Atchoum !

Un nuage de poussière se soulève alors que l'arvèles retire un livre des rayonnages. Perchée sur une fine échelle de bois, elle descend lentement avec le volume contre elle. C'est un ouvrage très épais et grand. Il tombe lourdement sur la petite table au centre des rayonnages où se trouve ses armes et il soulève un nouveau nuage de poussière. Marissa reste à distance en ouvrant “l’encyclopédie des Gardiens” et recherche directement l'index. Elle n'a jamais apprécié perdre son temps à feuilleter les pages d'un livre et essaye de trouver rapidement ce qu'elle veut savoir.

Elle sait comme tout le monde que les Gardiens ont été choisi par l’arbre de vie pour le protéger, mais ce qu’elle aimerait savoir, c’est comment gagner leur protection. Avant de rentrer dans la forêt en compagnie de Nubia, jamais elle n’avait songé à se tourner vers eux pour protéger le dragon, mais depuis les récents événements elle s’était mise à y réfléchir. Elle n’avait pas cherché à trop de se renseigner sur le chemin et avait préféré se rendre au plus vite à l’arbre de vie.

Étant proche de la capitale, elle avait trouvé judicieux de faire un crochet par Saona pour en apprendre un peu plus sur eux avant d’essayer de les rencontrer. Mais pas question de poser ses questions dans la rue pour risquer de se faire remarquer. Nubia attendait d’ailleurs en dehors de la ville. Elle ne s’en était pas approchée et se reposait tranquillement dans une tanière qu’ils avaient trouvé vide la veille en arrivant. Toutes deux y avaient dormi et en début d’après-midi Marissa était partie seule en direction de la ville.

La bibliothèque de Saona était réputée à travers le monde pour être la plus importante, elle s’y était donc naturellement dirigée dans l’espoir d’y glaner quelques informations utiles. L’endroit était véritablement impressionnant. L’entrée principale de la bibliothèque se trouvait au pied d’un des Mirlis de la ville, le bâtiment de pierre avait été construit autour de l’arbre. Du même bleu que celui-ci, il se fondait parfaitement dans le décor et était percé de nombreuses ouvertures permettant à l’arbre de s’épanouir.

Plusieurs passerelles dans les arbres menaient à la bibliothèque, mais Marissa ne s’était pas aventurée dans les hauteurs de la ville. Même si elle avait gravi des montagnes pour atteindre le toit du monde et était devenue dragonnier, elle était toujours mal à l’aise à l’idée de se suspendre au-dessus du vide. L’entrée au sol lui convenait parfaitement. Il y avait peu de monde dans le hall principal. L’endroit était étonnamment vide, il n’y avait qu’une multitudes d’affiches sur les murs faisant la promotion des spectacles et évènements du moment.

Au fond il y avait un large escalier menant à l’étage supérieur, à droite un escalier étroit descendant vers les racines de l’arbre et à gauche une étrange cabine tirée par des cordages et poulies permettant de monter dans les hauteurs. Marissa choisit l’escalier central. En arrivant sur le palier elle vit les premiers rayonnages de la bibliothèque. Elle passa d’immenses arches et se faufila discrètement sans adresser un salut aux deux bibliothécaires qui discutaient ensemble à l’accueil.

Le Mirlis trônait fièrement au milieu de la bibliothèque qui était organisée en paliers autour de lui. Son tronc était à nu et pas une seule partie du bâtiment ne le touchait. Marissa s’approcha curieuse de celui-ci et se pencha sur la rambarde qui l’entourait. On pouvait voir la terre quelques mètres plus bas et des racines de l’arbre. Le bâtiment entier entourait le Mirlis sans jamais l’effleurer, c’était extraordinaire. Marissa leva le nez pour voir sa cime et se rendit compte de l’immensité de la bibliothèque ce qui l’a fit revenir sur terre.

Il lui avait fallu parcourir tout le premier étage pour comprendre comment était organisé les lieux et se rendre compte que chaque étage avait sa spécialité. Elle avait décidé d’aller voir du côté du rayon histoire en premier lieu, soit au neuvième étage, mais elle s’était vite perdue dans les ouvrages. Après une heure de recherche et plusieurs pages froissées, elle s’était enfin avouée vaincue et s’était adressée à un bibliothécaire qui la regardait de loin maltraiter les ouvrages. Il lui avait indiqué le troisième étage et avait récupéré précautionneusement le livre qu’elle tenait.

Cet endroit était bien trop grand ! Mais pas question d’utiliser la cabine de bois ! Elle prit les escaliers tranquillement un peu essoufflée. Ses armes commençaient à peser lourd, ce n’était pas l’idéal pour se déplacer dans un tel lieu, elle aurait pu au moins laisser le fusil avec Nubia. Quand elle arriva à l’endroit qu’on lui avait indiqué, elle laissa tout tomber sur une table, ne se préoccupant pas du bruit qu’elle provoqua. L’encyclopédie était exactement là où on lui avait indiqué.

Marissa resta debout pour feuilleter les pages de l’ouvrage. Elle rapprocha la lampe de bureau vers lui pour mieux y voir et se mit à lire en diagonale les chapitres qui pouvaient l’intéresser. L’après-midi était déjà bien entamée et l’endroit s’assombrissait, elle ne voulait pas perdre de temps. Elle se demanda à voix haute si elle pouvait emporter cet ouvrage ? Si elle déchirait quelques pages, cela ne se verrait pas pensa-t-elle en revanche intérieurement.

T'es là, installée à une table de la bibliothèque, le regard vaguement perdue vers l'horizon. Tu sais pas c'que tu fou là, mais t'y es et tu bougera plus. Tu soupire vaguement alors que tu repose le regard sur ton livre. Il t'ennuie, ce bouquin. C'est pourquoi soudain tu te lève et te dirige vers les rayonnage. Tu sais pas c'que tu veux, mais tu veux un truc qui bouge, qui raconte une histoire. Quelque chose avec du danger, de l'action, de l'aventure... pas un truc nunuche comme t'avais dans les mains plutôt.

Tu grimace alors que ton épaule cogne contre l'étagère. T'as pas fait attention, c'est ta faute, ta trébuchée sur ton soulier (et puis il faisait quoi ton soulier à être là, hein ?). Tu grogne et te masse l'épaule puis, passant une main dans tes cheveux, tu reporte ton regard sur les ouvrages devant toi. Tu marmonne doucement sous ton souffle, lisant et disant à voix haute, sans t'en rendre compte, les titres des livres. Soudain, un ouvrage attire ton attention. Tu sais pas de quoi ça parle, mais un livre appelé L'antique ouvrage du plus ouvrager des maîtres nains du monde de Pelanor doit être intéressant, non ?

Tu hoche la tête avec enthousiasme alors que tu te détourne pour retourner, toute guillerette, à ta place. Tu caresse ton arc du regard, t'assurant qu'il est toujours là, puis tu te plonge dans ta lecture. Tu dévora les pages avec joie et amour. Les proses, les phrases, la formulation... cet auteur est un dieu de l'écriture. Tu gémis presque d'impatience alors que tu tourne avec révérence les pages du bouquin. Un couinement d'indignation t'échappe lorsque t'entends quelqu'un faire tomber ses livres, quelque part derrière toi, mais t'y prête pas trop attention. Tu es bien trop absorbée par ton livre pour ça. Tu trépigne alors que tu lis la suite.

Soudain, une exclamation outrée t'échappe.

- Quoi ? Mais euh, mais pourquoi ? POURQUOI BORDEL ? ET LA FIN, ELLE EST OÙ HEIN ? LA FIN AVEC LE MEC QUI CRÈVE UNE FLÈCHE ENFONCÉE DANS LA BIDE ET SE VIDANT DE SON SANG EN AGONISANT ! RENDEZ-MOI MA FIIIIIIN !

Un tonitruant TA GUEULE se fait entendre et tu baisse la tête de gêne. Tu t'es emportée, tu l'avoue, mais t'as pas pu t'en empêcher. Cet auteur de malheur avait eu l'audace de terminer l'ouvrage sans dire ce qu'il se passait pour son personnage principal. IL AVAIT OSÉ QUOI ! Tu grogne alors que tu laisse tomber ta tête sur la table, pleurnichant presque.

Alors, faisant la moue, tu prends le livre en main et va le reporter dans les rayons. Tu te rends compte alors, en te levant, que t'es plus toute seule. Une autre femme est installée, pas très loin de toi et, elle aussi, elle est plongée dans son bouquin. Un léger sourire aux lèvres, tu sautille alors que tu vas mettre le livre dans l'étagère. En revenant vers ta place, tu entends soudain l'autre femme se demander si elle peut emmener le livre.

Oh, c'est une bonne question. Tu regarde autour de toi et, un sourire curieusement requin aux lèvres, tu te dirige vers elle.

- Bonjour. Je ne te connais pas, tu ne me connais pas, mais j'ai entendue ta question et je sais qu'ont a pas le droit. Bon, on m'a jamais empêchée de faire ce que je voulais alors si tu veux, je peux prendre le livre avec moi et me sauver par la fenêtre devant nous. C'est pas une chute de cette hauteur qui va me tuer, j'ai déjà vécue bien pire. Toi tu sors par la porte principale ni vue ni connue et je te redonne ton livre à l'extérieur.

Si tu ne me crois pas, tu peux même prendre Lucy avec toi. Lucy c'est mon arc, cette merveille faite de bois blanc. Y'a même mon nom dessus, donc si tu le savais pas, moi c'est Sarandiel. Donc t'es partante ?

Tu l'avoue, tu viens de... vomir tes paroles. Le livre t'as tellement mise en rage que tu arrive plus à retenir ton filtre verbale et tu parle, tu parle. T'espère juste que l'autre devant toi a compris ce que tu lui as proposée, vu comment tu as parlée vite.

Les yeux de Marissa se lèvent vers l'inconnue, un de ses sourcils s'arquent de surprise. Vient-elle réellement de lui proposer de commettre un vol pour elle alors qu'elles ne connaissent absolument pas. L'arvèles ne sait pas quoi lui répondre, enfin si, mais elle met du temps à analyser toutes ces informations. Lucy c'est un joli nom pour une arme. Marissa se redresse pour faire face à cette étrange lectrice, l'incompréhension peut se lire sur son visage. Elle répond à voix basse :

- Ca ira, mais ... merci ... je suppose. Tu peux garder Lucy. Je vais juste recopier les passages qui m'intéressent ou déchirer discrètement une ou deux pages. Je cherche des informations sur les Gardiens pour obtenir leur protection pour mon compagnon. C'est une très gentille proposition, mais tu comprendras que je préfère restée discrète. En plus j'ai demandé ce livre à un bibliothécaire, s'il disparaît, ils ont ma description.

Si la jeune femme était au courant pour les règles de la bibliothèque de Saona, peut-être qu'elle connaissait aussi deux trois trucs sur les gardiens. Vue son approche, Marissa n'hésita pas à trop à lui demander :

- Tu viens souvent ici ? Par hasard, tu n'aurais pas déjà lu des choses intéressantes sur les Gardiens et leur mission de protéger les animaux ?

Elle avait les mains toujours posées sur le livre ouvert à un chapitre parlant du quotidien des Gardiens. Pour le moment elle n'avait rien trouvé de très concluant. Si elle ne pouvait compter que sur les livres, cela allait lui prendre une éternité de tout feuilleter. Peut-être que la voleuse de livres pouvaient l'aider, même si d'ordinaire Marissa préférait se tenir éloignée des voleurs, elle se dit que si le bien favori de celle-ci était les livres, elle ne devait pas être si dangereuse qu'elle le prétendait.

Quoi qu'elle ne l'aurait pas défié à sauter par la fenêtre, l'agilité des Anciens était légendaire et la peur du vie de Marissa paralysante. Pour cela, elle voulait bien la croire sur parole. Et puis elle s'était montrée si spontanée, que l'arvèles eut l'impression qu'elle pouvait se permettre de baisser légèrement sa garde. Elle lui avoua sans détour :

- Nubia a besoin de protection. Elle a terrorisé quelques villageois dans la forêt qui n'avaient jamais vue un dragon doré et surtout n'ont pas apprécié qu'elle s'en prenne à leur bétail.

Elle parlait toujours à voix basse, peu rassurée de parler aussi ouvertement de Nubia alors qu'elle essayait de la maintenir le plus éloignée possible de la ville. Mais si cette voleuse de livres était prête à se mettre en danger pour aider une parfaite inconnue, Marissa ne l'imaginait pas aller s'amuser à prévenir la milice qu'un dragon recherché était dans les parages.

T'es debout comme une idiote, tes mains bougent dans tous les sens alors que tu parle... tu parle toute seule et non, t'es pas folle. En fait tu marche de long en large en répétant tout ce que te dis ta vis-à-vis pour bien comprendre les enjeux. Ainsi, des informations sur les anciens, hein ? T'as pas grands infos, mais t'en sais un petit peu. Du coup, t'ouvre la bouche et tu prononce calmement tes paroles, continuant à bouger tes mains dans tous les sens... un peu plus et celle-ci se prenait un coup, d'ailleurs.

- D'accord, mais mon offre tiens toujours pour plus tard si besoin, même si je comprends la situation. C'est vrai qu'la vieille peau de l'entrée pourrait nous trouer le cul à coup de parapluie rose si ont fait pas gaffe... chui sûre qu'en vrai c'est un démon dans un corps d'humain. C'pas possible sinon, elle a des yeux partout... vraiment partout. Un jour j'me suis installée dans l'fond pour lire pépouze un livre et par mégarde bah il est tombée par la fenêtre... c'pas ma faute ok, j'ai sursauté. Bah c'te connasse elle est venue me voir en mode "Oh mais qu'est-ce que vous faite, c'est pas bien de voler les livres vous savez, ils ont une valeur, des émotions, des sentiments. Pour la peine vous allez me ranger cette étagère par ordre de couleur et par ordre alphabétique"... Un tyran c'te meuf.

Tu hoche la tête pour toi-même alors que tu zieute discrètement ta vis-à-vis. Hum, elle paraissait angoissée. T'espère que rien est arrivé de grave, mais comme elle a l'air sur ses gardes, t'oses pas poser de question. Puis t'es pas du genre à t'insérer dans la vie des gens d'habitude, donc t'ose pas trop non plus faire ta curieuse. Puis, t'entends un relent d'espoir dans sa voix quand elle te demande si tu connais des trucs sur les anciens. Tu soupire légèrement alors que tu lui fais signe que non.

Alors, des informations sur les anciens, hein ? J'suis désolé, j'ai quelques infos, mais c'est les trucs de bases. Ce qu'ils sont, où ils sont et euh c'est tout. Par contre je peux t'aider à éplucher les livres à disposition si tu veux. T'façon j'ai rien à faire donc tant qu'à tourner en rond, hein.

T'es même prête à aller voir la vieille pie pour lui demander des parchemins et des plumes pour écrire ce que vous allez trouver comme renseignement, si ça peut aider la demoiselle. Tu grogne légèrement alors que ton dos te tire et tu t'installe en tailleur par terre. T'y peux rien, t'aime bien ça, toi, le sol. Il est dur et froid... il te rappelle un peu ta maison, dans le fond. Puis un hoquet t'échappe en entendant la suite. Un dragon ? Un vrai de vrai dragon ?

- Un dragon ? Un vrai de vrai dragon ? Oh c'est trop génial. Elle est comment ? Elle a quel âge ? Mais la pauvre, pourquoi les gens ont peur d'elle ? J'ai quelques notions de soins si tu as besoin, je pourrais peut-être t'aider si elle accepte que je l'approche. Elle est douée de parole au fait ? Non parce que je sais pas parler le dragon moi, hein et j'voudrais bien rester entière si elle m'aime pas, tu vois ? Hahaha

Tu trépigne littéralement sur place. T'as bien envie d'hurler, mais tu te retiens, tu sais que si tu cri l'autre dégarnie du bulbe va venir te crier dessus... Alors tu reste calme, mais tu peux pas t'empêcher de bouger. Les bras, les jambes, le corps entier.

- Elle a mangée du bétail, hein ? La pauvre, elle devait avoir faim, tout simplement. Moi quand j'ai faim j'me retiens pas, alors j'vois pas pourquoi elle, elle devrait le faire franchement

Tu hoche la tête alors qu'un sourire, disons-le franchement, débile se peint sur tes traits. Un dragon, pour de vrai. Tes yeux brillent de milles feux, comme ceux des enfants devant une boutique de confiserie. Puis, t'entends la suite et tu saute pratiquement sur tes pieds.

- Protection ? Les villageois ont pas osés dire qu'ils allaient blesser cette magnifique créature, si ? Non mais ils se prennent pour qui ceux-là ? Même pas foutus de se protéger de chauves-souris et ils veulent blesser un dragon ? Mais j'vais aller les enculer à coup de corne de chèvre moi, ces hurluberlu du cerveau. J'peux vous prêter mains fortes si vous avez besoin. J'paraît peut-être pas forte comme ça, mais j'ai quelques capacités qui pourraient bien nous servir.

Tu souris grandement alors que tu regarde Lucy, ta fidèle alliée... ta seule amie.

Marissa se met sur la pointe des pieds pour regarder la jeune femme se poser sur le sol. Marissa n'a pas le temps de la remercier pour l'aide qu'elle propose que la simple évocation du dragon remet en route le flots de paroles de l'inconnue. Il n'y a pas à dire, elle ne manque pas d'énergie. Marissa elle s'assoit sur le rebord de la table après un bref regard vers les rayonnages pour s'assurer qu'il n'y ait pas de bibliothécaires. D'après ce que lui explique la jeune femme, ils n'ont pas l'air très agréable, pourtant le garçon a qui elle a demandé cet ouvrage lui a paru tout à fait aimable, quoi qu'un peu impressionné.

Assise près du livre qu'elle délaisse un instant, elle s’essuie machinalement les mains sur ses jambes en expliquant brièvement la situation de son dragon :

- Elle n'est pas blessée fort heureusement, mais c'est encore un jeune dragon, elle a à peine un an et demi. Et non elle ne parle pas.

Les réactions de l'inconnue font sourire Marissa, elle l'imagine se repaître d'un animal de ferme sans retenu. Comme un dragon, se jetant sur sa proie par simple envie de manger. Marissa retient son rire, mais ses lèvres s'étirent dans un large sourire jusqu'à ce que la jeune femme lui parle d'enculer à coup de cornes. Elle ne l'avait pas vu venir celle-ci et choque un peu Marissa qui a pourtant été élevé dans un milieu où la vulgarité faisait partie du langage commun. Elle même parfois ne se prive pas de parler franchement, mais venant de cette jeune femme qu'elle imaginait comme une lectrice assidue hyperactive, elle ne s'y attendait vraiment pas.

Décidément, cette jeune femme a l'air d'aimer se battre, ce qui plaît davantage à Marissa. Mais si elle s'est retenue jusqu'à maintenant d'user de la force pour régler cette situation, ce n'est pas pour craquer si près du but. Elle tourne le livre près d'elle pour le mettre dans le sens de lecture de l'inconnue. Il grince contre la table alors qu'elle l'approche du bord pour que la jeune femme au sol puisse le voir :

- Les chasseurs de la forêt ne sont pas à prendre à la légère. Forcément on a du se retrouver face à un village où ils étaient très présents c'est pour ça qu'on est parti au plus vite rejoindre la capitale. Il paraît que les Gardiens se réunissent régulièrement à l'arbre de Vie, mais c'est un endroit interdit pour le peuple, du coup je cherche à savoir s'il existe un autre endroit où je pourrais les rencontrer. Ou alors si c'est possible de réclamer une audience à l'arbre de Vie. Elle ajoute en pensant à voix haute. Je n'en ai strictement aucune idée.

Face à l'étendu des rayonnages Marissa désespère de trouver des informations à temps. Nubia ne va pas pouvoir attendre indéfiniment à la sortie de la ville. Alors, face à la gentillesse de la jeune femme elle finit par accepter :

- Si vous voulez bien lire ce bouquin. Un bibliothécaire que j'ai interrogé m'a indiqué l'étagère où se trouve les livres qui peuvent m'intéresser, je vais aller en chercher d'autres.

Marissa revient les bras chargés. Elle a bien l'intention de trouver comment rencontrer les Gardiens et cette aide inespérée lui redonne de la motivation. Seule elle avait l'impression de se noyer au milieu des manuscrits, là à défaut de réussir à aller vite, elle a au moins l'impression d'avoir la tête hors de l'eau.

- Merci pour votre aide, ... On ne se s'est pas présenté. Je m'appelle Marissa Iselk.

Elle baisse légèrement la tête en signe de respect et attendant de découvrir l'identité de la voleur de livres avant de se plonger dans un petit recueil "Le journal d'Alarick Lejeune". Il s'agissait d'un journal intime, un ouvrage extrêmement précieux, mais dont Marissa n'avait aucune idée de la valeur. Tout ce qu'elle voyait c'était un texte compliqué à déchiffrer et sans index pour rechercher facilement ce qu'elle voulait. La tache allait être vraiment plus compliqué qu'elle ne l'avait espéré. Et dire qu'elle se demandait en venant ici pourquoi elle n'allait pas souvent à la bibliothèque quand elle était à l'académie de Ferèsis. Maintenant elle se souvenait pourquoi.

Tu hoche doucement la tête alors qu'elle te parle. Tu souris, un air vaguement content sur le visage. Ça te rassure que cette grande bête ne soit pas blessée

- D'accord ça me rassure. Franchement la savoir blessée m'aurait fendue le coeur. Cette belle bête ne mérite pas de souffrir. Surtout pas pour la bêtise humaine. C'est pas grave si elle parle pas, tu dois bien réussir à te faire comprendre avec cette beauté sauvage, non ?

Tu hoche la tête avec enthousiasme à tes paroles. Tu sais très bien ce que la bêtise humaine peut faire. Tu souris en voyant ta vis-à-vis sourire. T'y peux rien, t'as toujours été comme ça, à sourire quand les autres le font. C'est dans ta nature.

Tu sens doucement ta peau commencer à te tirer, ça fait trop longtemps que t'es hors de l'eau et tu commence à le sentir. Tu te frotte doucement les bras et, alors que tu écoute ta compagne te parler, tu commence doucement à te gratter. C'est un mouvement inconscient.

- Oui je sais bien, mais nous devrions bien arriver à détourner leur attention quelques instants, non ? Je t'aiderais bien à les trouver, mais je ne connais rien aux anciens, je suis désolé.

Tu continue doucement à frotter ta peau alors que tu gigote légèrement. Un léger filet de sang s'échappe de ta peau, mais tu t'en rends pas compte.

- Pas de soucis, je vais faire cela. Si ça peut vous aider, ça me fait plaisir.

Tu souris et te lève. Voyant le sang sur ta main, tu grogne et, t'essuyant sur tes pantalons, tu te dirige vers la table afin de t'y installer. Tu prends le livre en main et tu es assez surprise par son poids, c'est qu'il est pas léger le bigorneau. Il est parcourut de fines lisières dorées sur les contours, c'est d'une sublimessences.

Tu te tourne vers ta vis-à-vis alors qu'elle te parle de nouveau. Ainsi, elle s'appelle Marissa hein. Tu souris alors que tu te présente à ton tour.

- Pas de problème, ça me fait plaisir. Enchantée Marissa, moi c'est Sarandiel. Sarandiel Micah.

Tu imite le hochement de tête de ta vis-à-vis, légèrement maladroite dans ta gestuelle. Tu te replonge vite dans le bouquin, des volutes de poussières s'en échappant alors que tu tourne les pages. Tu remarque vite que Marissa a quelques difficultés avec son livre alors, pleine de sollicitude, tu lui pose la question.

- Est-ce que tout va bien ? Le livre te donne du mal ?

- On ne se parle pas vraiment, mais on se comprend. C'est difficile à décrire.

Marissa ne remarque pas le sang sur les ongles de la jeune femme. Alors qu'elle lui explique pour le village, l'inconnue lui propose un nouveau plan plutôt douteux pour rentrer dans l'Arbre. Pour proposer une telle folie, elle ne doit effectivement pas connaître grand chose des anciens. Marissa en viendrait presque à se demander si elle est même humaine pour ne pas connaître le sort réservé à ceux qui osent pénétrer dans cet endroit sacré.

Enfin, elle même ne sait pas vraiment ce qui pourrait l'y attendre, mais elle a entendu d'horribles histoires qui lui ont passé l'envie de s'y infiltrer en douce. Surtout qu'elle recherche leur aide, pas sûrs qu'ils se montrent accueillants envers son dragon s'ils se faufilent comme des voleurs.

Heureusement elle finit par accepter de l'aider à feuilleter ces vieux livres poussiéreux. L'arvèles lui en est très reconnaissante, elle-même n'aurait jamais prêté ainsi assistance à quelqu'un dans sa situation. Essayant de déchiffrer l'écriture de Lejeune, elle souffle à plusieurs reprises. Elle plisse les yeux pour essayer de mieux voir, mais rien n'y fait. Certaines pages ont été écrites à la va vite et sont presque indéchiffrable. Elle jette le livre vers la pile qu'elle a ramené quand Sarandiel, toujours aussi prévenante, lui demande si elle s'en sort.

Toujours assise sur le bord de la table, Marissa se penche pour attraper un autre livre et lui répond avec une pointe d'agacement :

- C'est un journal intime, le gars qui l'a rédigé n'a pas cherché à s'appliquer et il y a des pages entières qui ne sont que des dunes de sable pour moi. Je vois des boucles et des points, mais pas de lettres...

Elle lit le titre du volume qu'elle a saisi :

- Les cérémonies de l'assemblée des Gardiens, j'aurai peut-être plus de chance avec lui.

Marissa glisse de la table et s'installe en face de Sarandiel. Elle voit alors des petites traînées sur son pantalon qu'elle suppose être du sang quand elle s’assoit et voit les ongles rougies de la jeune femme. Elle a du se faire cela quand elle se grattait, visiblement cela doit vraiment la démanger. Ne voulant pas l'embêter, Marissa lui demande :

- Tu es blessée ? Si tu as besoin d'aller voir un apothicaire ne t'en fais pas pour ça. Dit-elle en regardant les livres accumulés sur la table. Et va te soigner.

Est-ce parce qu'elle s'est montrée prévenante envers elle, à cause de sa potentielle blessure ou simplement parce qu'elles ont échangé leur nom que Marissa se met naturellement à tutoyer cette personne qu'elle vient à peine de rencontrer. C'est sûrement un peu de tout cela.

Tu souris alors que Marissa te dit qu'elle se comprenne. Heureusement. Dans ta tête t'étais déjà en train d'imaginer ta vis-à-vis faire une grande et grosse gestuelle pour que sa dragonne comprenne. Un léger rire, que tu réprime, veut sortir. Mais tu te retiens, tu veux pas trop qu'elle le prenne mal. Du coup tu souris largement en hochant la tête.

- Oui, j'imagine que tant que nous n'aurons pas vécue la même situation, nous ne pourrons pas comprendre. L'essentiel étant que vous vous compreniez, toutes les deux.

Tu souris doucement alors que tu te replonge dans l'ouvrage. T'as beau le feuilleter, rien d'intéressant n'en ressors. Ils ne disent pas commenter contacter les anciens. Leur régime alimentaire, l'arbre de vie, tout ça ils en parlent. Mais le reste ? Nada. Niet ! Tu souffle d'agacement alors que tu tourne les pages. Seulement toutes se ressemble. Rien ne ressors de celle-ci. Tu finis alors d'arriver à la toute dernière et un détail incongrus t'attire l'oeil malgré toi et tu en sursaute.

- Quoi ? Ils ont arrachés trois pages ? Mais comment je fais moi, alors, pour lire la suite ?

Tu grogne de dépit alors que tu ferme l'ouvrage et te frotte les yeux, lasse. Tu soupire et fini par te tourner vers Marissa lorsqu'elle te réponds. Un journal intime, hein ? C'est vrai que doit pas y avoir grande indication de temps, mais si c'est un journal intime, tu trouve ça un peu normal. Tu hoche doucement la tête et tends la main vers celui-ci.

- Pas que je serai meilleure que toi pour le déchiffrer, ne te méprends pas. Mais tout livre est bon à lire pour trouver l'information requise. Et si plonger dans ce journal intime et en déchiffrer son contenu est nécessaire, alors soit. Oui, peut-être que ce livre pourra t'apporter des informations, le titre semble en faire mention néanmoins.

Tu lui souris doucement, apaisante. Tu sais que ça peut être rageant ne pas comprendre le contenu d'un bouquin alors que tu en as besoin.

Puis, une phrase de celle-ci t’interpelle. Merde, alors elle s'en est rendue compte. Tu espère juste qu'elle n'a rien contre ta race alors que tu lui réponds, légèrement penaude.

- Non, ça va je te remercie. Je commence juste à manquer d'eau. Étant une Héléos si je reste trop longtemps en-dehors de l'eau je commence à le ressentir et c'est ce qui est en train d'arriver en ce moment. Ça va aller, ce n'est pas quelques jours de plus qui vont me tuer.

Tu lui souris en replongeant dans le journal intime. Hum, un détail attire ton regard. Sur la tranche du livre, de toutes petites annotations ont été écrites. Un carré, un triangle et un cercle. Tu suppose que c'est un genre d'index ou quelque chose comme ça. Curieuse, tu passe doucement la pulpe du doigt sur le titre de la page puis sur les côtés. Une exclamation ravie t'échappe lorsque tu sens, sous ton touché, un léger relief en forme de cercle. C'est bien un index. Sauf que tu sais pas encore ce que ça signifie.

Tu parcours alors les pages alors que tu fais le signe doucement dans l'air. Le mouvement attire ton regard et tu remarque quelque chose inattendue. Le cercle est légèrement biscornu, comme si un chiffre était imprimé dans le relief. Tu refais doucement le mouvement et tu tilte. Un 3, c'est un cercle formant le chiffre trois. Tu souris largement alors que tu continue ta lecture.

- Je crois que je viens de trouver comment il annote ses pages.

Tu tourne doucement le journal vers Marissa alors que tu lui pointe chaque élément dont tu parle.

- Regarde, ici, sur la tranche du livre. C'est tout petit alors si tu l'as manqué ce n'est pas de ton fait. Il y a trois symboles. Un carré, un cercle et un triangle. Ensuite, regarde ici. Passe doucement ton doigt sur le troisième carré tout à droite. Tu sens un léger relief de cercle, non ? Eh bien, tu peux constater que celui-ci est légèrement déformé. Alors, fais comme moi.

En disant ça, tu lève ta main droite et tu forme doucement, dans les airs, le symbole que tu viens tout juste de toucher. T'espère juste que Marissa ne t'en voudra ou qu'elle ne s'en voudra pas trop d'avoir vue ça et elle non.

Sarandiel décide d'essayer de déchiffrer le journal intime et Marissa la remercie de faire autant d'efforts pour l'aider. Elle l'a rassuré par rapport à ses ongles rougis par le sang et savoir qu'elle est face à une héléo enchante l'arvèles qui a toujours été fasciné par le peuple des océans. Si elle n'était pas obnubilée à l'idée de trouver un moyen de rencontrer l'assemblée des Gardiens, elle l'aurait inondé de questions à coup sûr.

Son regard est plongé dans le petit volume qu'elle lit, elle ne reste pas en place sur sa chaise et se tortille dans tous les sens. Elle croise les jambes, les décroise, sa main droite soutient sa tête alourdie par la lecture, elle finit par s'étirer pour essayer de se réveiller quand Sarandiel semble avoir trouvé quelque chose.

Elle lâche tout de suite sa lecture et lève les fesses pour se pencher vers le journal intime pour voir les symboles que lui montre Sarandiel. Ses mains sont trop caleuses pour sentir ce genre de détails et puis même si elle les avait repéré, elle les aurait prit pour de simple décorations. Elle est bien heureuse d'avoir accepté l'aide de l'héléo. Sarandiel lui demande de passer le doigt dessus. Elle le fait et en effet, en prêtant bien attention on les remarque. Marissa s'attendait à ce qu'elle lui explique leur signification, mais à la place elle lui demande de faire quelque chose de très bizarre.

À nouveau son sourcil droit s'arque de surprise :

- Comment ça ?

Du bout des doigts, Sarandiel trace la forme devant elle. Marissa ne sait pas trop quoi faire et suit maladroitement le mouvement de l'héléo. Elle ne sait pas à quoi s'attendre, est-ce un mécanisme pour déchiffrer le livre ? Ce livre doit être bien plus précieux qu'elle ne l'avait imaginé. Il doit y avoir des informations capitales à l'intérieur. Marissa ne dit rien, elle attend que l’impensable se produise.

Sans décrocher du regard Sarandiel et le journal intime, elle attrape son crayon et une feuille en espérant que ce mystérieux bouquin leur révèle les petits secrets des Gardiens.

Tu penche lentement la tête à droite et à gauche alors que tu essaie de voir si Marissa comprends ce que tu lui montre. Tu souris doucement quand tu constate qu'elle ne comprends pas. Tu re-tends doucement la main alors que tu refais le mouvement et, du coup, tu lui explique.

- En fait, quand tu forme le symbole, tu as comme la continuité d'un chiffre dessous. Si tu refais deux ou trois fois, tu peux vite voir que c'est, en fait, le chiffre trois. Bon, par contre je t'avoue que ça, j'ai toujours pas compris ça servait à quoi haha.

Tu grimace doucement en te frottant le derrière de la tête alors que tu lui avoue ça. Peut-être pas si utile, finalement, comme déchiffreuse. Tu finis par soupirer légèrement et tu continue à aider ta vis-à-vis à comprendre le journal intime. Une exclamation t'échappe alors que tu tourne la page.

- Regarde, les symboles sont dans une ordre différent. Tout à l'heure c'était cercle, triangle et carré. Cette fois, c'est cercle, carré et triangle. Est-ce que ça a une signification particulière ? Le symbole signifie peut-être une partie de sa vie ?

En disant ça, tu penche ta tête de tous les côtés, espérant avoir une illumination soudaine. Sauf qu'à part te donner un bon mal de coeur, ça fait rien du tout et t'as l'air d'une idiote complète. Tu ris légèrement tout bas devant ta stupidité puis tu te replonge avec Marissa dans le carnet.

- Comment veux-tu qu'ont s'organise ? Une de nous deux cherche les symboles et l'autre les écrits ?

Ta voix sonne légèrement distraite alors que, en disant ça, tu continue de doucement essayer de déchiffrer le contenu de la page devant toi.