement rien n’a changé ! Mes occupations ces derniers jours me prennent beaucoup de temps, et il m’est difficile de répondre à toutes les invitations que je reçois. J’ai l’impression que mon départ précipité a fait croire à certain que j’étais mort : j’avoue que le petit effet de ma réapparition tout aussi inattendue me ravis. Je crois cependant que Jonas regrette le calme des Chutes, tout comme Sable qui déplore votre absence – et je ne pense pas que ce soit lié uniquement à votre jambe !

J’ai eu l’honneur de croiser votre époux lors d’un goûter organisé par la comtesse de Belreuil, mais bien entendu il n’a fait aucune mention de vous en public. Tout porte à croire que vous avez échappé à sa vigilance, cependant je ne peux que vous conseiller de vous montrer prudente si vous revenez un jour dans la Plaine. Son orgueil a été trop blessé pour qu’il vous oublie si aisément.
J’ai également rencontré votre père à l’occasion d’une visite à son atelier. Il ne m’a pas non plus parlé de vous et je n’ai pas osé aborder le sujet mais il semblait rongé par le souci. Voudrez-vous que je lui fasse parvenir de vos nouvelles ?

Pour arriver au réel sujet de cette lettre, j’imagine que vous vous interrogez sur la signification de ce livre vierge ; il s’agit d’un tome de communication. Donnez-lui un titre et ils vous permettra de recevoir des courriers peu importe où vous vous trouvez et d’en transmettre à votre tour à quiconque en possède également un. C’est un modeste cadeau qui, je l’espère, se montrera utile. Il vous suffit de terminer votre message par “Adressé à …” en indiquant le titre de celui de votre correspondant.
Je reste inquiet au sujet de votre jambe, espérant qu’elle guérisse rapidement et que son remplacement ne vous joue pas de tours. Il s’agit là d’une première expérimentation et je n’ai aucun moyen d’être certain de sa stabilité. Si vous veniez à avoir des déboires avec, n’hésitez pas soit à me rendre visite, soit à me le faire savoir pour que nous puissions nous rencontrer dans des conditions sûres.

Portez-vous bien.
À bientôt, je l’espère.
R. S.

P.S. : Adressez vos missives à “Sables d’Ivoire”.

Le message est écrit au fusain, et taché. L’écriture est à peine reconnaissable, paniquée.

17 Virgonès 1249

Je crois que Jonas est prisonnier des Récleyès. Je n’ai pas encore réussi à le trouver. Je prie pour qu’il soit encore en vie.
Je prie pour que vous soyez encore en vie.
Je vous conjure de lire ce message rapidement. Je ne sais pas quoi faire.

R.S.

Adressé à Vents Argentés