J'avais initialement prévu de faire un arrêt au lac, histoire de trouver des algues qui pourraient me servir à concocter des potions. Le problème, c'est que je n'avais pas d'équipement pour le faire à mon arrivée, faute d'avoir oublié d'aller le chercher en ville. J'ai la flemme d'y retourner pour ça... Bon. Tant qu'à faire, autant se reposer un peu et profiter de la vue, non ?

Je sortis mon flacon d'hydromel, et me mis à en boire quelques gorgées, avant de m'allonger sous un arbre, la vue sur le lac. C'était magnifique, d'autant plus que personne ne venait à ma cachette favorie, contrairement à la première fois où j'y étais allé... Trop de touristes tuent l'ambiance sauvage.

En m'allongeant, je constatai qu'il me restait de vieux fils qui avaient servi à mon arc, mais qui sont inutilisables pour viser correctement. Mais j'avais pas de hameçon... Bon tant pis, je vais prendre un bout de bois  pour l'hameçon et une branche pour faire office de canne.

A cet instant, j'allai minutieusement chercher ces deux éléments précieux afin de pouvoir la fabriquer, mais c'était sans compter sur le fait que le seul appât que j'avais consistait en un flacon contenant des insectes morts enfermés à l'intérieur.

Par conséquent, le hameçon devait être un peu plus sophistiqué afin de pouvoir répondre à ce critère, et ne pas être juste une brindille, même si ça aurait pu faire l'affaire....

Elle s'étire, sourit et mire autour d'elle d'un œil satisfait. Les gardes que le capitaine a mis à sa disposition ne la rattraperont pas avant bien des heures, elle a donc le temps de s'entrainer et le décor lui plait terriblement.
Le ciel a la même couleur que l'eau qui lèche l'herbe : un bleu pur et pâle, à peine troublé par quelques nuages. L'odeur de la nature et ses bruits sont différents, là, de ceux dans les montagnes. Plus doux, plus sereins. Peut-être pourrait-elle dormir à la belle étoile ici ? Non. Elle doit rentrer avant la nuit, hélas.

Ses mains viennent se saisir du licol du cheval qu'elle a emprunté et l'attachent à un arbre, déjà avides de sentir la dague rouler sur leur paume.
Clara Ana Arnstven est heureuse. On est souvent stupide quand on est encore enfant et la juvénile demoiselle n'échappe pas à la règle : elle ne songe pas aux conséquences de ses actes.
Elle est là, seule, loin de Ferèsis, sans escorte et ses talents de guerrière sont loin d'être excellents. Mais elle est jeune et le monde est pour elle son terrain de jeu.

Une mèche de cheveux s'échappe de la queue qu'elle s'était faite à la va-vite dans les rues de Ferèsis. Elle la repousse derrière son oreille d'un geste distrait, les yeux rieurs.
Son plan cette fois-ci a été particulièrement bon. Elle n'est pas sûre qu'il refonctionne, mais qu'importe ? Il lui suffit de penser à la tête de ses ainés pour pouffer intérieurement. Ils n'avaient pas songé au fait qu'elle se montrerait sage et accepterait une escorte pour se balader dans la cité. Moins encore qu'elle donnerait une pièce à un mendiant. Puis toute une bourse, sous le couvert de la charité, avec la demande chuchotée de lui louer un cheval et de la retrouver aux portes de la cité.
Bon... Elle n'avait pas été sûre non plus que le gosse obéisse, mais il l'avait fait. Cela avait été un jeu de moujingue de perdre ses gardiens dans les ruelles avant de rejoindre la pouliche vivace pour fuir vers la liberté.

Une dernière caresse à sa monture du jour et la demoiselle s'avance vers le lac à petits pas. Elle inspire, expire grandement. Ferme les yeux un moment pour profiter de la caresse du soleil. Elle se sent bien. Détendue.
Peut-être pourrait-elle piquer une tête dans le lac, aussi ? Non. Après ses exercices seulement, se réprimande-t-elle tandis que ses doigts commencent déjà à déboutonner sa chemise. Les fourrés qui la séparent de l'eau vive ne sont plus très nombreux. Mais un bruit sur un coté la fait s'arrêter, ses ongles jouant toujours avec un bouton.

Elle tourne la tête, se tend. C'est sans doute un animal. Zut. Son regard cherche la source du bruit et la trouve. Sa main droite file à la rencontre de sa dague. L'enfant se mord la lèvre, retient son souffle en dévorant du regard l'inconnu. Fouillant aux alentours, il lui tourne le dos. Est-ce lui qui siffle, ou un oiseau ?

La demoiselle dénonce sans doute sa présence quand, lorsqu'il se retourne, elle fait un petit bond en arrière et effleure quelques feuilles.

Les oiseaux chantaient durant ma fameuse recherche d'hameçon, mais j'entendis un bruit de feuilles. A cet instant, je me demandais si c'était un animal qui m'épiait ou si quelqu'un m'observait. Je me retournai, mais quand je vis la jeune fille avec sa dague, une aura sombre se mit à m'envahir de façon subite. Qu'est-ce qu'elle faisait là, et pourquoi avait-elle sa main sur sa dague? Je détestais qu'on m'espionne ou qu'on m'épie, c'est l'une des choses qui me font péter les plombs. J'avais encore ma fronde et quelques pierres... profitons-en pour voir si c'était un adversaire ou pas.

Je reculai à bonne distance et dégainai la fronde, prêt à tirer. Je devais voir sa réaction, en espérant que je n'aie pas à me battre, surtout que j'ai la flemme aujourd'hui vu le temps et l'ambiance qu'il y a au lac...

Allait-elle m'attaquer, ou juste se présenter ? C'était une question à laquelle je devais répondre, et au plus vite. Son visage m'est cependant familier... L'avais-je vu sur un tableau ou avait-elle des airs de ressemblance avec... Non. Je dois rêver. Si c'est le cas je ferais mieux de ne pas dégainer. Mais j'ai besoin d'une confirmation. Ceci dit, elle a une dague de haute qualité, la petite.

Il l'a vue. La honte s'incruste sur les traits juvéniles. Il lui faudra bosser sur sa discrétion un de ces jours, mais ce n'est pas le moment. L'homme se met en position pour l'attaquer de loin, il faut qu'elle se décide. Fuir ou lui sauter dessus ? Mais quel est ce truc qu'il tient ? La peur s'insinue, excite l'enfant. La fuite n'est clairement pas la solution qu'elle compte choisir. Mais engager le combat... Il ne parait pas vouloir le faire, lui.

La jeune fille tendue penche légèrement la tête sur le coté, intriguée par l'arme et celui qui la possède. La tension dans ses épaules se défait, lentement, tandis qu'elle étudie son adversaire. Une fronde ? La surprise ramène sur ses joues un début de sourire amusé et l'adolescente sort des feuillages avec lenteur pour s'approcher de l'homme.

La dague toujours dans sa paume est tournée vers le sol, même quand elle lève son bras pour montrer qu'elle ne veut pas de sang aujourd'hui. Elle incline la tête, regarde ce qu'il a d'autre à portée, prête à tenter d'esquiver tout ce qu'il pourrait lui lancer.

Elle est venue pour s'entrainer, non pour blesser un inconnu et pas davantage pour finir en morceaux elle si son nouvel interlocuteur a un temps soit peu de connaissances en art du combat. Vu sa trogne, sa manière de se tenir et son air peu avenant, c'est sans doute le cas. Même si il ne ressemble pas vraiment aux soldats sous les ordres de papa et que son arme d'après elle serait mieux dans les mains d'un enfant des rues.

Elle hésite. Avoir un compagnon pour danser avec sa lame ne lui déplairait pas. Accepterait-il ? Irait-il contre les désirs de ses ainés ? Vient-il seulement de Ferèsis ? Elle ne se souvient pas l'avoir déjà vu et espère que non. Nourrice ne ferait sans doute qu'une bouchée de lui si elle venait à être au courant des pensées de sa protégée. L'idée de voir la vieille femme gueuler élargit son sourire, tout autant que celle d'un possible combat amical, plus tard.

Elle reste là, à quelques distances de Mada, à découvert. Le regard fixé dans celui de l'inconnu, elle ne fait plus un geste. Sa respiration s'entend à peine.
Prête finalement à décamper au moindre geste offensif, elle ne dit pas un mot, ne se présente pas. Mais il est facile de deviner les questions qui lui viennent  : qui est-il ? Et surtout, que fait-il là ?

Mon aura s'apaisa lorsque je vis la jeune fille s'avancer. Mais effectivement elle me disait quelque chose, je pense avoir vu ce visage à l'Académie... Mais je ne peux pas mettre de nom à ce visage, c'est trop bizarre. Je ne sais pas si je l'avais vu quand Papa était toujours vivant... Je crois que oui. Mais son visage me dit quelque chose c'est obligé. Et ça doit être quelqu'un d'important, sinon je n'aurais pas eu cette impression de déjà vu.

Je rangeai ma fronde, et d'un ton calme:

"Oh, excuse moi de t'avoir fait peur. Je déteste lorsqu'on m'épie, ça me met dans un état de furie. En plus, j'étais concentré et je cherchais du bois pour faire une canne à pêche artisanale...."

A ces mots, je me mis à rire tellement c'était embarrassant... Déjà que je suis étourdi, si en plus je me prends pour un bricoleur ça va pas le faire! Je m'approchai ensuite de la jeune fille avec un sourire chaleureux, mais plus je m'approchai, plus cette impression de déjà vu s'amplifiait, à tel point que j'en eus une migraine. C'est la première fois que ça m'arrive... Est-ce que c'est une partie de l'héritage de Papa qui se met en activité ?

Je lui tendis quand même une gourde remplie d'eau, malgré mon état. C'est pas normal que je me retrouve dans cet état... J'espère pouvoir le comprendre.

"Je m'appelle Mada Norrigam, l'incarnation de l'ivresse. Veux-tu de cette eau? Ca pourrait te rafraîchir vu le temps qu'il fait! Et toi, comment t'appelles-tu ?"

A ce moment là, mon coeur battait la chamade, parce que j'avais à la fois besoin de confirmer le doute, mais cette migraine prenait de l'ampleur.

Elle hésite, dévisage encore l'inconnu nommé Mada. Il ne parait vraiment pas la connaitre et c'est là une joie pour la jeune fille : il ne la protégera pas ; il ne lui hurlera pas dessus pour qu'elle rentre.
Il reprend une position moins offensive, s'approche. Elle ne bouge pas, ne dit rien tandis qu'il s'exprime.
Mais vu qu'il apparait à présent inoffensif quoi qu'un peu fou, la demoiselle range sa dague, le temps de décider sous quel nom elle va se présenter. Ses épaules finissent de s'affaisser de joie : sa fugue ne finit pas là maintenant. Son attention se relâche un petit peu.
La gourde d'eau est refusée d'un signe de tête et finalement, c'est la vérité qui sort de sa bouche.


"Je suis Clara."

Pas de nom. Le sourire disparait. Elle fixe l'étranger, recule d'un pas. Ses mains viennent se fourrer dans ses poches. Elle enchaine :

" Ça veut dire quoi, incarnation de l'ivresse ? "

Les propos l'ont intriguée, au point qu'elle ne retient pas sa question. Elle lève des doigts vides, se masse le cou et hausse les épaules.
Le geste habituel lui fait visiblement du bien et elle reprend, plus doucement :

" J'voulais pas embêter. Je fais que passer. "

C'est un demi-mensonge. Mais qu'a-t-il besoin de savoir qu'elle a fui une énième fois la cage dorée que sont ses appartements ? Ou qu'elle y retournera bientôt ? Son regard se porte vers là où se trouvait la fronde avant. L'homme n'a pas l'air bien net, mais ne semble pas méchant de près. Pourtant, elle hésite à lui demander si il sait vraiment la manier.

" Mais t'as vraiment des trucs à pécher dans l'eau là ? "

Demande-t-elle finalement encore en désignant le lac, une main toujours cachée.

Elle me dévisageait, mais d'un côté, tant mieux. Elle ne me connaît pas. C'est rassurant. Par contre, si elle refuse cette eau, j'vais la boire, en espérant que ça me soulage.

Je me mis donc à m'asseoir et à boire tel un assoiffé l'eau contenue dans ma gourde. Pendant ce temps, je réfléchissais. Clara.... ça ne me dit rien de spécial. Mais ce visage me dit quelque chose, j'en suis sûr! Tant pis, si je continue je risque de péter les plombs. Mais pourquoi j'ai ces impressions de déjà vu ? C'est très bizarre ça.

Après avoir bu comme un sauvage, je me sentais mieux, presque ivre de bonheur après avoir bu de l'eau. Je regardai Clara, et déclarai:

"A ma naissance, mon père était enivré de bonheur, et du coup il m'a appellé Mada, qui signifie "Ivresse". Pourquoi en suis-je l'incarnation ? Car j'enivre ce qui m'entoure. Parfois ce sont des gens, parfois des animaux... Cela aurait été drôle si je pouvais enivrer une plante en l'arrosant tiens."

Je me mis à rire bêtement, surtout que je devais passer pour un fou auprès d'elle. Tant pis!
En revanche, je constatai qu'elle fixait ma fronde, et je pouvais imaginer les questions qu'elle pouvait se poser, ce qui est totalement compréhensible. Du coup, je me mis à lui faire une démonstration. Mon aura devint apaisante, à tel point que je me mis pendant un court instant dans un état de plénitude. Ma Vérité allait être dévoilée, mais ayant plusieurs cordes à mon arc, je ne m'en inquiétais guère.

"Veux-tu voir ce qui est possible de réaliser avec cette fronde? Je vais t'en faire une démonstration. Accroche toi, ça va secouer."

Je reculai d'un pas, armé de ma fronde, et visai un arbre à proximité de Clara afin d'avoir des rotations horizontales.

"Bouncing... SHOT!"

Au second mot, je tirai avec ma fronde. Le projectile se mit à rebondir sur l'arbre, mais prit des trajectoires formant des tours autour de moi. Je relançai plusieurs projectiles de la même façon, mais en dégainant à intervalles très courts, à la limite du discernable par l’œil nu, afin de pouvoir générer une mini-tornade permettant de me couvrir.

"Qu'en penses-tu, Clara?"

Au bout de quelques minutes, les projectiles étaient dispersés à proximité. Je les récupérai et lui indiquai:

"Il y a des poissons dans le lac que j'aimerais bien pêcher, mais j'aurai besoin de ton aide pour que je puisse fabriquer une canne à pêche. Pourrais-tu m'aider s'il te plaît?"

Ca tombait bien finalement, peut-être que je pourrai enfin faire cette séance de pêche tant attendue!

Les explications offertes ne convainquent pas Clara et le tour de passe-passe qu'il crée avec ses projectiles la remet en alerte, brutalement.
Elle tente de suivre du regard chaque caillou, mais rapidement se rend compte que c'est impossible. Tourner sur elle-même lui donne le tournis et sa main revient se poser sur sa dague, instinctivement, tandis qu'elle se demande si c'est elle qui voit trouble ou le sol qui bouge.

Le coup d’œil qu'elle lance à Mada est peu amène quand les pierres tombent enfin.
Le silence s'installe après ses propos et elle ne le rompt pas tout de suite. La jeune fille considère l'homme d'un air méfiant.

Un fou. Cet étranger est un fou. Elle en est sûre à présent. Et les gens sans raison sont dangereux, ne vient-il pas de le prouver ? Sa paume caresse la garde de sa lame.
Légèrement courbée en avant sans doute à cause du tournis, elle finit par se redresser. Relâche son arme. Se tait encore. Son regard se fait de moins en moins flou, sa respiration qui s'était accélérée s'apaise à nouveau.
C'est bien sa veine, elle qui était à la recherche de la tranquillité est tombée sur un étrange guerrier. Si il n'est pas assez sain d'esprit pour être un partenaire efficace, il semble malgré tout doué avec son arme à lui. Qu'avait-il demandé encore ? Ah oui, ce qu'elle en pensait. Et qu'elle l'aide à... Quoi ? Faire sa fichue canne à pêche ?

Elle tousse, lui lance un regard torve. Peut-être parce qu'elle est un peu folle aussi, l'enfant se décide à parler. Plutôt qu'un adversaire... Pourquoi ne pas lui demander de jouer au professeur ? Après tout, le dernier d'étiquette n'était pas franchement sain d'esprit non plus.

" Si je t'aide, tu m'apprends à m'servir de ça ? "

Un doigt est pointé vers la fronde. Elle ajoute une précision nécessaire, sans doute, à ses yeux.

" Sans me tuer. "

Pendant que j'utilisais mon Bouncing Shot, j'observais les réactions de Clara. Ses réactions étaient assez bizarres, et m'étaient familières... Je ne sais pas pourquoi mais quelque chose m'empêche de m'en souvenir. Je le sens. C'est pas normal. Ses gestes sont aussi familiers. Mais j'arrive pas à m'en souvenir... Ceci amène un mélange de frustration et une migraine sans précédent, après qu'elle m'ait parlé.

Hm... Elle veut se servir de ma fronde... C'est sûr qu'à première vue, on dirait une arme de gosse, mais c'est vrai que je l'avais fabriqué quand j'étais petit... Quand il était là. A cet instant, je fus envahi par la tristesse en repensant à mon père. Mon faciès était devenu terne, mon regard vide... Et en regardant Clara tout en y pensant, j'avais encore cette migraine, mais qui semble s'atténuer au fil du temps. Je vais quand même lui en parler, peut-être qu'elle a des informations à ce sujet...

"S'il te plaît, ça serait vraiment gentil de ta part. Et promis je ne te veux aucun mal. C'est la première fois que j'ai une migraine lorsque je rencontre quelqu'un, et je ne pense pas que ce soit anodin. Ceci dit tu me dis quelque chose, mais je n'arrive pas à m'en rappeler. A croire que ma mémoire m'empêche de me dire qui tu es. Dans tous les cas je ne pense pas qu'on se soit vus, sinon je m'en suis rappelé. C'est comme une impression de déjà vu, tu vois?"

A ce moment là, je m'assis, et je fermai les yeux.

"Je suis désolé de ce désagrément, Clara. J'espère que tu ne m'en voudras pas. Je vais assembler la canne à pêche, en espérant que tu aies un hameçon qui soit métallique si tu en as un sur toi, sinon quelque chose en bois qui jouerait le même rôle." en montrant ma fronde: Si tu veux, après, je t'apprendrai à t'en servir."

Je n'étais pas vraiment en état de faire cette recherche, vu qu'en la regardant j'avais ces migraines. Et ca, c'est très embêtant. Elle est jolie pourtant.

Elle tente de vérifier si il n'a pas trop bu, fixe son regard, mais ne s'approche pas pour sentir son haleine. L'abus de boissons interdites à son âge à elle pourrait expliquer bien des choses, dont cette migraine dont il parle. Non qu'elle soit vraiment au courant des effets secondaires de l'alcool, bien entendu. Elle n'a jamais gouté à tout cela. Ou presque. Du moins d'après Nourrice. Mais les soldats, eux, ne se gênent pas quand ils sont en permission, aussi sait-elle reconnaitre un homme trop ivre si elle se concentre bien.
Dans tous les cas, cela n'a pas l'air d'être son cas : il ne pue à cette distance le vin peu cher ou l'alcool de bas étage. Son regard n'est pas totalement hagard. Zut. Le dénommé Mada vient donc finalement peut-être bien de Fèresis.

Elle fait quelques pas en arrière, le considère encore, méfiante. Et si il se jouait d'elle, bien décidé à lui faire peur pour qu'elle retourne dans les jupes de son père ? Non. Il a l'air trop... Trop fou.
Elle finit par hausser les épaules, puis s'écarte encore pour fouiller les buissons, peu décidée à éclairer sa lanterne. Rien de tout cela n'est important : il lui a promis de l'entrainer. Un Arvèles ne revient jamais sur sa parole quand il est question d'arme ou de cheval, n'est-ce pas ? Enfin si le gars est bien un Arvèles. Peu rassurée quand au fait de lui tourner totalement le dos, elle lui jette de fréquents coups d’œil.

" Tu comptes attraper quoi avec un appât en bois ? Des rêves ? "

La demoiselle ne se rend compte qu'avec retard qu'elle a peut être parlé de manière un peu trop agressive, mais ne s'excuse pas. Son petit sourire moqueur, apparu durant ses dires, disparait cependant.
Pour se faire pardonner ou parce qu'elle n'a rien sur elle en métal, elle entreprend de chercher avec davantage d'application un petit morceau de bois. La jeune fille finit par en trouver un qui ne correspond surement pas et le lance vers Mada avant d’essayer d'en trouver un autre.

Si l'homme vient de Fèresis et retrouve toute sa tête soudainement, il risque de lui passer un savon pour avoir déguerpi si loin de la ville. L'idée l'enchante peu, surtout tant qu'il ne lui a pas appris à se servir d'une fronde. Elle tente donc de se faire oublier de l'incarnation de l'ivresse pour qu'il évite de se souvenir de faits qui pourraient lui nuire en mettant tout son temps pour trouver un potentiel hameçon.
Malheureusement sa curiosité en décide autrement et, au bout d'un moment la gosse reprend.

" J'te connais pas. Ça j'suis sûre. Mais t'es quoi exactement ? T'es un aventurier ? Tu sais manier d'autres trucs à part ta fronde ? Tu viens de loin ? C'est pour ça que tu veux pécher ?"