Nager commence à me manquer, tout comme notre flore. Ce champ de rheina coloor ravissant, donnant le sourire plus facilement à des jeunes femelles qu'à des mâles, mais qui passe inaperçu par les habitués. La dangerosité de la min dil aqua des Pics de Terca. J'en avais vu plus jeune, mais mon précepteur m'avait appris de ne jamais ôter un pétale. De ne pas faire la course avec un oiseau des mers, ou l'approcher le temps d'une caresse est un petit peu nostalgique. Rien de méchant. Une infime dose. Voici que la faim me rappelle qu'il est de la satisfaire.
Je m'arrête devant l'étal d'un héléo qui vend des algues et du poisson. Je ne pense pas que les humains ne viennent souvent le voir. A part peut-être pour quelques poissons. Heureusement que ces derniers arrivés sur la terre ferme ne connaissent pas certaines propriétés de nos poissons, car nous serions vite envahis de filets de pêche, blessés par leurs armes voir même tués.
Bonjour Dame. Souhaitez-vous quelque chose de particulier ? Ou ce que nous mangeons habituellement. Ce sera deux algues de glace et trois petits poissons je vous prie. Mais dites-moi, je ne suis pas habituée. Puis-je manger comme d'habitude même sous forme humaine ?Il y a très très peu d'héléos qui sortent pour la première fois hors des eaux. Vous ne pouvez être que l'une d'eux. Dame... Talelviën si je ne me trompe pas. Vous venez de rater votre père, il est parti vers l'est, sans votre mère.Oui c'est bien moi. Je vois que mon père malgré notre différend ne peut s'empêcher de parler de moi. réponds-je déçue.
Que vous dois-je ?Oh mais rien Dame Chevalier. Votre père a été bon pour moi. J'espérais rendre la pareille un jour.Je saurai vous remercier avec honneur un jour. termine-je par un hochement de tête.
Malheureusement, je ne sais toujours pas si je peux manger mes repas d'héléo sous forme humaine. Moi qui m'habitue aux fruits des humains. Heureusement, que le "poissonnier" m'a mis mes achats dans une chose en plastique.
***
Quel chevalier épouvantable je fais. J'ai l'impression d'être descendue au rang d'écuyer. Mais ici je reste une simple humaine en promenade. Voici enfin le bord de plage. Bientôt de retour parmi les miens. Ce n'est que lorsque j'enlève mes ballerines pour marcher pieds nus que je me rends compte que je ne suis pas seule sur la plage.
Vu la physiologie de l'être sur la plage il s'agit d'un homme aux cheveux d'un noir brillant. Mais ce que je vois ne me plais pas du tout. Une épée plongée dans le sable sans demi mesure. Ainsi donc il s'agit d'un chevalier qui n'est pas des nôtres. D'où vient-il pour manquer de soins ? Je croyais que l'on voyait l'âme d'un chevalier par ses armes. C'est plus fort que moi. Mon sang de chevalier ne fait qu'un tour.
Bonjour Messire. Quel Chevalier êtes-vous pour oser planter une lame dans le sable ? dis-je m'approchant sans gêne de l'arme blanche.
Je secoue négativement la tête. Sans gêne, et surtout parce que cela me fait mal, j'empoigne l'épée pour la soulever. Mais qu'elle est lourde ! Elle pèse combien ? Cette arme, je suis sûre pourtant que je pourrais la manipuler. A moins que ce soit à cause de l'apesanteur. Tant et si bien que je rabats l'arme d'un coup. Je réessaie. Sans aucune hésitation, faisant fi de mon interlocuteur, je plonge la lame dans la mer, prenant garde de ne pas me mouiller. Puis, je reviens face à ce jeune homme. Oh ! lui aussi a les yeux bleus. Décidément, beaucoup d'humains ont aussi cette couleur. Est-ce normal ?
Bref. Sans le quitter du regard, je fais un effort pour éviter que la lame touche le sable en m'asseyant en tailleur, posant la lame sur ma robe. Finalement, je mangerais plus tard. Il suffirait que je sacrifie un poisson blanc aux rayures violettes et une algue bleue. Cela suffira bien. Sans rien dire, je prends un poisson puis le passe sur le fil de l'arme puis tout le long. L’oléine de ce poisson est un très bon filtre protecteur naturel. Pour terminer, pour éponger un peu le gras, je me sers de l'algue bleue qui éliminera les derniers grains de sable.
Veuillez jeter cela à la mer en offrande à la Déesse Eliosa, je vous prie. ne puis-je m'empêcher de demander en tendant le poisson puis l'algue.
Lorsque cet inconnu revient, je me dois de me présenter avant qu'il ne pose trop de questions.
Chevalier Talelviën Phaëlaë. A votre service. dis-je en lui tendant tant bien que mal.
L'épée est encore lourde, va me falloir quelques temps pour m'habituer. Je me lève tout en laissant le sac plastique au sol. D'ordinaire je fais une révérence, mais là, je lui tends mon avant-bras pour le saluer comme il se doit selon son rang.