Manaka avait suivi à la lettre les explications de la liare. Apporter un bout de tissu propre, fait. Alcooliser la plaie pour la désinfecter, fait. La jeune alchimiste avait tout réalisé avec une concentration extrême. Pourtant, le pire restait à venir... Brûler l'aiguille maintenant. Avec la flamme d'une bougie, elle n'ira pas très loin... Serait-ce le moment d'utiliser sa Vérité ?

Elle n'avait pas le choix de toute façon. Elle approcha sa main d'une bougie qu'elle avait allumée et absorba la chaleur qui émanait d'elle... Même toute sa chaleur vu la mèche s'éteint. Elle se concentra sur l'aiguille qu'elle tenait pour transférer suffisamment de chaleur pour que le métal rougisse. Elle inspira profondément, et expira lentement. Il faut le faire calmement. Elle n'avait aucune envie de provoquer une explosion dans un endroit aussi exigu. Même si elle ne pense pas avoir accumulé assez d'énergie pour déployer sa Vérité au summum de sa puissance, elle n'était jamais assez prudente. Après tout, son pouvoir restait assez sauvage pour elle.

Après une concentration extrême, l'aiguille rougeoie avant de reprendre sa couleur quand Manaka lâche la pression. Elle avait réussi ! Elle n'a pas pu s'empêcher de lâcher un sourire de fierté. Maintenant, du fil. Elle n'avait pas le temps de fêter sa victoire personnelle. Elle en trouva dans la trousse de secours. Elle avait rassemblé tout les éléments.

« Shoote toi... je pense que ce sera mieux. »

Jamais elle n'aurait cru dire ça, mais de toute façon, elle ne voyait pas de meilleure situation. Quitte à ce qu'elle ne pouvait plus l'aider, autant qu'elle ne ressorte rien. Car Manaka a beau être douée pour coudre des vêtements, elle n'est vraiment pas sereine quand à recoudre la peau de quelqu'un... Elle s'arme de l'aiguille désinfectée et du fil et prend une grande inspiration.

Bon bah... c'est parti ?

Elle noua le bout du fil et s'approcha de la plaie. Mon dieu, que ce n'est pas beau ! Mais la jeune fille s'arma de courage. Elle ne pouvait pas faire la faible ici ! Avec sa main libre, elle approcha les bords de la peau de sa compagne et piqua l'un d'entre eux. Elle souffla tout l'air qu'il y avait en elle. Elle avait la trouille ! La sensation est totalement différente de la couture qu'elle réalise habituellement, celle où elle est à l'aise. Elle avait tellement peur de piquer dans la chair ! Peut-être le fait elle déjà ? Ivinea ne réagissait pas. Tant mieux elle suppose ?

Manaka continua sur sa lancée. Elle réussit à faire un premier noeud. Elle n'arrive toujours pas à croire ce qu'elle est en train de faire. Comment arrive t'elle à trouver tout ce courage ? Non, elle ne devait pas se poser de questions. Elle y arrive tant mieux. Elle ne doit pas lâcher.

Au final, l'alchimiste réussit à trouver son rythme et termina le dernier noeud. Elle observa le résultat et s'assit par terre, la tension évacuée. Le rendu ne semblait pas si mal, du moins, pour une première. Ivinea semblait être toujours dans les vapes, mais elle saura mieux évalué le résultat qu'elle.

En attendant son réveil, la jeune liare décida se s'attaquer au feu de cheminée. Le coup de l'aiguille lui a donné confiance en sa Vérité. Elle avait pensé à utiliser la bougie directement, mais cela ne serait pas suffisant compte tenu de l'état du bois. Elle attrapa son sceptre et tendit sa main vers les bougies. Elle absorba les flammes, en en laissant une d'allumée. On ne sait jamais, si elle n'y arrive pas, il vaut mieux en garder une au cas où.

Elle concentra ensuite cette énergie dans son sceptre. Puis elle le pointa vers le bois et relâcha ce qu'elle avait stocké. Une onde rouge sorti de son arme pour s'écraser contre les bûches. Des étincelles avaient jailli puis plus rien. Manaka allait baisser les bras quand le feu se mit à crépiter. Elle avait réussi ! Décidément, cette aventure lui en faisait faire des choses !

PS:

Ivinea ne peut s’empêcher de ressentir une vague de soulagement quand Manaka lui dit de prendre l’anti-douleur. Parce qu’honnêtement, elle se sentait vraiment exténuée et n’avait pas la force de supporter encore plus de douleur ? Ou peut-être que si ? Une chose était sûre, elle n’avait aps envie d’essayer. D’ici à ce que sa Vérité fasse encore des siennes et la vide du peu d’énergie qui lui restait (la tuant au passage). Elle n’avait pas franchement envie de mourir tout de suite. Elle n’était pas assez mal en point pour ça et avait envie de voir le monde. Et puis à tous les coups, ça ferait paniquer la petite qui tentait tant bien que mal de l’aider.

Ce fut donc sans regrets qu’elle prit une bonne gorgée de l’opiacée. En moins de temps qu’l ne faut pour dire « Manger », la chasseresse était loin, très loin. Dans un pays imaginaire ou les gens flottaient sur des petits nuages en rigolant. Elle dut s’évanouir à un moment, sans s’en rendre compte.

Vide.
Tout est noir.
Le monde est léger comme une plume d’oisillon.
Penser est impossible, les rêves emplissent sa tête.
Une douce chaleur l’environne…

Le monde commence doucement à reprendre forme autour d’elle. La logique des choses reprend un cours normal, les arrondis redeviennent des angles et la douleur recommence doucement à faire son apparition. Lorsque ses yeux s’ouvrent à nouveau, la chaude lueur rougeâtre d’un foyer lui brûle les yeux. Son cœur fait boum boum dans sa tête et elle se sent tellement lourde. La chaise sur laquelle elle est assise (effondrée serait peut-être plus exacte) lui semble beaucoup trop agressive. Elle ne rêve que d’une chose, retrouver son monde de coton et échapper à ce qui ressemble fortement à une mauvaise gueule de bois. Redescendre sur Madelle est une expérience difficile, douloureuse, presque comme une seconde naissance et elle se met à pleurer bêtement, sans comprendre ce qui la rend si triste. Sa maman qu’elle n’a jamais connue lui manque, elle voudrait revoir une nouvelle fois cet aigle qui a voulu lui arracher la tête pour s’être trop approchée de son nid, dire à l’armée qu’ils sont tous méchants.

Peu à peu, elle recouvre ses esprits et rebranche progressivement ses neurones. Elle peine à se souvenir où elle est et ce qu’elle fait là, remarque difficilement la présence de Manaka devant le feu, constate lentement qu’elle a été recousue… et finit par s’endormir, pour de vrai cette fois.

Quand elle se réveilla à nouveau, son esprit était nettement plus clair, ayant éliminé la majorité de la drogue qui l’embrumait. Le foyer n’était plus que braise, et un nouveau jour s’était levé. Elles avaient bien fait de chercher un abri, elles avaient pu passer la nuit ici sans trop craindre le froid et les prédateurs. Elle fit un bref point sur sa situation. Elle se sentait beaucoup mieux, même si son flanc la lançait. Elle l’examina rapidement, et constata que Manaka avait fait un boulot convenable. C’était pas du grand art mais c’était largement suffisant et ça devrait faire une cicatrice pas trop moche si elle ne déchirait pas les points. Elle se retourna pour l’annoncer à la principale concernée, sans trop de bruit pour ne pas la réveiller si jamais elle était elle aussi endormie.

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Le sommeil d’Ivinea était lourd et pourtant agité. Manaka l’avait entendu pleurer à plusieurs reprises, râler aussi. Mais l’alchimiste n’a pas osé s’approcher de sa compagne. La jeune liare ne voulait pas s’immiscer dans ce qui la troublait. Et puis, elle était fatiguée. Elle n’avait fait que marcher sur de la pierre froide, après être sortie de la galerie du serpent géant. D’ailleurs, cela faisait combien de temps qu’elle n’avait pas dormi ? Plus de vingt-quatre heures, elle en était certaine. Maintenant qu’elle était auprès de la chaleur du feu, elle se sentait enfin en sécurité. Elle n’était plus en état d’alerte. Alors, elle saisit une couverture, s’enroula dedans et s’allongea à même le sol, devant le feu qui crépitait.

Un murmure et un rayon de soleil vinrent sortir des limbes la jeune liare. Sa fatigue avait fait qu’elle s’était endormi très vite, et ce malgré le fait qu’elle a dormi directement sur des dalles en pierre froides et poussiéreuses. Jamais elle n’a dormi avec si peu de confort. Elle a toujours eu un lit, ou au moins une surface moelleuse pour s’allonger et ce même s’il fallait camper. Elle avait mal partout et son corps ne voulait pas bouger. Il lui fallut plusieurs minutes avant de pouvoir étendre ses jambes et se mettre sur le dos et s’étirer. Elle n’avait pas l’impression de s’être reposée tellement elle se sentait courbaturée. Pourtant, un nouveau jour s’était levé et elles ne pouvaient pas rester ici.

Elle se redressa en grommelant. Manaka n’a jamais été du matin, mais là c’était bien pire. Elle regarda Ivinea et jeta un œil à son genou. Visiblement, elle avait réussi, la plaie ne s’était pas rouverte. Mais elle n’avait pas assez d’expérience pour juger si son travail était assez bon. Au vu de ce que lui a annoncé la chasseuse, c’était plutôt pas mal.

Elle n’avait rien sur elle et elle savait qu’il n’y avait rien à manger dans l’abri. Manaka ne voulait pas non plus perdre plus de temps ici. Malheureusement, elle ne connait pas la région, et les cartes qu’elle avait amenées sont dans sa besace, qui est aux mains des soldats. Elle ne pouvait compter que sur l’autochtone, en espérant qu’elle soit rétablie.

« Il ne faut pas qu’on reste ici si on ne veut pas augmenter nos chances de se faire repérer… Mais je n’ai aucune idée de l’endroit où on peut aller sans mes cartes… »

Encore une fois, elle avait ce sentiment d’être inutile. Mais que pouvait-elle y faire ? Rien. Heureusement qu’elle a réussi à garder son sceptre. Sans lui, elle serait bien perdue. Elle le prend et l’attacha dans son dos, afin de faciliter son transport. Elle indiqua aussi à la féline de récupérer tout ce qui peut lui sembler utile. Après tout, la route qu’elles vont emprunter lui est inconnue et elle ne sait pas quels dangers elles vont rencontrer.

PS: