Malgré les gestes tendres et la passivité du volatile, Sylvius l'observait du coin de l'oeil. Il dut se retenir de ne pas se montrer ironique face à ces deux là. Quoi qu'il en soit, il ne s'imagina pas un instant être lié à un tel animal. Enfant, il avait bien jalousé les dragonniers de la tour, mais c'était là un lien bien plus extraordinaire avec des animaux légendaires dignes des hommes. Cette chose par contre qu'ils appelaient un protecteur ne l'intéressait pas réellement. En entendant la longue tirade de l'Ancienne, Sylvius s'était focalisée sur elle. Un tel manque d'assurance, tant de questions. Tout ce qu'il entendit vraiment, ce furent les quelques mots aux sujets des Récleyès. Toutes ces interrogations sur les dieux ne l'intéressaient pas, il était justement ici parce qu'il croyait être à la recherche d'un signe s'il parvenait à faire douter Eien.
Il tenta alors le tout pour le tout, se lançant dans un discours pro-récleyès :
- Précisément ! Ce sont eux qui ont pris la décision de la rejeter et pas elle qui les a abandonné comme elle a fait auparavant avec les Héléos et les Liares.
Il ne fit qu'une pause d'une seconde, il ne put retenir son sourire narquois. Ne voulant pas lui laisser le temps de lancer une répartie, il enchaîna :
- Si on met de côté leur blasphème et leur façon de faire, il ne faut pas oublier que ces hommes ont réussi à créer une société qui a survécu au courroux des dieux et de toutes les confréries. Et si j'allais jusque la Tour Est, ça ne m'étonnerait pas d'en trouver sur mon chemin. Vous imaginez ? Il y a un an, ce n'était que nos voisins. Ils pourraient nous attaquer à n'importe quel moment s'ils le veulent et que ferions-nous ? On entre-tuerait ?
Il en faisait peut être un peu trop, quoi qu'il en soit, il en avait suffisamment dit pour éveiller une polémique autour des Récleyès. Était-ce vraiment la bonne attitude ? Il n'en était pas sûr, mais il avait parlé avec une certaine profondeur sans pour autant tenter de paraître trop grave. Ses yeux allant de la demoiselle à l'oiseau. De quoi parlaient-il déjà à l'origine ? Il n'avait pu cacher sur son visage, cet instant de pause où son regard se perdit dans le vide et qu'on vit clairement qu'il était en train de chercher quelque chose. Les dieux, l'animal protecteur, c'était ça. Ennuyeux, quoi qu'il repensa à l'idée qu'il s'était mit dans un coin de la tête, vraiment, il devrait lancer des expérimentations à propos de l'effet des liens brisés entre les Anciens et leur protecteur.
Reportant son regard exclusivement sur Eien et la lueur qui émanait d'elle, Sylvius ne tenta pas d'apaiser le dialogue et revient sur le sujet des dieux :
- Et je doute que les dieux se manifesteraient pour nous venir en aide. Ils ont bien laissé l'ancienne guerre se déroulait, pourquoi se serait différent aujourd'hui ?
Eien VerteFeuille
Mage
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe Dim 29 Oct 2017 - 0:21
ft. Eien Vertefeuille 807 mots
À la recherche d'un signe
Eien aurait pu frissonner ou exprimer violemment son désaccord en entendant la réponse du guide. Mais non, pas même un haussement de sourcil n’exprima son sentiment. La Mage resta de glace face à ce qu’elle venait d’entendre. Le seul mouvement fut celui de l’Arsok qui se redressa brusquement, les plumes gonflées et le regard fixé sur l’homme en face de lui. Visiblement quelque chose dans le discours ou l’attitude ne lui plaisait pas. Pas du tout. Le contraste entre Eien et Nialë était saisissant.
Elle n’ouvrit même pas la bouche lorsqu’il marqua une pause, puis une deuxième, plus longue où il cherchait manifestement quelque chose, peut être sa prochain tirade ? Non, elle le laissa finir de dire ce qu’il avait à dire. Et visiblement cela ne tenait pas en trois phrases. Et une fois qu’il se fut tu, le silence s’installa alors qu’elle le fixait d’un air insondable, ses yeux gris luisant comme du métal froid et dur. Ajouté à l’attitude menaçante de l’Arsok, cela avait de quoi rendre l’ambiance particulièrement malaisante. Mais elle n’était pas là pour prendre le thé en échangeant des ragots à la base.
« Si on met de côté leur blasphème et leur façon de faire »… C’est quand même un gros « Si ». « Une société qui survécu au courroux des Dieux et des confréries » ? Oui, mais pour quoi et à quel prix ? L’histoire n’avait jamais été sa passion et ce qu’elle avait pu apprendre pouvait bien être biaisé, mais elle doutait cependant que toutes les horreurs réalisées par les Récleyès aient été inventées. Quant à l’intervention des Dieux… Eien se demandait à quel point les Dieux s’inquiétaient du destin des Hommes. Peut-être que cela les amusaient de les voir mener leurs petites querelles ? Peut-être avaient-ils déjà abandonnés les Hommes ? Comment savoir ?
Sylvius Hodgard… Cet homme avait quelque chose d’absolument fascinant. Parfois elle entendait dans ses propos comme le miroir d’elle-même et l’instant d’après se sentait son exact opposée. Son discours ne tombait pas dans l’oreille d’une sourde et faisait écho à certaines de ses pensées profondes, réprimées car blasphématoires ou tout simplement incompatibles avec ce qu’elle considérait être son monde. Mais trop de détails l’agaçaient ou la perturbaient pour qu’elle puisse y adhérer totalement. A commencer par l’attitude de Sylvius, qui se disait Ancien et guide, mais qui en manquait de trop nombreuses caractéristiques. Sans parler de la première phrase qu’il lui avait adressée, qui ne convenait pas vraiment à un homme de son rang. Et l’attitude méfiante de Nialë qui ne semblait pas être une simple réaction à ses pensées intérieures… Il était un mystère complet. Qui êtes-vous ? Cette question lui brûlait les lèvres mais elle se refusait à la prononcer. Elle préférait voir où cette conversation pourrait bien la mener, quitte à jouer un peu avec le feu. Par une injonction mentale forte, elle intima à Nialë de se calmer et de revenir à son côté. Elle ne pouvait se permettre de laisser le silence s’éterniser plus longtemps, à moins de faire fuir Sylvius. Mais que lui dire ..?
- Oui, ils étaient nos voisins et nous n’en savions rien. Ou alors ne voulions nous rien voir ? Tout le monde était persuadé que les Récleyès avaient été éradiqués. Ils étaient les grands méchants d’une époque révolue. Et pourquoi en aurions-nous douté ? Et s’ils nous attaquent ? Bonne question. Vous pensez sincèrement qu’ils vont rester tranquillement dans leurs terres stériles à vénérer Sidyllia maintenant que nous connaissons leur existence ? Alors que les Arvèles ont l’intention évidente de purger le problème ?
Elle laissait les mots s’écouler d’une voix calme parfois teintée d’une pointe d’ironie, le visage toujours impassible.
- J’en doute fort. Nous connaissons leur existence parce qu’ils ont voulu qu’il en soit ainsi. Tout le monde s’attend à ce qu’ils attaquent. Quant à ce que nous ferions… J’imagine qu’on se défendrait ? Les Récleyès ne sont pas connus pour être des enfants de cœur et je ne peux qu’imaginer quel genre de société ils voudraient bâtir après avoir soumis les autres confréries, si du moins ils en sont capables… A moins que vous ne voyez une autre solution ?
Elle marqua une pause pour laisser ses paroles faire leur chemin. Elle n’était pas grande amatrice de longs monologues mais puisque son interlocuteur semblait disposé à l’écouter parler (ou tout du moins à l’entendre, puisque rien ne préjugeait de son attention) elle lui répondrait. Sans forcément révéler le fond de sa pensée.
- Pour ce qui est des Dieux… Vous vous engagez sur un terrain glissant mon cher, et vos paroles ne sont pas nécessairement bienvenues dans ce qui est encore un temple. N’étant pas devineresse moi-même je serais bien incapable de dire l’implication des Dieux dans l’ancienne guerre.
Alors Monsieur Mystère, qu’allez-vous répondre à ça ?
Mère Nature
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe Mar 26 Déc 2017 - 14:34
En voyant l'animal se redressait et se montrer menaçant, Sylvius eut du mal à ne pas se montrer violant. Il esquiva un geste en arrière, ne pouvant ignorer l'oiseau qui semblait réagir à ses propos alors que sa maîtresse était au contraire restée de marbre. Sylvius eut l'impression que malgré la retenu de la jeune femme, le comportement de son compagnon trahissait ses pensées profondes et cela aurait presque pu le faire sourire. Elle n'était peut être pas aussi docile et calme qu'elle le laissait supposer.
Il était intrigué par elle et il écouta attentivement chacune de ses paroles. Réagissant par des sourires et mimiques montrant qu'il n'était pas d'accord par moment avec ce qu'elle disait. En particulier lorsqu'elle lui parla des Arvèles. Il n'avait aucune envie de réprimer ses émotions, surtout pas par rapport à ces stupides guerriers qui étaient sûrement en train de se jeter dans son piège aveuglément en ce moment même. Heureusement, elle dévia la conversation sur les récleyès et les dieux, ce qui intéressait beaucoup Sylvius. Et d'après ces propos, elle voulait qu'il s'exprime davantage à ce sujet.
Alors, il lui fit plaisir. Peut-être son compagnon se montrait-il violant, le ténébreux ne se sentait pas pour autant en réel danger. Ainsi, il se permit une certaine honnêteté, même si elle n'était totale. Le but n'étant de faire fuir cette demoiselle, bien au contraire. S'il parvenait à lui faire comprendre que son clan n'était pas l'horrible monstre qu'on faisait croire tous, il estimerait avoir réussi son pari. Même si pour lui, son premier objectif était de parvenir à la ramener avec lui, mais il savait pertinemment que c'était trop espérer.
Il laissa un petit silence s'installer, réfléchissant aux termes qu'il allait employer... :
- Avez-vous envisagé que les Récleyès puissent offrir leurs savoirs en échange de la coopération des autres confréries ? On m'a raconté qu'ils avaient été présents à la fête de la Vérité et si c'est vrai, il ne me semble pas qu'ils se soient montrés hostiles. Même perdu dans ma forêt, j'en aurai entendu parler. Est-ce que vous pensez que c'est si irréaliste ?
Et il se contente de cela. Les longs discours sont terminés, maintenant, il veut discuter réellement avec elle. Le sujet des récleyès est enfin central et il n'a pas envie de s'en écarter. Alors il se contente de ces quelques paroles, un petit sourire en coin imperceptible, attendant sa réaction. Serait-elle prête à coopérer avec des récleyès pacifistes, il n'en doute pas, mais il préfère l'entendre de sa bouche. Il veut qu'elle s'exprime librement, sans retenu comme il est en train de le faire.
Eien VerteFeuille
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe Mar 9 Jan 2018 - 23:42
ft. Eien Vertefeuille 466 mots
À la recherche d'un signe
Eien doit s’avouer surprise. C’était bien la première fois qu’elle croisait quelqu’un qui semblait estimer que les Récleyès puissent avoir des intentions pacifistes. Et pas uniquement car ce genre de paroles aurait relevé de la haute trahison pour bien des gens. Mais après tout, cela faisait cent ans qu’ils avaient été bannis dans des terres hostiles, peut-être cela les avait-il pousser à reconsidérer leurs relations avec leur voisins ?
Ca serait beaucoup trop beau n’est-ce-pas ?
Mais Sylvius avait allumé la flamme de la curiosité chez Eien. Zaraze avait été un grand Mage chez les Anciens avant sa chute. Les Récleyès détenaient forcément une partie de son savoir, qui s’était perdu avec lui. Elle tenta de ne pas montrer son trouble, ce qui n’était pas si difficile étant donné la vivacité de ses muscles faciaux. Mais Nialë fut moins discret, son regard faisant des allers-retours entre les deux humains, toujours ébouriffé de colère contre le prétendu guide.
Cela dit, pour un guide qui ne sortait pas de sa forêt ou de son marais et qui ne voyait pas grand monde, Sylvius semblait bien trop au courant des choses qui se passaient à l’extérieur. Dont elle-même n’était pas au courant alors qu’elle était allée à cette fichue Fête. Alors soit il avait récemment eu des clients bien bavards, soit il n’était pas ce qu’il prétendait. Eien avait peu de doutes quant à la dernière option. Mais le dire n’apporterait rien de bon. Si jamais il décidait de l’attaquer ou de la faire taire, elle aurait peu de moyens de se défendre. De plus, il semblait avoir des choses à dire (bien que de manière détournée. Elle décida de relever le défi, après tout, voyons jusqu’où cette discussion pouvait bien la mener ! Qu’il croit qu’elle était encore dupe un peu plus longtemps…
- Irréaliste… Je ne sais pas. J’ai du mal à imaginer un Récleyès comme quelqu’un de pacifiste. Mais on m’a inculqué ça depuis ma plus tendre enfance me direz-vous ! Vous croyez vraiment qu’ils n’auraient pas envie de se venger ? Je veux dire, malgré le fait qu’ils aient embrassé la cause de Sidyllia, on doit être un peu amer après un siècle dans les Terres Inconnues, non ? Sans parler du fait que je doute que les dirigeants des confréries acceptent le moindre accord avec des Récleyès, à commencer par nos Nascors. Après ce qu’ils nous ont fait, les penser morts et enterrés était une pensée réconfortante pour bien des Anciens !
Voilà, elle avait joué le jeu. C’eut été mentir que de dire qu’elle ne pensait pas ce qu’elle disait. Elle voulait vraiment savoir ce que Sylvius, ou qui que soit cet étrange homme, pensait de cette histoire. Peut-être jouait-elle avec le feu, mais elle préférait se brûler que d’être dans le noir.
Mère Nature
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe Dim 4 Fév 2018 - 15:51
Il ne cacha pas sa surprise en entendant ces paroles fort éclairées qu'il approuvait d'un hochement de tête à chaque question. Cette enfant de la forêt semblait avoir une vision bien plus claire et impartiale qu'elle ne le croyait. Sylvius l'écouta sans prêter attention à son volatile qui n'était pas réceptif au charme du Récleyès contrairement à sa maîtresse. Le Ténébreux pouvait parfois se montrer quelque peu orgueilleux, mais il n'en était pas pour autant aveuglé.
Même si l'Ancienne était vraisemblablement prête à rester ici pour discuter encore un petit moment, il pressentait qu'il valait mieux pour lui ne pas trop s'attarder dans cet endroit. Si elle était seule lorsqu'il l'avait croisé, il n'avait pas envie de rentrer au campement sur le petit matin et risquait de croiser une autre personne dans la forêt. Et puis, il fallait bien qu'il dorme une ou deux heures avant de reprendre la route s'il voulait être grandiose une fois l'heure fatidique arrivée.
Pour autant, la conversation commençait vraiment à devenir intéressante, il pouvait bien rester encore quelques minutes. Son regard passa sur l'étui de cuir qu'il avait laissé à côté de lui et il décida de rallumer une cigarette après l'avoir assemblé tout en l'écoutant parler. Elle avait à peine terminé quand le briquet illumina son visage et fit un bruit déchirant. Les premières braises tombèrent alors qu'il prenait une longue bouffée et ranger l'étui à sa place. La fumée bleutée tournoyait encore autour de lui quand il lui répondit avec une douceur peu naturelle :
- J'avoue n'avoir jamais réellement pensé aux Récleyès. C'est à peine si je me souviens des histoires que ma mère me racontait à leur sujet.
Il reprit une inspiration empoisonnée avant de se lancer réellement tout en maintenant une voix calme et en multipliant les pauses :
- Pour le conseil, je vous l'accorde, j'imagine mal les Nascors prêts à assumer leur justice. S'il y a une histoire dont je me souviens, c'est celle de Zaraze. Gamin ma mère insistait beaucoup sur le fait que c'était un puissant mage noir qui pouvait être capable de toutes les horreurs. Mais quand ils sont réapparus, la première chose dont je me suis souvenu, c'est le début de son histoire. Que Zaraze était l'un des nôtres et que, si je peux me permettre, ce sont les Nascors qui l'ont en quelque sorte créé ...
Puis une autre petite bouffée :
- Enfin, ce ne sont que les tergiversions d'un fou un peu trop solitaire. Je n'ai pas pour habitude de parler autant avec mes clients, je leur demande des nouvelles du monde et bien souvent nos conversations s'arrêtent là. C'est sûrement à cause de cet endroit que je me retrouve à vous partager mes inquiétudes. Si vous le voulez, je peux arrêter de vous embêter avec les récleyès et toutes ces histoires bien ennuyeuses que votre compagnon n'a pas l'air d'aimer.
Eien VerteFeuille
Mage
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe Lun 19 Fév 2018 - 8:49
ft. Eien Vertefeuille 903 mots
À la recherche d'un signe
Un long silence suivit sa réponse. Elle eut peur d’en avoir trop dit. Trop dit sur ses doutes sur sa Confrérie, ou trop dit sur ce qu’elle pensait des Récléyès. Elle n’avait pas pour habitude de se confier, même à ses proches. Surtout à ses proches. Elle ne devrait pas être aussi honnête avec quelqu’un qu’elle connaissait à peine. Même si la probabilité qu’elle le revoie était faible, la Forêt était un petit monde. Elle le vit plonger sa main dans l’étui en cuir dans lequel il rangeait ses satanées herbes à fumer et s’inquiéta. Qui pouvait savoir ce qu’il pouvait bien cacher là-dedans.
Et pourtant, extérieurement, rien ne montrait son trouble. Rien, sauf le regard attentif que Nialë portait sur le prétendu guide. Les Arsoks n’étaient pas violents en général, mais vous pourriez être surpris de ce qu’ils peuvent faire s’ils sentent eux-mêmes ou leur partenaire menacés. Le soulagement d’Eien lorsqu’il ne sortit qu’une nouvelle cigarette ne dura qu’un instant. Elle plissa pratiquement le nez en sentant l’infâme fumée bleue que cette chose dégageait et détourna le regard vers la fenêtre pour avoir un peu d’air frais. Nialë gardait un œil sur lui et l’avertirait s’il ne faisait que le moindre geste dans sa direction. C’était l’avantage de partager son âme avec un autre.
Lorsqu’il lui annonça ne pas vraiment penser aux Récléyès, elle se mit à tousser pour cacher sa surprise et les paroles qui avaient failli sortir. Heureusement pour elle, l’immonde fumée lui donnait une bonne excuse. Il croyait vraiment qu’elle allait avaler ça, après la conversation qu’ils avaient eu ? Pas de chance pour toi mon gars, Eien a excellente mémoire. Sur un registre totalement différent, c’est ce qui l’avait bien aidée à l’Académie, alors que ses études l’ennuyaient profondément. Et l’Ancienne se souvenait de ses paroles. Il ne ressemblait pas à quelqu’un pour qui les Récléyès n’étaient qu’un conte. Il avait avoué lui-même qu’il les admirait presque pour avoir réussi à « unir » les Confréries.
Néanmoins, la suite de ses paroles l’intéressait nettement plus. Les Nascors avaient « créé » Zaraze. Cette partie lui disait quelque chose effectivement. Elle l’avait lu dans un livre d’histoire. Pas sous ces termes, bien évidemment, mais… Bizarrement, le fait que Zaraze avait appartenu aux Anciens et le fait que ce soient les Nascors qui aient au moins en partie fait de lui ce qu’il était… Ne faisaient pas partie des choses que ses parents lui racontaient quand elle était petite. Préféraient-ils, eux aussi, oublier cette partie de leur histoire ? Le savaient-ils vraiment ? Son père était Nascor et fier de l’être, il ne supporterait certainement pas que l’on mette en doute leur fiabilité.
Et pourtant… Avaient-ils créé le monstre ? Que s’était-il passé exactement il y a cent ans pour que la situation devienne ce qu’elle est aujourd’hui ? Bien sûr, l’influence de Sidyllia noircissait le cœur des hommes… Mais Zaraze avait-il été fondamentalement un monstre dès le départ, comme les histoires le racontent ? Ces pensées la parcouraient tandis qu’elle écoutait distraitement ce qu’il disait. Le fait qu’il s’accroche encore à sa version de « je suis un guide triste qui ne voit presque personne » la laissait totalement indifférente à présent. S’il n’avait aucune raison de remettre en doute qu’elle pensait autrement, tant mieux. Mais elle ne pouvait qu’acquiescer concernant la suite.
- Mes parents ne racontaient pas ce genre d’histoire. Quand j’étais enfant, Zaraze était un monstre sanguinaire qui brûle la forêt et bois le sang des enfants. Votre mère avait l’air d’avoir une version plus complète de l’histoire. Et puis il ne faut pas oublier que les Nascors sont des hommes politiques. Ils pensent peut-être être de bonne foi, mais au final, ils croient ce qui les arrange.
Elle s’arrêta là. Ce n’était pas la peine qu’elle se compromette plus que ça. Et puis en voulait-elle aux Nascors en tant que tel, ou à son père ? Ou à ce que le fait de devenir Nascor avait fait de son père ? Difficile à dire. Et puis quel intérêt d’essayer d’analyser ce genre de chose maintenant ? Le mal était fait depuis bien longtemps, comprendre ne l’aidera pas à oublier.
- Il est vrai que ce lieu a une ambiance particulière. Je suis plutôt le genre de personne qui apprécie le silence, mais nous voilà, à discuter de sujets sérieux la moitié de la nuit. Pour autant que j’ai apprécié cette conversation, il vaut sans doute mieux qu’elle se termine ici. La nuit porte conseil, certes, mais il ne faut pas en oublier de dormir.
Elle était sans doute mal placée pour dire ce genre de choses, qui auraient mieux sonné dans la bouche de sa mère, puisqu’elle était adepte des nuits blanches. Pour une Ancienne de la Lumière, elle était plutôt un oiseau de nuit. Elle se leva, Nialë à sa suite et alla se placer dans l’encadrement de la porte. En replaça sa capuche sur sa tête, retrouvant cet air étrange que lui donnait l’éclairage doré qui provenait de ses mains.
- Je vous souhaite de trouver ce que vous cherchez, guide, que ce soit un Familier, le courage de voyager ou encore des réponses à vos interrogations. Que la Mère veille sur vous.
Sur ces paroles traditionnelles, elle s’inclina, puis éteint la Lumière de ses mains. Elle sortit du temple pour rejoindre la Forêt gelée, illuminée seulement par la lumière de la Lune.
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(#) Sujet: Re: Event ° 4 | À la recherche d'un signe