La vie de Vaëna n'a que peu d'intérêt dans ses débuts. Jeune enfant élevée dans une tribu par des femmes aimantes, des hommes absents, au milieu d'autres jeunes abandonnés à leur sort, Vaëna n'a jamais voulu rester dans les rangs. Alors qu'elle devait apprendre la tenue d'un camp, la façon de fabriquer des vêtements, ou encore les plantes à cueillir pour préparer le repas, la petite fille préférait rester avec la doyenne, qui savait, elle, reconnaître les bêtes, tracer leur piste, et qui pouvait apprendre à Vaëna la façon de les tuer sans souffrance, dans le respect total de la Nature. C'était mille fois plus intéressant.
Malgré les soupirs des femmes de l'enseignement, et le non-respect des consignes, personne ne pouvait rien dire à celle qui devint la protégée de la doyenne.
Vaëna grandit donc dans l'esprit de lien intense avec la création de Mère Nature, ces êtres de chair et de sang qui coexistaient avec les humains. Il était tellement intéressant de réussir à les comprendre malgré la difficulté de la langue. Un geste, un regard, un sifflement permettait aux animaux de transmettre des milliers d'émotions, alors que les humains usaient de mots. C'était tellement dérisoire.
Et puis, le jour de ses quatorze ans, ou quelques jours après, Vaëna s'enfuit. Elle avait appris tout ce que la doyenne pouvait lui apprendre, maintenant c'était à elle seule de découvrir les secrets de la nature, directement dans la nature elle-même.
Elle rencontra des gens de passage, sur les routes. Elle se fit des amis, qu'elle quitta rapidement. Les routes sont peuplées d'individus de toutes sortes. Elle se présentait comme Vaëna, de la tribu d'Orun. De toute façon, qu'importe qu'elle eut un nom, ses parents n'étaient que deux personnes quelconque de la tribu. Ils pouvait tout autant être Livia et Noé, comme Alem et Vinch, qui savait ? Le principal était qui elle était elle. Vaëna, la chasseuse de la forêt. L'ombre des feuillages.
Un jour, elle surprit des chasseurs en train d'attraper une proie. D'une façon ignoble. Il ne devrait pas être permis à des humains de traiter les animaux de la sorte. Le sang coulait, le tigre souffrait, essayant de se défendre à coup de griffes ou de crocs. Ce spectacle mit Vaëna dans une fureur telle qu'elle devait sauver cette bête. La rage l'aveugla et elle aurait fait n'importe quoi pour venger l'animal de ses chasseurs. Sans réfléchir, elle sortit son arc et décocha une flèche, qui se logea instantanément dans le mollet d'un des agresseurs. Une seconde atterrit dans l'omoplate d'un autre. Les hommes ne comprirent pas ce qu'il se passait. Une seconde d'inattention. C'est ce qui permit à l'animal couleur de feu de se dresser sur ses pattes arrière et arracher la poitrine de l'un des chasseurs. Ses deux compagnons, blessés par les flèches, n'attendirent pas plus pour s'éloigner, voyant soudain quelques côtes sortir de leur compagnon...
Les hommes fuirent, blessés, le tigre s'effondra, meurtri, fatigué de son dernier élan. Vaëna en profita pour s'agenouiller près de l'animal, et panser ses blessures du mieux qu'elle put. Après de longues minutes, le combat sembla vain. L'animal ne survivrait pas. Vaëna préféra l'achever plutôt que de le laisser agoniser. Elle attrapa sa dague et la planta dans son cou, à un endroit où le souffle serait coupé en moins d'une seconde. Elle déposa la dépouille du tigre près d'un arbre, et c'est là qu'elle le vit. Un tigron. De quelques mois à peine, allongé au pied de l'arbre. Un sourire sur le visage, et un vague à l'âme, la jeune femme se promit de prendre soin de cette petite boule de poil.
C'est ainsi qu'elle et Len continuèrent leur aventure ensemble. Ils étaient inséparables. Il l'aidait à chasser, elle lui permettait de survivre, lui apprenant les rudiments de survie en territoire inconnu. Leur duo était soudé.

Depuis, Vaëna vit de petit boulot en petit boulot, cherchant un contrat sur la tête d'un animal sauvage, débarrassant les villages des vermines, trouvant les bêtes horrifiant les autres. Bref, la chasse à l'état pure.