Vous cherchiez un emploi, une occupation ? Cela tombe bien pour vous, un vieil antiquaire est à la recherche d'une jeune âme pouvant l'aider à trouver une dizaine de Yanamïar, la fleur de verre fleurissant autour des tombes. Pour quoi faire ? Vous n'en savez rien mais cela semble très important. Accepterez vous cette balade dans un cimetière bien rémunérée ?


Aucune intervention de MJ n'est attendue et vous pouvez vous exprimer librement. Votre quête devra être écrite en trois messages ou plus.

On ne pouvait pas vraiment dire que Finnick avait besoin d'un emploi : il disposait largement de quoi entretenir son train de vie plutôt modeste. Il n'avait pas non plus besoin d'aide pour trouver de quoi occuper ses journées, au contraire, il avait rarement le temps de s'ennuyer, surtout quand il séjournait à Helpo. Le culte d'Eliosa était très vivace dans cette ville et sa présence était souvent requise un peu partout, parfois pour des demandes qui semblaient assez éloignées de la pratique religieuse d'ailleurs.

Mais le prêtre ne savait pas dire non quand on lui demandait de l'aide. C'est ainsi qu'il se retrouva, il ne savait même plus trop comment, à discuter avec un vieil antiquaire qui cherchait une jeune personne en pleine santé pour aller cueillir quelques brassées de Yanamïar pour lui dans le cimetière de la ville. Finnick aurait volontiers laissé sa place à l'un des gamins des rues qui semblaient perpétuellement à le recherche d'un emploi, mais le commerçant lui assura qu'aucun d'eux ne faisait l'affaire. La moitié d'entre eux était trop superstitieux pour accepter de s'aventurer près des tombes, et les autres était au contraire trop brutaux pour manipuler les délicates fleurs de verre.

Voila donc notre héléo parti pour le cimetière situé en périphérie de la ville, poussant devant lui une brouette remplie de caisses de bois garnies de paille pour transporter la précieuse marchandise. L'endroit était désert à son arrivé, le portail seulement gardé par une impressionnante allégorie d'Uraang dans le rôle de la Mort. Quelques oliviers plantés ça et là dans les allées fournissaient un peu d'ombre, mais l'endroit souffrait autant de la sécheresse que le reste de la région.

Finnick pensait que cela rendrait sa tâche plus facile, éliminant la plupart des mauvaises herbes, mais il se rendit rapidement compte de son erreur. Toute la partie plus ancienne du cimetière semblait plus ou moins à l'abandon et elle avait été envahie par des buissons aux épines acérées. Bien sûr, c'était là aussi que poussaient la plupart des Yanamïar... En tout cas, celles qu'il pouvait se permettre de cueillir. Il ne pouvait décemment pas aller se servir au niveau des tombes les plus récentes. Certains humains pensaient qu'elles étaient la manifestation de l'âme des défunts, alors il n'osait imaginer leur réaction si une famille constatait que quelqu'un les avait arrachées sur la sépulture de leurs proches.

C'est donc avec une certaine mélancolie qu'il commença à se frayer un chemin parmi les carrés de tombes abandonnées. Bien sûr, rien n'était éternel, pas même le souvenir des défunts passé quelques générations... Mais pour un noble élevé dans le respect de la mémoire familiale, il y avait quand même quelque chose d'extrêmement triste dans ces sépultures oubliées. Il trébucha sur une plaque à moitié enterrée dans la poussière et donc seul un coin dépassait. Poussé par la curiosité, le prêtre la dégagea et frotta avec sa manche jusqu'à révéler le message gravé sur la tablette de métal :

« Clara,
Plus que tout, j'aimais caresser ton visage quand tu t'endormais.
Même maintenant, alors que tu ne te réveilleras plus,
Je chérirai toujours ton souvenir.
                                                       Guisélia »

Ce court témoignage, si intime et si humain, serra la gorge de Finnick. Il avait pourtant l'habitude d'accompagner les fidèles dans des moments difficiles, comme la perte de leurs proches. Mais là... Qui étaient Clara et Guisélia ? Parlait-on d'une fille et de sa mère ? De deux amantes ? Quand avaient-elles vécues ? Il se redressa pour examiner les tombes autour de lui, oubliant complètement sa première mission. Il s'en était fixé une nouvelle : retrouver la tombe où aurait dû se trouver cette plaque et rendre ce témoignage d'amour à sa sépulture.

D'abord, il devait s'équiper. Laissant sa brouette sur place, il retourna à l'entrée du cimetière. Il y avait là une sorte de cabane qui avait dû être la demeure du gardien du cimetière, mais elle semblait plus ou moins abandonnée. Cela expliquait sans doute pourquoi une partie de l'endroit était retourné à l'état sauvage... En tout cas, il trouva sous un porche quelques outils apparemment à la disposition des visiteurs. Rien d'extravagant : quelques cisailles, dont certaines étaient peut-être plus vieilles que lui, des chiffons troués, des gants dépareillés, un seau et une pompe. L'héléo en sortit d'abord une boue malodorante, mais après quelques minutes d'efforts, il réussit à remplir un seau d'eau à peu près claire et il put repartir avec son butin vers la mission qu'il s'était attribuée.

La journée commençait à être bien avancé et le soleil tapait dur, mais il fallait plus pour arrêter Finnick. Il commença méthodiquement par les emplacements les plus proches de sa découverte, coupant les branches entremêlées des buissons épineux et arrachant le tout quand il se retrouvait face à des nœuds trop inextricables. Les caisses destinées aux fleurs furent stockées dans un coin quand il dut commencer à utiliser la brouette pour dégager le terrain de tous les déchets végétaux qui s'accumulaient.

Enfin, après deux heures d'efforts, il avait libéré l'accès à une dizaine de tombes. Délicatement, armé de son seau et d'un chiffon, il entreprit de nettoyer les stèles pour découvrir les noms gravés dessus et dissimulés par des couches et des couches de poussière agglomérée par le temps. Certaines inscriptions étaient tellement effacées qu'il devenait difficile de déchiffrer et Finnick eut peur que sa quête ne soit vaine. Dans le pire des cas, il pourrait peut-être retrouver les archives du cimetières avec les noms des différents occupants des parcelles ? Et si jamais les prénoms n'étaient pas indiqués ?

Heureusement, la quatrième pierre qu'il nettoya fut la bonne. Excité plus que de raison, il révéla petit à petit le texte suivant :


Et surtout, un peu plus bas, dans un style assez différent :


Il se livra à quelques rapides calculs et émit une première hypothèse : Maria et Gericco étaient sûrement les parents, les trois autres leurs enfants dont un fils mort en bas âge. Guisélia était née après la mort de Maria, elle n'était donc pas une de leurs enfants (si Gericco s'était remarié, sa deuxième femme aurait dû être enterrée avec eux). Deux amantes alors ? Et Guisélia aurait tenu sa promesse en n'oubliant jamais Clara, même si elle lui avait survécu plus de 40 ans ? Comment avait-elle fait pour être enterrée dans le caveau familial ?

Désireux d'exhumer d'autres souvenirs, et sans doute rendu un peu fiévreux par le soleil qui continuait à taper sur son crâne, Finnick essaya de dégager davantage la tombe. Elle était encombrée notamment par les restes d'une grille en métal qui avait dû entourer la parcelle. En un siècle, elle s'était totalement déformée et la rouille l'avait rendue difficile à manipuler. Alors qu'il en était presque venu à bout, il se blessa dans un dernier effort en se plantant une pointe de métal dans la cuisse.

Il eut le mauvais réflexe de retirer la tige de la blessure. Non seulement la douleur lui arracha un juron et lui fit voir des étoiles, mais en plus la plaie saignait abondamment. Et bien sûr, personne aux alentours pour l'aider... En plus, il n'avait toujours pas ramassé les Yanamïar pour lesquelles il était venu.

Il regarda tristement la plaque commémorative qu'il avait posé une évidence un peu plus loin. Ce ne serait pas aujourd'hui qu'il connaitrait le fin mot de cette histoire...

Finnick se consola en se disant que la tombe n'allait pas disparaître et qu'il aurait tout le temps de revenir pour continuer son enquête, voire de la poursuivre une fois qu'il serait revenu en ville en consultant les archives à la bibliothèque. Il prit donc son mal en patience et il commença par s'occuper sommairement de sa blessure.

L'eau dont il disposait ne lui inspirait pas vraiment confiance et il hésita un moment sur la moins mauvaise marche à suivre, puis il réalisa qu'il n'avait pas non plus de tissu propre pour faire un bandage. Il se résolu donc à garder la jambe surelevée dans un angle inconfortable en s'appuyant sur une stèle (ce n'était sans doute pas très respectueux, mais avait-il le choix ?) pour diminuer le saignement. Pendant ce temps, il laissa reposer l'eau dans son seau le temps que le plus gros des impuretés se dépose au fond. Quand il estima avoir assez attendu, et que de toute façon il commençait à avoir des fourmis dans le mollet, il nettoya grossièrement la blessure et il la banda avec un mouchoir propre mais poussiéreux.

Il aurait sans doute dû redescendre immédiatement en ville chercher un dispensaire, mais cela voudrait dire abandonner la mission que le vieil antiquaire lui avait confié et il n'en était pas question. Certes, ce n'était sans doute pas urgent pour le commerçant, mais l'héléo mettait un point d'honneur à tenir sa parole. Bon, il n'était pas idiot non plus, et il aurait sans douté accepté de revenir les mains vides si sa blessure s'était révélée vraiment grave, mais son pansement de fortune semblait tenir et il se sentait suffisamment vaillant pour remplir une caisse ou deux de Yanamïar.

Il avisa d'ailleurs un gros corbeau qui pourrait l'aider dans sa tâche. Il fallait une main humaine pour choisir et cueillir ces fleurs délicates, mais ce genre d'oiseau était bien assez intelligent et adroit pour se charger ensuite d'aller les déposer dans les caisses de pailles ouvertes à proximité de la brouette. Cela éviterait à Finnick de trop nombreux aller – retour qui le ferait forcer sur sa jambe.

Il se mit donc au travail en clopinant, évitant au maximum de poser le pied, s'asseyant même carrément quand il trouvait un carré de plusieurs fleurs regroupées au même endroit. Ce n'était pas très élégant, mais ce n'était pas comme s'il avait un public pour s'en rendre compte, mis à part son assistant à plume qui semblait s'en moquer. En tout cas, l'héléo était bien content d'avoir récupéré des gants dans son entreprise de nettoyage de tombes : la plupart des fleurs étaient prisonnières d'un enchevêtrement de ronces et de plantes urticantes qu'il fallait dégager avec soin avant de pouvoir cueillir son précieux butin.

Toutefois, son organisation montra son efficacité : il lui fallut à peine une heure pour récolter une dizaine de Yanamïar réparties avec soin dans la paille. Cela suffirait ! De toute façon, l'héléo commençait à mourir de soif et il avait épuisé sa gourde depuis un moment. Et le retour en ville à cloche pied avec une brouette risquait de ne pas être une partie de plaisir... Il se mit donc en route sans plus tardé, alors qu'il était déjà fourbu et qu'il saignait encore. Il sourit à la Mort représentée par Uraang en sortant du cimetière, promettant de revenir au plus vite pour percer l'énigme de la famille Ferrini.