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Madelle | Forum RPG Heroic Fantasy
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Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]

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Clara Arnstven

Clara Arnstven

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Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Left_bar_bleue1/9Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Empty_bar_bleue  (1/9)
Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeDim 20 Oct 2013 - 0:35

Laissant sa nuque reposer sur la bordure de la bassine et ses mains caresser la surface de l’eau, Clara écoutait parler l’homme avec un petit sourire comblé. La chambre s’était réchauffée, se mêlant d’odeurs de bois, de sève et de cire, offrant un réconfort subtil et une protection illusoire.

« Aimer la littérature n’implique pas la connaissance des plus grands, je pense. Il y aura toujours une personne ignorée ou méconnue… Incomprise. Et les ouvrages sont un met rare, Clara… A moins d‘avoir la même patrie, les probabilités que nous connaissions les mêmes auteurs sont bien minces. »

Son prénom dans la bouche de cet inconnu partiel lui fit un drôle d'effet, agréable cependant. La jeune femme haussa doucement les épaules, peut-être avait-il raison. Connaître ses classiques était néanmoins primordial, selon ses Maîtres de Lettres qui s’étaient succédé. Mais qu’était un classique d’un bout à l’autre de Madelle. Certainement pas le même pour les contrées du Sud que pour celles du Nord. Et Clara en convenait sur un point : Les ouvrages n’étaient accessibles qu’à une infime partie du peuple. Richard faisait donc partie de ce modique groupe de privilégiés. D’où, cependant, et cette question brûlait les lèvres de notre Arvèle comme une piqure de guêpe. Ne pas savoir serait à leurs avantages à tous les deux, elle le savait, car ce qui est impénétrable est séduisant.

La jeune femme se cala plus profondément dans la cuve chaude, laissant sa tête y tremper et l’eau couvrir ses oreilles. Ses paupières lourdes se fermèrent de nouveau et elle sombra dans une isolation apaisante et quasi-complète, ne percevant que les bruits de son propre corps et le battement cadencé de son cœur. On se déplaçait dans la chambre, Clara en sentait les vibrations. La servante était à la porte avec le vin, voilà l’idée qui lui effleura l'esprit. Mais réfléchir était une tâche ingrate dans un confort aussi bon. Un bruit sourd et lointain lui parvint, puis d’autres vibrations plus insistantes. Avait-on échappé la bouteille ? Lorsque ses yeux s’ouvrirent, ils rencontrèrent ceux, sombres, d’un individu penché sur elle.

Une clameur quelque part, son nom. On l’extirpa brutalement de son cocon et une main vint s’abattre sur sa bouche, exerçant une pression si forte que sa mâchoire donna l’impression de se broyer. L’air froid s’enroula vicieusement autour de son corps nu, l’obligeant à retomber dans une réalité chimérique. Pas une seule seconde pour penser, on placardait déjà son dos contre le sol glacé. La paire d’yeux marrons ne la quittait pas, détachée et inexpressive. Une masse se couchait sur elle, chaude, et la gorge de Clara se fendit d’un hurlement ne trouvant pas sa sortie. Son esprit chamboulé réalisait à peine l’immonde évidence que se dessinait au-dessus d’elle, alors son corps secoué se cambra, se débattit avec la force surhumaine du désespoir. Les deux hommes devait être plus désespérés qu’elle, car ses efforts restèrent vainc. Un étau douloureux écarta ses jambes et la violence éclata dans son ventre. Non, se répétait-elle. Non, non, mais les deux hommes devait se répéter oui avec plus de conviction... Et tout cela dans un silence lourd, nul mot n’aurait su empirer d’avantage cet instant. Elle n'avait rien vu venir, pourtant il était là, horrible, se déroulant avec autant de certitude qu'elle en avait de vouloir se substituer.

Elle eut l’impression que son âme se fendait en deux, que ses os se liquéfièrent. Non, se répéta-t-elle encore et encore, déchirée. Alors une rumeur naquit quelque part dans sa cage thoracique, enfla, grossit, s’alimentant de toutes émotions intenses qu’elle trouvait sur son passage. La grogne implosa brutalement. L’homme se retira en criant douloureusement et aux travers du flot de larmes noyant son visage, Clara le vit se tordre sur le sol, trembler de tous ses membres et rendre ses tripes sur les lattes. Il convulsa dans sa propre vomissure puis s’effondra. Silence. Non, non… Dans les tempes de la jeune femme roulait un tambour ahurissant. Puisant dans un recoin brisé de son être une force soudaine, elle se dégagea et se jeta sur sa dague. Ses doigts se refermèrent sur la garde avec une telle raideur que ce mouvement fut douloureux.

L’ennemi n’avait battu un cil que déjà, ses yeux s'exorbitaient sous la morsure de l'acier. Clara sentit la lame fendre la peau, la chaire, les tissus, et tout cet amalgame de textures dans un grésillement bien perceptible. Lorsqu’elle la retira, le fer était rougeoyant, mais le sang n’en était pas le seul responsable. S’en était assez, mais son bras répéta le même mouvement sans pouvoir s’arrêter. Encore et encore, elle poignarda le monstre, chaque coup expulsant une rage animal. Lorsque cette fureur se stabilisa enfin, une odeur écœurante et métallique la recouvrait et l’arme blanche glissa de ses mains carmin. Les yeux la regardait toujours, vide cette fois. Combien de temps passa, une éternité il lui sembla, prostrée. Sur le sol, la lame d’acier redevint froide et rigide.

- Richard…

Un appel, à peine audible, resté sans réponse. Le silence, insoutenable, allait la rendre folle. La pièce semblait soudain trop vaste pour quelqu’un se sentant si petit, pour quelqu’un qui n’avait qu’une envie, celle de se fondre sous le parquet et de disparaître à tout jamais. Elle répéta son nom, à peine plus fort, d’une voix chevrotante. La minute d’après, elle était accroupie ses côtés sans avoir le souvenir de s’être déplacé. Elle agrippa, de façon presque désespéré, les épaules du blond comme si ce contact la ramènerait à la réalité, une réalité différente de celle-ci, elle le souhaitait ardemment. Dans l’âtre, le feu mourant que personne n’avait alimenté crachotait ses derniers vestiges. La porte s’ouvrit.

- J’ai votre vin mad- …

Temps de suspension, puis la bouteille se fracassa au sol.



- - -



La servante se triturait les doigts, les lèvres pincées. Elle faisait penser à un petit oisillon apeuré qui n’ose tenter son premier vol.

- Mon patron a dit que vous devriez payer pour les dégâts et pour le Neustro aussi, déballa-t-elle à toute vitesse. Il vous laisse cette chambre jusqu’à ce que monsieur soit capable de se déplacer et fait dire que vous devrez aussi la payer…

Clara ne lui accorda pas même un regard, ses yeux rougis par les pleurs et la fatigue fixé sur le corps assoupi de Richard. La servante en était à se contorsionner les poignets et les chevilles, cherchant quoi ajouter au lieu de tout simplement quitter cette pièce.

- M-mais vous savez, s’il meurt ce soir, ça vous fera moins à payer, essaya-t-elle maladroitement

La fille du Général tourna lentement la tête en direction de l’autre femme. Elle ressemblait à un démon avec ses traits tirés et ses poches violettes rehaussant la pâleur de ses iris argentés. La servante glapit en éructant des excuses incompréhensibles puis quitta précipitamment avant d’être la prochaine à rendre l’âme sous le toit de l’auberge. Le Neustro, une demi-portion d’homme juché sur une paire de jambes trapu, s’approcha du lit et observa le patient avec son air de crapaud chauve. Il avait nettoyé et pansé toute les plaies, recousues les plus grosses, mais une envie irrépressible semblait lui trotter dans le crâne depuis plus d'une heure.

- Un mal le ronge, croassa-t-il, les mauvais sentiments. Il n’y a plus qu’une solution, il faut le saigner.

Clara regarda d’un œil las le docteur s’afférant dans son coffre d’outils. Il revint avec une courte lame et un bol qu’il déposa avec empressement sur la table.

- Non, fit rauquement la jeune femme
- Mais si, votre ami en a grand besoin, ne voyez-vous pas Uraang qui attend derrière cette fenêtre, insista le Neustro en se saisissant du poignet de Richard
- Non, répéta Clara dans un chuchotement, les yeux rivés sur le bout d’homme
- Allons, juste une petite incision ici…

La table et la chaise volèrent avec fracas. La fille du Général happa violemment l’avant-bras du Neustro et le tira vers l’avant pour que son visage d’amphibien soit bien collé au sien et qu’il capte ainsi le message on ne peut plus clairement.

- Faites-lui une entaille de plus et c’est moi qui vous saigne comme un porc ! cria-t-elle, hors d’elle, ses cheveux hirsutes et son visage crispé lui donnant encore plus l'air d'une démone prête à damné tout l'Univers

Le calme, enfin, lorsque le crapaud eut à son tour quitté la pièce sans demander son reste. Clara dû agripper le dossier de la chaise à deux mains pour réussir à s’y asseoir, ses jambes flageolantes menaçant de se dérober sous son poids pourtant si menu. Elle se massa les arcades sourcilières, puis se pinça l’arête du nez, cessant de respirer. Un trouble l’étranglait. Tout ceci semblait irréel. Mais la sensation douloureuse entre ses cuisses lui rappela le contraire. Elle se releva abruptement, s’appuya contre le mur, recommença à se sentir faible… Son corps balançait négligemment entre l’option de s’abandonner à des explosions de colère où à se vider de toute volonté. La jeune femme remit la table sur pied et ramassa le bouquin du blond. Se changer les idées. Elle se rassit lentement et feuilleta le carnet. Son compagnon avait une très jolie plume, mais Clara ne sut apprécier à leur juste valeur les écrits. Elle referma le livret et, contre toutes attentes, des larmes, encore des larmes, s’échappèrent de son corps qu’elle pensait complètement vidé. Elle se tint le visage, agitée de soubresauts.

- Vous aviez raison Richard, aimez la littérature n’implique pas la connaissance des plus grands... vous écrivez aussi bien que tous ces augustes.

Elle osa jeter un regard à la fenêtre mais le dieu de la mort n’y était pas. Le ciel rosissait et elle espéra, un court instant, l’apparition d’un Oiseau du bonheur près du battant. Alors qu’elle regardait d’un air absent le soleil se lever, elle se sentit étrangement désincarnée. Loin de tout, loin de Richard… loin d’elle-même.


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Richard Lëys

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Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeDim 20 Oct 2013 - 16:55

Un sourd battement irrégulier. Oscillant dans les graves.
L’obscurité avait établi son règne et lui, son esprit, hésitait. Sur le chemin à suivre… Sur la pensée à mener… De temps à autre, une rose lumière envahissait les lieux avant que des ténèbres que plus persistantes revenaient, encore et encore.
Etait-il ? Est-il ?
Puis un visage évanescent qui se dessinait parmi les volutes noires. Semblant lui esquisser un sourire. Moqueur ou tendre ? Sydilia de la fin ou du renouveau ?
Un souffle tiède.
Des voix naissantes, stridentes ou bien douces, implorantes ou bien affectueuses… Parmi elles, des rires enfantins. Mêlés aux râles de l’agonie.
Les fuir… Il voulait tant les fuir !
On l’appelait ! Il sentait sur ces lèvres s’esquisser son nom, mais qui était-il ? Entre profonde noirceur et immaculée blancheur, son âme hésitait jusqu’à se disperser…
Non, non, non…
Il était seul, seul, seul…
Il avait besoin de chaleur. Il en désirait. Mais non seulement lui. Lui aussi.
Le froid venait donner forme à son âme et sa douleur.
Puis le brûlait.

Fut-ce un cri ou un souvenir ? Quand bien même l’obscurité fut chassée un instant. Il sentait… de nouveau il avait regagné quelques perceptions… Il sentait une présence à ses cotés.
Lui ?
Presque naturellement il esquissa un sourire doux. Il était calme à présent. Un soleil tranquille dispensait sa chaude lumière et dispersait le froid au loin, dans les profondeurs de son cœur avec toutes ses ténèbres.
Qu’était-ce ? Le froid tentait-il de regagner son territoire perdu ? Car il sentait sur son… son visage la morsure tiède d’un corps. De l’eau ? Des gouttes venaient grêler son visage sur la mesure chaotique de gémissements. Il fronça imperceptiblement les sourcils. On pleurait ?
Enfin pourquoi s’en préoccuper alors qu’il se perdait…
Cependant, son esprit semblait vouloir s’acharner sur ses interrogations, pour en faire naitre de nouvelles. Etait-ce dans son habitude d’ainsi se torturer de questions futiles ?
Mais…
Rien n’assurait qu’elles fussent futiles. Au contraire. Et si elles pouvaient l’aider ? L’aider à se remémorer ?
Encore il s’interrogeait alors que l’inconscience s’emparait de nouveau de son esprit…


***

Un plafond d’une saleté presque familière.
Voilà ce à quoi il faisait face, les yeux largement ouverts. Les paupières étendues au possible, son regard dévorait ce qui se présentait à sa vue. Il était fatigué et pourtant, tout son corps s’arquait pour ne pas sombrer dans le sommeil si tentant. Il voulait… savoir.
Reprenant conscience de l’existence de ses membres, sa première volonté fut de se relever, néanmoins il était trop faible. Un puissant sentiment d’agacement vint brûler tous les restes de sa confusion. Il était un général, Récleyés qui plus est, par Sydilia ! Ce ne serait pas un foutu coup de couteau qui viendrait à bout de lui, qui avait survécu à la faim, la perte, l’absence et la torture ! Damnation !

Son ire si subitement enflammée s’apaisa aussi promptement qu’elle naquit. Il n’était pas homme à céder aisément à la colère après tout. Soupirant, Richard se restreignit donc au mouvement facial : il examina les lieux brièvement avant de tourner la tête vers une ombre à sa droite. Une silhouette seulement éclairée par une bougie non loin semblait veiller sur lui, pleine de quiétude et d’attentions.

« Clara ? » souffla-t-il douloureusement car la gorge sèche.

Malgré ses beaux dires, Richard était actuellement très perturbé. Ne devait-elle pas être partie ? Que faisait-elle là ? Au moins ne semblait-elle pas mal en point... Vivante, c'était là le plus important n'est-ce pas ? Oh, ne me dites pas qu’elle le veillait depuis l’attaque de… de quand d’ailleurs ? Combien d’heures, de jours était-il allongé comme un mourant ? En remuant la tête, sa joue toucha le drap humide. Elle l’avait pleuré..? Bonté divine.
Crétin qu’il était ! Comment avait-il pu laisser la situation en arriver à ce point critique ?! Richard, espèce d’idiot fini ! Une trentaine d’années d’existence et pas plus de cervelle que cela..! Voilà que tu t’entiches d’une petite au point d’en oublier ta prudence, et que, comme si cela ne suffisait pas, elle s’attache aussi à un imbécile comme toi ! Un simple coup de dague en serait presque un châtiment trop clément… Bon sang.
Passablement mécontent de lui, sans pour autant céder au regret de cette rencontre, Richard s’attela à inspecter l’état de son corps : là où la lame s’était fichée, une pulsion douloureuse le gênait encore mais le reste de ses blessures étaient plutôt minimes, comparé à toutes celles qu’il avait reçues dans le passé. Enfin ce coup de couteau aurait sans doute pu perforer un poumon et casser quelques côtes s’il n’avait pas inconsciemment utilisé sa Vérité pour solidifier ses os. Il avait eu un réflexe chanceux…

Quoiqu’il en soit, Richard était dans de beaux draps. Dans les deux sens du terme : couché depuis au moins un jour entier, son retour à la tour était toujours repoussé un peu plus loin. Il s’inquiétait pour son ami… Espérons qu’il n’aura pas fait autant de bêtises que moi…

Soupirant de nouveau, Richard regarda Clara. Avait-elle cédé à la fatigue ou somnolait-elle brièvement ? Il ne le savait. Mais peu lui importait, tant il était plongé dans son observation… Elle était belle, il fallait en convenir : sa dense chevelure aux reflets roux à cause de la lueur tamisée de la bougie donnait l’impression qu’elle fusse Simius incarnée. Son visage fin aux traits harmonieux était pourtant témoins d’une certaine tristesse… Peut-être était-ce seulement une impression due aux larmes versées.
Mais Richard se sentait attiré, tel un papillon de la nuit vers une lumière solitaire. Il ne devait y céder et pourtant… Il y tenait, à ce bout de femme, si fougueuse malgré son jeune âge. C’était fou, car ne la connaissait-il pas depuis un temps si court ? Quoi, une demi-journée ?
Il y avait des choses inexplicables dans ce monde, qui défiaient toute logique et raison, lui avait un jour dit Jastes. Alors peut-être que…
Il soupira.
Bien des femmes lui avaient fait des avances. Toutes repoussées malgré la promesse de biens, d’un statut honorable, d’un titre important ou encore d’un atout pour la Confrérie. Il s’était juré d’ignorer ces affaires compliquées pour ne seulement s’intéresser à son ami : il se pensait incapable d’aimer.

Et quand finalement les élans de son cœur se manifestent, c’est pour une inconnue mystérieuse bien plus jeune que lui…
Quel grand mal bien doux était cette femme…
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Clara Arnstven

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Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeLun 21 Oct 2013 - 2:59

Aucune réaction ne s’empara de Clara, plongée dans un mutisme complet et une immobilité parfaite, même lorsque celle-ci vit luire l’éclat argenté d’yeux qu’elle avait tant espérer voir s’ouvrir depuis des heures. À ce regard, le soupir combiné, à peine audible de Richard, ne suffit même pas à l’extirper de cette absence. La tête se tourne vers elle ; la jeune femme, oscillant entre le rêve et la tangibilité, imprima cette image d’un cadavre revenant à lui. Elle aurait frissonné, si son corps n’avait pas été si vanné.

« Clara ? »

Cette voix familière, chaude et enrouée, lui donna le coup de fouet nécessaire. Elle battit des cils, également de retours parmi les vivants à présent. Elle fit un mouvement brusque, trop brusque pour ses muscles encore endormi, et son cœur s’ébranla. Un léger vertige l’assaillit lorsqu’elle se pencha pour attraper la cruche d’eau à la tête du lit. Elle tint le récipient sur ses genoux un instant, sans mot dire, les yeux rivés avec une intensité presque troublante sur celui qu’elle avait veillé si vaillamment. Comme si elle avait peur qu’il ne s’assoupisse de nouveau, et ne revienne jamais à lui cette fois. Ses mains délicates se crispèrent sur le récipient, elle inspira. Qu’étais cette brûlure douloureuse qui l’empoignait à la gorge ? Elle versa un l’eau dans un coupe d’étain et la tendit à Richard.

- Buvez.

Le premier mot était dit, et cela lui apporta soulagement. Elle lissa ses cheveux vers l’arrière en soupirant, la fatigue lui brûlait le visage. Ce sentant soudain émotive, elle se dit que l’épuisement en était la cause. Elle appuya ses lèvres contre son poing fermée et, muette, observa le blond. Elle ne pensait à rien en particulier, simplement rassurée qu’il soit assez vigoureux pour ne dire ne serait-ce que son nom. Le remord lui rongeait la poitrine. Tout cela ne serait pas arrivé si ça n’avait pas été de sa tête enflée, comme disait son père. Les accidents, qu’ils les appelaient, ces événements fâcheux provoqués par la hardiesse de l’imprudente Clara. Elle s’en voulait horriblement ; elle était bien loin et bien anodine cette satisfaction momentanée qu’elle avait ressenti en outrageant ce seigneur. Et pour la peine, elle aurait voulu en cet instant qu’il subisse mille milliers de morts atroces, mille milliers de cette mort qu’avait subi son agresseur. La jeune femme ne s’expliquait pas encore ce qui c’était produit, ne s’étant pas donné le sombre plaisir d’y repensé. Mais maintenant, l’image odieuse du monstre se convulsant près d’elle, comme si un mal l’avait rongé de l’intérieur, l’avait cruellement fulguré, sans pitié aucune, ne semblait pas assez horrible à Clara.

Elle se leva en silence et s’approcha de la fenêtre. Elle en ouvrit les battants et l’air vicié s’en alla au dehors, cédant sa place à un vent tiède et ravivant. S’appuyant à la rambarde, elle déglutit et laissa les rayons encore pâle faire des jeux de lumière sur son visage harassé. Richard avait droit à un bilan, mais ressasser la nuit était, pour la jeune femme, une tâche difficile.

- Au final, je suis peut-être meilleure bretteuse que vous. J’en ai liquidé deux, alors vous qu’un seul…

Clara rit tout bas, qu’avait-elle à dire de telles atrocités ? Elle se masse les tempes, confuse, éreintée, au-dessus de tout cela. Une lueur rosée ratissait la chambre. L’Arvèle revint s’asseoir au chevet du grand blond et une envie soudaine la prit d’attraper sa main et de la serrer jusqu’à la rompre. Elle savait bien ce qu’était tout ceci. Et pour cela, en s’en voulu encore plus, et la colère l’envahit.

- Le Neustro a dit que vous ne devriez pas trop marcher, sinon la plaie pourrait s’ouvrir à nouveau. Il a aussi dit que vous ne pourriez pas monter avant… un moment. Il a dit que…

Voilà, Clara sentait les mots devenir comme de la pierre dans sa bouche, elle avait du mal à les expulser. Elle s’accouda à la table, serra les poings pour ne pas trembloter. L’orgueil la gifla et elle se mordit l’intérieure de la joue. Un peu de sang-froid, Clara. Richard n’était pas mort, alors cesse de geindre et de t’apitoyer.

- Je suis tellement… je m’en veux, Richard. Pardon. Tout est de ma faute. Vous aviez bien fait de ne pas mourir sinon…

Elle rit de nouveau, mais ce n’était certainement pas de joie. Ses sourcils se froncèrent et, comme dans toutes les situations où elle se sentait vulnérable, la jeune femme se referma hermétiquement. Elle acheva sèchement.

- Mais vous êtes vivant.

Elle le regarda. Même si son visage était dur, ses yeux miroitaient d’autre chose. Elle avait déjà trop parlé, chaque mot était inutile et de trop. En vérité, elle se sentait comme une enfant perdue et elle détestait cette sensation de vulnérabilité. Voilà ce qu’elle était en présence de Richard, fragile, et si d’un côté cela lui procurait une sensation nouvelle et envoûtante, de l’autre, cela l’enrageait.

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Richard Lëys

Richard Lëys

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Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeLun 21 Oct 2013 - 18:05

Il accepta avec un remerciement silencieux l’eau offerte par la jeune femme. Tout en buvant, tout en ressentant la brûlure dans sa gorge au passage du liquide, ses yeux sombres ne quittaient le visage de Clara si proche et pourtant si… lointaine. Elle le fixait avec une intensité troublante comme si elle faisait face à une apparition inespérée. Mais ses traits laissaient entrevoir de la colère… Richard ne la comprenait pas : pourquoi se montrer si émotive face à lui et sa flagrante faiblesse, s’offrant ainsi avec une sincérité touchante ? Car même s’il était la raison de son ire, il préférait de loin être haï qu’ignoré ou pire, recevoir de la pitié.
Trop de fierté dirait-on.
Mais tout cela expliquait-il rationnellement le flot d’émotions contradictoires qui s’agitaient en son sein ? Rares avaient été ceux qui veillèrent à son chevet au point d’en garder des cernes prononcées… Quelques vieilles figures de jeunesse, un visage du même âge et voilà tout. Et alors qu’il s’était fait à l’idée d’être une âme solitaire, une jeune inconnue était venue attiser son intérêt : forte et capable, lettrée et sensible, pleine de vie et généreuse… Oh qu’il maudit le destin de l’avoir rencontrée. Tout en le remerciant, sourdement.
Cesse donc ces sempiternelles analyses, se reprit Richard. Il n’était point le centre du monde, aussi s’efforça-t-il de s’intéresser un peu plus à la situation présente… les yeux plongés dans une certaine contemplation.

Elle était silencieuse et belle de tristesse dans cette aube encore jeune ; un vent bienvenu s’engouffra dans l’étroite pièce, jouant de ses longs cheveux comme tant de fils précieux. Richard sourit tandis qu’elle avait le dos tourné. Voilà donc que ses pensées mêmes s’entachaient d’un coté fleur bleue !
Peut-être était-ce sa fatigue corporelle et mentale, le temps en suspend entre aurore et nuit, mais Richard regardait le tableau que lui offrait Clara de sa personne aux allures irréelles avec l’insatiable soif d’un ignorant en quête de savoir… Aussi douloureuse qu’elle fusse, il aurait tant aimé que les secondes s’éternisent.

«Au final, je suis peut-être meilleure bretteuse que vous. J’en ai liquidé deux, alors vous qu’un seul… » fit-elle avec un rire sombre.

Richard ne put se résoudre à sourire, son lot de remords revenant au galop : tout général qu’il était, il n’avait pu venir à bout de trois godelureaux afin de la protéger. Car il devinait sans peine les attaques dont une femme dévêtue avait pu être victime. Et malgré cette connaissance, il ne pouvait réellement la comprendre, en tant qu’homme, sinon en éprouver une profonde colère face à un tel acte. Que les trois fussent morts, tant mieux, il n’aurait manqué de passer le fil de sa lame vengeresse avant de repartir vers le sud…
Clara le dévisageait, le visage dur.

« Le Neustro a dit que vous ne devriez pas trop marcher, sinon la plaie pourrait s’ouvrir à nouveau. Il a aussi dit que vous ne pourriez pas monter avant… un moment. Il a dit que… »

S’il aurait voulu y placer un commentaire rassurant, Richard se ravisa en observant le flux d’émotions que Clara ressentait, visible sur son si expressif visage. Il attendit donc qu’elle lui dise le fond de sa pensée. Au diable les conséquences du diagnostic.

« Je suis tellement… je m’en veux, Richard… »

Il ne s’était certes pas préparé à cela.

« Pardon. Tout est de ma faute. Vous aviez bien fait de ne pas mourir sinon… »

Elle lui paraissait si fragile ! L’envie le tenaillait de la prendre dans ses bras, qu’elle se taise et arrête de se faire tant de mal… Il voulait la rassurer, la combler de quiétude. Lui dire que la faute était au final autant la sienne…
Il vit ses sourcils se froncer et son expression chasser toute l’émotivité précédente.

« Mais vous êtes vivant. »

Jamais Richard, pourtant bon rhéteur, n’avait manié les sentiments de la passion avec grande virtuosité ; il se savait ignorant et maladroit néanmoins, là dans cette chambre étroite, il fit le choix d’abandonner sa fierté, son égoïsme caractériel, sa nature et son honneur pour cette… femme.
Il lui couterait de l’admettre plus tard, mais Clara avait su le défaire un moment de ses promesses l’entravant pour ne plus obéir qu’à ses désirs.
Ignorant la douleur et un visage neutre, Richard se redressa tant bien que mal et avançant un bras lent mais assuré vers ses épaules graciles, il voulut l’approcher de lui dans une étreinte tendre qui signifiait à ses yeux bien plus que tous les mots qu’il aurait pu prononcer à cet instant.
Il voulait oublier pendant quelques secondes, quelques minutes, quelques heures ou peut-être quelques jours toutes ses ombres, pour n’avoir dans sa vie que cette si belle lumière.
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Clara Arnstven

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Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeLun 21 Oct 2013 - 20:15

La jeune femme ferma les yeux, las de combattre l’émoi qui se consumait en son sein. Elle se serait sentit, peut-être, plus apte à le recevoir si elle avait été dans un cadre usuel et rassurant. Mais loin de tout ce qu’elle connaissait, loin même de ces sentiments nouveaux et redoutables qui naissait en elle, Clara ne voulait, ne pouvait y faire face. Derrière ses paupières closes se dessinaient les pourtours hâlés de tours et le château, de pierres fait, solide et qu’elle regrettait à présent d’avoir déserté. La montagne était robuste, et l’Arvèle qui s’était cru l’être autant, réalisait à présent qu’il n’en n’était rien. Qu’était-une armure d’indifférence contre les armes lascives de l’envie.

Clara pressentit, avant qu’elle ne la touche, la main du blond sur son épaule. La chaleur de la paume se fraya son chemin au travers du lin de sa chemise, chassa sa vision, chassa sa volonté. Et lorsque Richard l’attira à lui, la jeune femme se sentit tomber dans une fosse sans fin. Alors elle s’agrippa à ce corps solide, solide malgré qu’il fût blessé, pour éviter de s’écraser au fond du précipice. Ses yeux restèrent fermés, il était plus facile ainsi de combattre le vertige. Sans n’avoir pourtant jamais ressentit cela, Clara savait de quoi il en retournait et savait, très bien, que chaque seconde qu’elle étirerait ainsi lovée dans une étreinte interdite la déchirerait au centuple le temps venu de la briser.

Richard, qu’avait-il de si particulier pour ainsi faire éclater ses défenses. Ses cheveux avaient gardé l’odeur résiduelle du feu, sa peau celle plus subtile du sel. La jeune femme ne put s’empêcher d’humer ce parfum musqué, de s’en imprégner avec remords. Quelle calamité, leur connaissance ne se comptait encore qu’en heures, pas même une journée. Sa nourrisse lui avaient un soir expliqué que certaines personnes étaient détenteurs d’une vieille âme, que ces âmes avaient vécu plus de vies qu’on ne peut en compter, et qu’elle en venait parfois à rencontrer une sœur dont-elle avait partagé l’histoire, bien avant. Ces personnes se retrouvaient donc, sans savoir et passait bien souvent leur chemin. Clara, qui n’était pourtant pas de nature sentimentale, avait été ébranlée par cette théorie. Et si… ? Elle se crispa.

- Je dois partir, Richard…

Cette vérité dite avec le cœur au bord des lèvres, sa poitrine se compressa douloureusement. Voyons, cela n’avait aucun sens, elle devait se ressaisir. Se laisser aller de cette façon ne lui ressemblait pas, ne devait pas lui ressembler. Et pour peine, elle en voulait bêtement à cet homme, plus qu’elle ne s’en voulait à elle-même. N’étais-ce pas là une façon puérile de se protéger, alors qu’on se sait déjà atteint ? Clara se recula, se détachant difficilement de ce qu’elle savait déjà devoir quitter bientôt, peut-être bien pour toujours. Pourtant, elle détailla silencieusement Richard, souhaitant garder une image qui s’effacerait malgré tout avec les âges, un souvenir fugace qui se fane jusqu’à n’être chose que d’un passé oublié. Ce qui lui restait d’acharnement l’aida à s’éloigner, à ouvrir la porte, mais ne fut pas suffisant pour plus.

Pétrifiée dans le cadre du passage, elle n’osa un regard, elle n’osa même pas un autre mot. Que dire, de toute façon, qui ne serait pas déjà su des deux. Il n’y avait rien à ajouter, hélas, car leurs chemins se séparaient aussi inévitablement que les feuilles colorées d’automne se meurt sous un épais tapis de neige. Dire tout haut ce qu’elle pensait tout bas, et ce que Richard avait probablement déjà deviné, dépita Clara.

- Restez en vie, car j’espère vous revoir.

La silhouette de la jeune femme s’évanouit dans le couloir, espérant avoir correctement jeté les dés du destin. Ne subsistait plus dans la chambre que de l’Arvèle le bruit de ses pas s’éloignant avec une assurance feinte. Machinalement, Clara glissa ses doigts dans sa bourse de cuire et laissa tomber largement de pièces tintinnabulantes sur le comptoir de l’auberge. Elle avait l’impression que plus loin elle serait, mieux elle se porterait. Mais même rendu aux portes de l’écurie, puis aux portes de la ville, puis aux portes de l’immensité où s’étendait la plaine, sa peine n’était pas moindre. Sa monture foulait la Meridia d'un galop allongé et, dans l’aube encore sombre, le sol de la vallée sembla être à Clara un ciel étoilé, lui rappelant que le continent était aussi vaste que le voûte au-dessus de sa tête. Et qu’il était, par ce fait même, frivole et enfantin de penser que sa route recroiserait un jour celle de Richard.

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Richard Lëys

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Message(#) Sujet: Re: Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys] Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]  - Page 2 Icon_minitimeSam 26 Oct 2013 - 20:05

Une légère fragrance d’herbe et de la poussière des routes se mêlait au parfum du bain de tantôt ; il huma avec la volonté d’imprégner sa mémoire de cette odeur si chère désormais à son cœur plus que sa raison ignorée depuis longtemps. Un battement pulsait au rythme du sien, contre son torse, tandis que ses bras s’étaient refermés autour d’elle. Et il eut le si ardent désir d’ainsi rester embrassés dans la quiétude matinale… Il avait craint, un bref instant, qu’elle refusât son étreinte osée, aussi le plaisir de l’instant n’en fut que plus fort. Il avait envie de la protéger, il avait envie qu’elle le protège… Le temps s’égouttait en silence et son image se gravait un peu plus à chaque seconde passée dans son esprit. Fou qu’il avait été de dépasser la limite ! Toutefois, la fortune ne s’était pas elle-même jouée d’eux en faisant intervenir ces trois agresseurs ? Ils avaient pu gouter pendant une courte heure le doux apprentissage de chacun et qui sait la suite alors possible sans cette impromptue attaque ; et s’il avait était plus prudent, moins distrait, que serait-il arrivé s’il avait pu vaincre ces hommes ? Tant d’hypothèses qui le ramenaient à chaque fois à la dure réalité…
Néanmoins, le présent n’était au regret. Richard savait dès le début qu’une histoire aurait été impossible et il devait se montrer simplement heureux d’avoir pu être si intime avec elle. C’était douloureux pourtant.
Et elle qui s’agrippait ! Il sentait ses émotions se confondre aux siennes et à la peine d’une inéluctable séparation venait s’ajouter la joie de tant compter pour elle… Le méritait-il, lui, Richard, Général Récleyés, bras droit du Ténébreux, descendant de l’héritage sombre de Zaraze ? Non il ne voulait pas qu’elle perde sa vitalité par cette malédiction… Il ne souhaitait pas l’entrainer dans sa déchéance… Elle verrait pas s’offrir à ses yeux qu’un noir futur, inexorablement sanglant et s’achevant par la haine… Pas Clara.

« Je dois partir Richard… »

Il avait compris cela avant même de l’entendre, par le jeu retors qu’était la sincérité du corps. Son esprit s’y rebellait malgré tout et voulait tant ne pas l’accepter ! Mais pousserait-il l’égoïsme jusqu’à la contraindre voire la briser pour le satisfaire, alors que c’était sa belle âme libre qui lui plaisait tant ? A ses yeux, Clara semblait incarner cet idéal dénué de toute entrave auquel il aspirait encore et encore… Un idéal, donc quelque chose que l’on ne pourrait posséder n’est-ce pas ? S’il en venait à la conquérir, nul doute que ça la détruirait à terme.
Aussi chassa-t-il son flot déchainé de sentiments pour qu’une torpeur effarante ne vienne contenir ses désirs et fasse respecter sa résolution, son renoncement. Mais combien de lames avaient transpercé sa peau sans le consumer alors que sa simple proximité suffisait à abattre sa plus grande détermination ? Aucune, non aucune…
Et elle qui était là à hésiter, le pied sur l’encadrement de la porte, comme si elle savait aussi que sortir de cette pièce signifierait la fin, le non –retour… Mais il ne se lèverait pas, ne la rattraperait pas, ne l’embrasserait pas… Il restait assis avec ses seules pensées à la contempler comme un rêve passager que l’on regrette au réveil. Un plaisir qu’appréciable de par sa nature éphémère. Au diable la mièvrerie ! Il voulait devenir enfant afin de perdre cette écharpe de responsabilités et que la sincérité dicte ses actes et ses paroles…

« Restez en vie, murmura-t-elle, car j’espère vous revoir… »

Richard ne dit rien, les yeux ouverts sur le plafond de poussière. Ses traits étaient durs comme ceux que devaient avoir un soldat : rigueur, insensibilité, indifférence. Mais lorsque le plancher eut fini de grincer et la porte s’eut refermée, de ses froides prunelles s’écoula une larme solitaire et lui murmura inaudiblement :

« Je ne sais moi-même si je souhaite te rencontrer encore… »

Un galop retentit au loin, et Richard se laissa tomber dans les bras de la bienheureuse inconscience.
***

Toute la semaine suivante, le Récleyés s’attela à son rétablissement avec acharnement. De petites doses de Vérité virent accélérer sa guérison et fausser de ce fait le diagnostic du médecin –dont il doutait des compétences- si bien qu’il fut à même de courir six jours après. Il occupait son temps à la lecture de traités stratégiques dénichés chez quelques vieilles personnes du village contre quelques pièces mais jamais il ne reprit la plume ; l’envie d’écrire ne l’avait pas déserté, cependant il savait la souffrance que celle-ci ne manquerait de faire naitre en déliant ses plus profondes pensées.
Enfin il organisa son départ à l’aube du septième jour et, faisant fit des protestations de son médecin assigné, Richard reprit la route d’un pas volontaire. La chance lui permit de ne pas rencontrer de prédateur en chemin et de trouver toute la nourriture dont il aurait eu besoin ; de temps à autre, une douleur l’élançait au flanc sans que la plaie ne se rouvre toutefois.

Néanmoins… il ne put empêcher instinctivement sa main de s’emparer d’une plume afin de tracer quelques vers, un soir, face à un feu crépitant. Le brasier avait éveillé le souvenir d’un âtre et... Il n’était qu’un homme, lui soufflait le vent.

" Libre et rebelle, telle un oriflamme au champ,
Oh que j’aimerai tant oublier tous ces rangs
Et ces promesses et ces entraves d’antan !

Je ne sais que penser à ta proximité
Quand les formes belles de ton âme déliée
Engourdissent mon esprit de tes voluptés.

Embrasser ta beauté altière et de sourires
Et de soupirs…"


Il déchira la page et la jeta dans le feu. Elle se consuma sans une plainte. Mais lui se recroquevilla un peu plus dans sa cape.


- FIN DU RP -
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Flairer les éclaboussures [PV Richard Lëys]

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