Le souvenir des dragonniers

Cette découverte allait donner un nouveau tournant à la carrière de Juliette. Si elle avait ouvert cette boutique à Acretis, c’était dans l’espoir de pouvoir y vendre des objets ayant une réelle histoire et ce qu’elle avait entendu au sujet d’un endroit présumé découvert récemment avait attiré sa curiosité. La demeure des Stealin était entrée dans l’histoire lors d’un des plus grands éboulements des montagnes de Saphir.

Les Stealin étaient à l’époque méprisés par les leurs, car pour la troisième fois en sept générations, l’un des leurs était à nouveau devenu dragonnier lors d’une attaque à la frontière des terres de feu. Cela remonte à plus de cinq cent ans. Les dragons commençaient à disparaître peu à peu du continent, mais la traque des Arvèles ne fut jamais aussi intense et les dragonniers étaient bien souvent reniés par leur propre famille. Sauf pour les Stealin. Ils construisirent une demeure au cœur même de la montagne pour rester cacher avec leurs dragons de la colère de leur confrérie. Mais un jour lors d’une tempête, la montagne se referma sur eux et toute la famille périt ainsi que leurs dragons.

L’endroit était resté introuvable jusqu’à ce qu’un nouvel éboulement ait eu lieu aux alentours. Les habitants qui ont perdu leur maison lors de ce drame ont ainsi aperçu une forme étrange dans la montagne en se rendant à Féresis. Certains d’entre eux ont voulu aller voir de quoi il s’agissait, mais tous ne sont pas revenus. Depuis la dernière tempête, une Baan'Shi a découvert les lieux et s’y est installée, lorsque les villageois se sont approchés, la créature a alors défendu son territoire et pour le moment la zone est encore instable et les autorités ne s’y sont pas encore rendues.

Juliette s’était rendue à Féresis aussi vite qu’elle avait pu. Elle avait dû accepter de payer une compensation à son employée pour ce changement aussi soudain d’emploi du temps. Peu lui importait l’argent, ce qui motivait Juliette, s’était cette découverte qu’elle voulait être la première à faire. La créature ailée pouvait être maîtrisée, il suffisait pour cela de trouver un chasseur de monstres. Quant au terrain accidenté, le temps s’était calmé depuis, et même si la pluie continuait à tomber sur la région, il fallait que Juliette y aille. Une fois en ville, elle avait rencontré une de ses connaissances pour l’aider à contacter quelqu’un. Après trois jours à attendre une réponse, un rendez-vous fut convenu.

Son ami lui assura que son contact s’était porté garant et qu’il ne lui envoyait pas un novice, il précisa même qu’il venait de la forêt, là où l’on ne trouvait pas meilleur chasseur. Juliette accepta et se mit tout de suite en route, elle devait retrouver le chasseur seulement à quelques kilomètres du nid de la Baan'Shi. Habillée de ses cuissardes noires et d’un manteau bleu nuit, elle n’avait emporté que le strict minimum sur son dos et porté son chignon serré. Si tout se passait bien, après le problème de la Baan'Shi éliminé, il lui suffirait de renvoyer le chasseur en ville où l’attendait sa récompense chez la connaissance de Juliette, pour envoyer un message à son équipage afin de l’aider à transporter ce qui pouvait être sauvé de cet endroit.

Juliette déposa le cheval qu’elle avait loué à Féresis dans un village à moitié abandonné contre une pièce d’argent. Le lieu du rendez-vous ne se trouvait qu’à quelques kilomètres au nord. Le terrain était escarpé et dès les premiers pas Juliette se retrouva couverte de boue aux jambes. Ses pieds restaient collés à la terre et faisaient un effet de ventouse. Elle progressait lentement. Le chemin commençait à se rétrécir. De nombreux arbres étaient tombés lors de la tempête et l’un d’eux reposait au milieu de la route. Son tronc était épais et Juliette dut monter dessus pour passer de l’autre côté. Ses genoux et ses gants de cuir noir se recouvrirent de boue et d’écorce. Une fois de l’autre côté, elle se tapota les mains et regarda aux alentours. La pente s’accentuait devant elle, le nid ne devait plus être très loin selon les dires des villageois. Mais avant tout, il fallait qu’elle trouve le chasseur, ou plus qu’il la trouve, car Juliette n’était pas dans son élément au milieu de la montagne et elle n’avait pas l’intention de quitter le sentier sans son guide.

Les pieds doucement enfoncée dans le sol, Neva se pratiquait à son sport favoris : le tir à l'arc. Bandé au maximum, les bras tremblant d'effort, le front ruisselant de sueur, elle avait le regard fixé sur la cible. Puis, enfin, elle relâcha sa flèche. Celle-ci fila aussi silencieuse que le vent et se plante dans la trachée de sa cible, celle-ci s'écroulant, morte. Tournant son regard vers Proot, elle s'exclama, souriante.

- Proot, ça te dit de la viande de Cerva Suma pour dîner ?

- Je s'appel Proot avoir très faim, alors Je s'appel Proot d'accord. Mais, Je s'appel Proot aime pas chasse sans raison, mama sait pourtant.

- Mama est désolé Proot, Mama oublie souvent que tu déteste la chasse inutile. Mama ne le referas plus, d'accord ?

Avec un couinement ravie, Proot colla son front contre la joue de sa mama avant de regarder fixement à l'horizon.

- Mama, Je s'appel Proot sent présence homme venir ici. Je s'appel Proot sent pas danger, mais mama prudente.

Acquiesçant, Neva éteignit vite fait le feu et se tapis dans l'ombre, attendant la venue de l'homme mystérieux. Puis, un souffle de soulagement lui échappa en le voyant. Sortant de l'ombre, Neva prit la parole, un souffle de bonheur lui échappant doucement. Après-tout, ce n'était pas souvent qu'elle avait la chance de voir son mentor, l'homme qu'elle considérait comme un père.

- Bonjour Hector, qu'est-ce qui t'amène par ici ? Rien de grave, j'espère !

Le regard soudain inquiet, Neva s'approcha, recherchant la moindre blessure sur le corps de son ami. Celui-ci éclata d'un rire clair et sincère, particulièrement joyeux.

- Pas d'inquiétude, pas d'inquiétude. Je viens te voir car un ami m'a contactée. Une de ses amie auraient besoin d'une chasseuse de monstre et celui-ci m'a contactée pour savoir si tu étais disponible. Ne sachant pas où tu étais, il m'a demandé à moi de te trouver. Tu connais mon pouvoir, je saurai toujours où te trouver.

Acquiesçant en riant, Neva tourna son regard inquisiteur vers Hector. Une moue dubitative sur le visage, elle pensait. Ainsi, ont avait besoin d'elle. Pensive, elle tourna son regard vers l'horizon, réfléchissant. Hector la laissa faire, il savait qu'elle avait besoin de temps de réflexion. Finalement, tournant son visage vers son amie, un fin sourire fleuri sur son visage. Celui-ci éclata de son rire particulier, lui tapotant le bras opposé à Proot. Il avait comprit qu'elle acceptait.

- Bien bien, je suis content de voir que tu accepte cette mission. Le contact de mon ami t'a donné rendez-vous dans les Montages de Saphir. Je sais que c'est pas mal loin d'ici, mais penses-tu pouvoir y aller tout de même ?

Éclatant de rire, Neva accepte et, remballant ses affaires, elle prit soin de bien emballer la viande, pour ne pas qu'elle périme, avant de la mettre dans son sac. Puis, tournant son visage vers Hector, elle le serra dans ses bras et se dirigea vers les Montagnes de Saphir, avec les indications de Proot de temps en temps -bah oui, malgré elle, Neva changeait souvent de trajectoire sans le vouloir, du coup Proot était obligé de lui indiquer le bon chemin ensuite-.

Ricanant souvent, elle finie par enfin poser le pieds sur le sentier des Montagnes.

- Bien bien bien, comment penses-tu que sera notre contact Proot ? Une homme ? Une femme ? Quelqu'un de jeune ou de vieux ? Sûrement pas un autre chasseur, toi comme moi savons que s'ils avaient besoin de moi, ils seraient venus directement me contacter.

Proot murmura que selon lui, c'était une personne assez forte, mais qui ne connaissait pas l'endroit où ils devaient se rendre. Acquiesçant, Neva accéléra le pas, espérant rattraper son contact rapidement. Puis, finalement, elle aperçu au loin une silhouette ne quittant absolument pas le sentier. Tournant son regard vers Proot, elle fit une mine pensive et celui-ci acquiesça de la tête. Ainsi, c'était elle. Pensive, elle pencha la tête de côté, étudiant son profil. Hochant doucement, elle inspira profondément et se mit à siffler doucement, code reconnaissable des chasseurs -du moins c'est ainsi qu'elle avertissait ses contacts de sa présence-. Accélérant le pas, elle finie par se rapproche de la personne et l'interpella.

- Pardon, excusez-moi de vous dérangez, mais est-ce vous qui cherchez une chasseuse de monstre ? J'imagine que oui, car personne de normalement constitué et n'ayant pas de chasseur de monstre sous la main ne viendrait ici seul, mais je peux toujours me tromper.

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Le sifflement raisonna au milieu des arbres. Juliette regarda tout autour d'elle et ne cacha pas surprise en voyant une jeune femme sortir du bas côté. Loin du stéréotype du chasseur de monstre bourru qu'elle s'était imaginée, une femme de moins de trente ans se tenait devant elle. Avec son débit de paroles assez soutenu, elle était bien loin des clichés du chasseur taciturne et asocial. Portant un arc, elle semblait s'être déplacée avec facilité dans le terrain escarpé de la montagne et n'avait pas l'air essoufflée contrairement à Juliette dont les joues commençaient légèrement à rougir. Et sa taille ne devait pas être étranger au fait qu'elle se soit aussi à l'aise au milieu de la végétation. Maintenant qu'elles se faisaient face l'une et l'autre, Juliette dominait de son mètre soixante dix la chasseuse. Elle était vraiment petite, mais Juliette se garda bien de lui faire remarquer que cela l'avait interloqué. Elle se contenta de répondre très brièvement.

- Je suis effectivement là pour ça, Juliette Célian, votre ami s'est porté garant pour vous, mais ne m'a pas transmis votre nom...

Juliette aurait aimé en connaître davantage sur la chasseuse avant de se lancer, mais l'urgence de la situation et son impatience avait eu raison d'elle pour une fois. Ce n'était pas vraiment dans ses habitudes de se lancer dans ce genre d'expédition aussi peu préparé. Il allait maintenant falloir avancer dans le milieu de la chasseuse et laisser le sentier derrière. Ce n'était pas gagné d'avance. Cela avait beau faire des années que Juliette vivait maintenant à la surface et qu'elle traversait le continent à la recherche de trésors et merveilles, mais elle ne supportait toujours pas les longues marches. Rapidement, ses pieds lui faisaient aussi mal que si elle marchait sur du verre pilé. En ville encore, cela allait, les rues pavées et parquets cirés étaient au contraire très agréable à fouler. Mais dès qu'elle se retrouvait dans la nature et plus encore dans la montagne, Juliette avait l'impression que ses pieds se retournaient contre elle et elle en venait presque à regretter son apparence Héléo, presque. Le chemin vers le nord devenait de plus en plus raide, bientôt ils seraient bloqués par des parois rocheuses et verticales. Juliette commençait seulement à appréhender le voyage. Maintenant que la chasseuse était belle et bien présente, la mission était devenue concrète. Il n'y avait plus rien en travers de son chemin si ce n'est cette créature ailée aux faux airs de dragon. Juliette quitta le chemin de terre battue pour rejoindre la chasseuse dans son élément.

- Je vous suis. Sachez que je peux vous être utile pour combattre cette créature. Savez-vous comment vous allez procéder ?

Son pas était incertain au milieu de toutes ces brindilles, quoi que le sol légèrement moins collant grâce à cela. Mais il restait noyé par la dernière pluie et plusieurs fois Juliette risqua de glisser. Elle n'était absolument pas discrète, mais au moins, elle arrivait à suivre la cadence une fois son équilibre trouvé, prête à suivre la chasseuse partout où elle irait. Si d'ordinaire, c'était elle qui donnait les ordres, quand elle se retrouvait dans ce genre d'environnement, elle ne prenait pas un expert avec elle sans raison et savait être à l'écoute pour tirer au mieux profit de ses compétences.

La personne interpellée finie par se retourner et Neva garda son exclamation pour elle. Ainsi, c'était une Héléo qui lui avait demandée de l'aide ? Celle-ci semblait essoufflée, elle peinait à reprendre son souffle après cette longue marche et elle avait les joues rougies, témoignant de son essoufflement. Un vague sourire lui vint aux lèvres et, se reprenant, elle écouta ce qu'elle avait à lui dire.

*Juliette Célian, hein ? Connait pas.* Ce fût sa première pensée. Puis, ensuite, elle repensa aux paroles de celle-ci et devint songeuse. Ainsi, c'était son mentor qui lui avait parlé et non pas un ami de celui-ci. Grognant devant le ridicule de la situation, elle se frotta le visage de la main gauche, gardant la droite dans la poche de son pantalon. Soupirant, elle finie par rouvrir les yeux et les riva sur Juliette, le regard intense et plongée dans ses réflexions. Ainsi, elles allaient chasser un Baan'Shi et cette Juliette prétendait pouvoir lui être utile. Elle l'espéra fortement, car elle savait très bien que ceux-ci vivent en groupes. Marmonnant dans sa barbe, elle se mit à réfléchir, associant divers plans avant de les repousser, sachant très bien que ceux-ci ne fonctionnerait pas.

Qu'est-ce qui pourrait attirer la créature loin de ses congénères ? Plus elle y pensait, plus Neva n'avait qu'une seule idée en tête. Voler un bétail et appâter la créature avec. Certes, ce n'était pas très gentil pour la pauvre bestiole qui se fera sacrifier, mais si ça fonctionnait, elles étaient certaines de n'avoir qu'une seule créature à combattre et non pas trois ou quatre. Soupirant, elle se tourna vers sa camarade et affirma, la voix vibrante de conviction -même si au fond d'elle, Neva n'était pas certaine que son plan fonctionne correctement-.

- Tout d'abord, je ne sais pas si vous connaissez cette créature, donc je vais vous faire un léger speech pour vous la décrire le plus fidèlement possible. Les Baan'shi ne sont pas extrêmement rapide, mais peuvent tout de même se déplacer avec une plus grande vitesse que nous, pauvres êtres dépourvus d'ailes. Les leurs permettent aux Baan'shi de voler sur de grandes distances et les griffes peuvent nous attraper et, si nous ne faisons pas assez attention, nous pouvons vite nous retrouver en situation de crise. Par exemple, attraper entre leurs griffes, un Baan'Shi peut très bien nous emmener là où il vit, afin de ne plus en combattre un mais de trois à quatre. Car oui, je ne sais pas si vous le saviez, mais ils vivent la plupart du temps à plusieurs, bien qu'il existe de rares créatures de cette espèce qui vivent en solitaire. Heureusement pour nous, le Baan'shi sortent souvent de leur repère pour aller attaquer du bétail lorsque la faim se fait sentir. Donc, ce que je propose, c'est de prendre un bétail et d'appâter une de ces créatures. Avant, il faudra évidemment poser un piège pour lui faire un minimum de dégâts et, ainsi, nous faciliter la tâche. Des questions ?

Le regard brillant, Neva trépignait littéralement d'impatience, mais également d'excitation. Son sang bouillonnait dans ses veines. Elle finit par pointer la direction qu'elle pensait être la bonne, avant que son golem ne la rappelle à l'ordre.

- Je s'appel Proot dit que mama pointer mauvaise direction. Je s'appel Proot savoir que Baan'Shi vivrent plus au nord, mais mama pointer direction Ouest. Je s'appel Proot veut dire à mama que mama pas bonne orientation, donc mama laisser Je s'appel Proot dire où aller.

Rougissant légèrement, elle changea la trajectoire de son doigt, indiquant cette fois-ci la direction qu'elle savait la bonne -merci Proot-. Se frottant les yeux, elle espéra que son mauvais sens de l'orientation ne vienne pas tout faire foirer. Grognant, elle finie par les rouvrir, rivant son regard devenue acéré et assoiffé de sang et de combat sur Juliette.

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Décidément la chasseuse était un véritable moulin à paroles, mais au moins cela rassurait Juliette. Sa description très complète de la bête laissait sous entendre qu'elle s'y connaissait très bien et connaissait son métier. Quant à son piège, c'était assez simple, mais il avait de forte chance de réussir. Si la créature s'était autant approchée de la civilisation, cela devait justement être pour pouvoir profiter de la profusion de nourriture aux abords des zones peuplées de la montagne. Mais cela supposait qu'il faudrait trouver un troupeau, or la plupart des habitants avaient fui l'endroit ces derniers jours à cause de la créature.

Le temps qu'elle avait passé à Ferèsis lui avait permis d'apprendre qu'un couple de vieillards sans enfant n'avait pas voulu quitter leur ferme alors qu'ils pouvaient presque apercevoir de leur fenêtre l'antre de la bête. C'était une aubaine. Ces gens qu'elle avait pris pour des cas désespérés seraient très certainement près à accepter de les aider en échange de leur tranquillité perdue. Juliette était même prête à lâcher une petite pièce en dédommagement. Si l'ouverture dans la montagne était bien l'ancienne demeure des dragonniers, ce ne serait rien en comparaison aux trésors qui avaient dû rester enfermés dans la montagne depuis des centaines d'années. La marchande d'antiquités était impatiente d'arriver à leur destination, même si elle ne pouvait s'empêcher de redouter le combat avec la créature. N'ayant aucune question, elle se contenta de secouer la tête en signe de négation.

Jusqu'à maintenant Juliette avait évité du regard la petite sculpture de bois qui reposée sur l'épaule de la chasseuse pour ne pas paraître indiscrète. Mais maintenant que la chose avait parlé, son regard était planté sur la petite créature. Un golem ? Il était si... petit. Le fait qu'il corrige la chasseuse sur la destination fit lever un sourcil à Juliette. Ce n'était pas engageant une chasseuse sans sens de l'orientation, mais si elle l'avait engagé, c'était avant-tout pour s'occuper de la créature, tant qu'elle savait se servir de ses armes, Juliette n'en demandait pas plus.

Elle se dirigea vers la direction pointée par la petite créature, elle était petite, mais avait du cran et de l'assurance ce qui avait fait sourire Juliette en l'entend faire une remontrance à la jeune femme et elle avait préféré commencer à avancer plutôt que de montrer son sourire moqueur. Elle n'avait pas fait cent mètres entre les ronces et les racines des arbres quand elle se décida de parler de la ferme à la chasseuse :

- Pour votre idée de piège, nous pourrions nous séparer ? J'ai entendu parler qu'il y avait une ferme habitée non loin de la tanière de la créature. Pendant que vous fonctionnez le piège, je pourrais m'occuper de ramener une des bêtes de leur bétail. À moins que vous ayez déjà tout de prêt ? La ferme se trouve à moins d'un kilomètre à l'Est de l'endroit où la créature a fait son nid. C'est un petit détour.

Elle continue de marcher en parlant. La journée passe rapidement au milieu des montagnes et il serait malheureux d'entrer dans la grotte une fois la nuit tombée. Dans l'idéal, il faudrait réussir à terrasser la créature avant le crépuscule pour qu'elle puisse commencer la fouille des lieux. Mais elle en espérait beaucoup. Déjà parvenir à déloger la créature dans la journée serait un exploit en soit. Il fallait donc réussir à convaincre les vieux de lâcher une de leurs bêtes puis la ramener vers la tanière en espérant avoir le temps d'installer le piège avant l'arrivée de la créature.

Il fallait qu'elle parle de son don à la chasseuse, certes elle n'avait aucune intention de combattre, mais elle pouvait être un soutien en cas de besoin et mieux vallait prévenir la chasseuse maintenant de sa capacité plutôt que de la surprendre avec.

- Au sujet du piège et du combat. Je n'interviendrais pas, mais je peux vous aider à générer une nappe de brouillard autour de vous pour que la Baan'shi ne vous voit pas arriver sur elle.

Songeuse, Neva regarda Juliette prendre la direction indiquée par Proot -merci seigneur, il avait un meilleur sens de l'orientation qu'elle, sinon, elles étaient perdues-. Le regard porté vers l'horizon, Neva était prudente, se fiant à son ouïe pour l'avertir si quelque chose de dangereux approchait ou si elles-mêmes approchaient quelque chose de dangereux. Soufflant, elle finit par tourner son regard vers la commanditaire lorsqu'elle prit la parole. Hochant la tête, un léger sourire lui vint aux lèvres en entendant son idée. Pas bête, pas bête du tout même. Un grand sourire satisfait aux lèvres, Neva approuva vivement l'idée.

- En voilà que c'est une bonne idée, pour sûr. Nous séparer pourrait nous permettre d'être plus efficace sur le terrain, même si cela pourrait s'avérer dangereux si vous vous trouvez sur le chemin du Baan'Shi. Êtes-vous certaines que vous ne risquez rien à le faire ? Concernant le bétail, j'avoue que j'ai eu cette idée sur le tas en vous parlant de la bête, donc non, pas de bétail caché quelque part attendant sa dernière heure. Par contre, j'ai bien quelque chose pour fabriquer un piège, en espérant néanmoins qu'il fonctionne.

Elle ajouta, dans un murmure -après tout, il n'avait pas fonctionné sur le Yondo Taran, qu'est-ce qui me dit que cette fois, il marchera ?-. Grognant, elle reprit la parole, la voix plus déterminée encore.

- D'accord, allez-y, pour ma part je vais tout mettre en place pour votre arrivée avec le bétail. Savez-vous comment vous allez l'emmener vers moi ?

Soufflant, elle fouilla dans son sac, repérant ce dont elle aurait besoin pour mettre le piège en place. Bien, normalement, tout s'y trouvait. Il ne lui manquait qu'un tout petit ingrédient et, de mémoire, là où elles se rendaient il y en avait. Hochant la tête, elle tourna celle-ci vers Juliette, le regard interrogatif. Puis, un léger sourire ironique lui vint au coin des lèvres en l'entendant dire la suite. Ainsi, elle ne combattrait pas. Après tout, pourquoi pas ! Elle s'en était bien tirée contre le Yondo Taran, alors c'est pas un petit Baan'Shi qui allait venir à bout d'elle.

- Si vous pouvez faire ça, vous me faciliteriez grandement la vie, miss Célian. Pouvoir avoir l'effet de surprise est ce qui pourrait me permettre de battre rapidement la Baan'Shi.

Alors que la nuit passait, Neva repérait chaque détail des environs que son oeil pouvait capter. Tout pouvait lui être utile, même juste savoir qu'une rivière coupait la route un peu plus au sud de la grotte. Cela ne ferait que la ralentir et elle devrait donc chercher un autre passage. C'est pourquoi elle était aussi attentive aux moindres choses. Évidemment, tout installer avant l'arrivée de la créature relevait du miracle, mais ne dit-on pas que seul les cons n'essaient rien ? Alors qu'elle observait les environs, sa compagne prit alors la parole, faisant tourner la tête de Neva dans sa direction.

Un sourire aux lèvres, elle acquiesça plusieurs fois de la tête avec ferveur à sa dernière phrase. Après tout, ne dit-on pas que l'effet de surprise peut vous faire gagner un combat perdu d'avance ?

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