Niklaus contemplait la route sans même la voir. Il n'avait pas les idées claires, pour être honnête, il ne savait même plus quelle ville il avait quitté dans cet état. Il avait passé la soirée à boire, pas dans le sens où il s'était amusé avec quelques copains de beuverie pour passer une agréable soirée, non, lorsque Niklaus buvait, c'était seul assis à une table au fond de X taverne, jusqu'à ce que son corps ne puisse plus tolérer une goutte d'alcool. Pour oublier. Peut-être pour passer à autre chose, l'espace de quelques heures.
Qu'est-ce qu'il voulait oublier ? La tête de son frère roulant sur le sol des montagnes de Saphir, le visage rouge et gonflé de sa soeur dans la boue, le corps de sa femme quand il l'avait trouvé. Tous ses rêves perdus, volés et brisés.

Où il se rendait ? A Krik. Pourquoi ? On la vantait comme une ville où chacun était accepté tel qu'il était. Peut-être y avait-il de la place pour un meurtrier qui avait déserté son armée ?
Son cheval avançait plutôt lentement sur une route cernée par une prairie. Tout à coup, l'exilé aperçut plus loin une charrette à l'arrêt. Son côté courtois le poussa à aller vérifier ce qu'il se passait. Un homme d'une quarantaine d'année et son cocher s'évertuait à remplacer une des roues dont les rayons avaient cassé.

-Allons messieurs puis-je vous aider ?

-Avec joie mon brave !

Niklaus plaça ses mains sous l'arrière de la charrette, le cocher faisait de même sur le côté, l'homme d'âge mûr, lui, s'apprêtait à placer la roue. Ils comptèrent jusqu'à trois et l'opération fonctionna pour le mieux.
Très heureux de cette réussite, les trois hommes échangèrent plusieurs poignées de main.

-D'où venez-vous mon ami ?

-Krik, nous fuyons les affrontements.

-Quels affrontements ?

-Comment ? Vous n'êtes pas au courant ? La ville est en panique depuis les récents événements. Tout le monde est suspecté, des familles et des amis se déchirent. Ma famille et moi allons nous mettre en sécurité avant que la situation ne dégénère vraiment. J'ai peur que Krik ne se déchirent dans la violence, et ce, sous peu de temps...

Niklaus fronça les sourcils. Partout où il allait, la violence le suivait. Mais pouvait-il laisser des villes se déchirer, des familles fuir la violence sans rien faire ? Non, c'était dans sa nature, dans son sang. C'était un homme d'action et d'honneur. "Quand on peut faire quelque chose pour aider les gens, on a l'obligation morale de le faire", pensa-t'il.
Il serra une ultime fois la main de l'homme et aida sa femme à remonter en voiture. Enfin, il vit arriver un petit garçon de 4 ou 5 ans. Il le saisit sous les épaules et le fit rentrer dans la charrette.

-Que les dieux vous bénissent l'ami !

Et la charrette reprit la route. Niklaus la regarda s'éloigner et lorsqu'elle fut hors de vue, il remonta en selle, les idées soudain très claire. Il frappa un bon coup les flancs de son cheval d'un coup de talons et celui-ci repartit au galop. Il prit la route pour Krik, prêt à affronter son destin.