Ça devait bien finir par arriver. [Yn'Kye]

Ça devait bien finir par arriver.

Oh par tous les Dieux de Madelle, merci.

Mon troisième jour de voyage venait d'arriver à son terme, et avec lui le salut de mes fesses, de mon dos, de mes cuisses... et de tout le reste. Si mon premier jour de voyage à travers les plaines s'était somme toute remarquablement bien déroulé, il n'en fut rien de ma première nuit, ni de la suivante. Habituée à dormir sous l'eau, en apesanteur, supporter le poids de mon propre corps pour dormir était déjà bien assez étrange comme ça sur un matelas... mais à même le sol, c'était carrément devenu une véritable torture.

Étendue sur ma paillasse de fortune, un édredon pourtant moelleux à première vue, disposé sur un lit d'herbe à priori tout aussi moelleuse... j'avais été incapable de trouver le sommeil, constatant au bout de quelques minutes seulement à quel point la terre était dure en dessous. Ces nuits avortées, combinées à la douloureuse brulure de mes muscles peu habitués à de longues chevauchées (ou à chevaucher tout court, d'ailleurs), avaient eu raison de mes pauvres forces, et à présent que j'entrais dans la première bourgade que je croisais depuis mon départ de Thalis, je bénissais d'avance le doux matelas de la chambre d'auberge que je prévoyais de louer sur le champ.

Trouver l'établissement ne fut pas difficile, et une fois ma jument confortablement installée aux écuries et ma nuit réglée, je m'autorisais à me laisser choir sur mon lit pour quelques instants. Mais mon estomac criait famine, et comme en témoignait le concert de rires gras et de conversations bruyantes dans la salle principale, j'arrivais juste à temps pour le dîner. Affamée, je réclamais auprès d'une serveuse n'importe quel plat pourvu qu'il soit exempt de viande rouge, puis j'attendis d'être servie en balayant la foule d'un regard absent, accoudée sur la table, le menton dans la main.

Un bref contact mental m'appris que Bonnie se goinfrait d'avoine dans sa stalle, ce qui m'arracha un léger sourire, mais notre lien fut brusquement interrompu alors que je sentis qu'on tirait ma tresse en arrière.

- Hey !! protestais-je avec virulence en attrapant ma tresse pour tirer dessus à mon tour et l'arracher des mains de l'homme qui s'amusait avec. On ne vous a jamais enseigné de manière plus délicate pour entreprendre une femme ?... demandais-je sèchement en ramenant mes cheveux sur mon épaule.
- Mais c'est qu'elle est encore plus jolie vue de face, en fait, rétorqua t-il avec un rire gras. C'est pas souvent ça, généralement, leur arrière train est leur meilleur profil...

Et de soulever une cascade de ricanements tous plus graveleux les uns que les autres. Les ignorant ostensiblement, je me détournais pour attendre mon repas, d'humeur maussade - ma parole, je n'ai pas encore rencontré un seul humain de sexe masculin qui ne soit pas un gros tas de muscle sans cervelle, ou du moins une cervelle qui se situe au-dessus de la ceinture. Mais je relevais un regard surpris en sentant le banc de ma table glisser en arrière, et je me retrouvais soudain cernée par deux gaillards ivres morts, dont celui qui venait de si gentiment proposer sa cour.

- Laissez-moi tranquille !! m'exclamais-je sèchement en me relevant aussitôt pour changer de table et me soustraire à leur compagnie.
- Héla, héla, où tu crois aller comme ça ma mignonne ?... m’apostropha un des deux acolytes en me rattrapant par la manche de ma tunique, avant de me rasseoir de force sur le banc. Tu ne vas nulle part tant que tu ne nous as pas donné un baiser chacun, expliqua t-il avec un regard lubrique.

Ben voyons, plutôt embrasser Bonnie !

- Certainement pas, lâchez-moi maintenant et trouvez-vous quelqu'un d'autre à embêter !!
- Mais c'est qu'elle se fâcherait en plus ! s'exclama le tireur de cheveux. Je pense qu'elle aurait besoin d'une petite leçon, qu'en dis-tu Murtag ?...
- Aye... c'est comme les pouliches ça, ça a besoin d'une petite piqure de rappel de temps en temps, pour se souvenir de qui est le maitre...

M'empoignant chacun par un bras, il me relevèrent sans effort et me firent passer par-dessus le banc pour m'entrainer vers les chambres. Répugnée par leur odeur et leur aspect, un mélange d'alcool rance et de barbe mal taillée, je me débattis comme une diablesse, mais personne dans la foule alcoolisée n'esquissa un geste pour me venir en aide, y compris la serveuse qui nous regarda passer en détournant le regard, mon assiette disposée sur son plateau. Il faut dire que mes agresseurs, bien que fortement avinés, étaient tous les deux baraqués et solidement armés - personne ne devait avoir très envie de se mettre en travers de leur chemin... et je sentis les doigts glacés de la peur commencer à me caresser l’échine alors que nous allions franchir le seuil de la salle commune.

Il fallait que je trouve le moyen de me débarrasser de ces deux grands crétins avant de me barricader dans ma chambre pour la nuit... mais, immobilisée comme je l'étais, pour l'instant, c'était sacrément mal parti...

La soirée avait été calme, beuveries et rigolades, quelques coups donner mais rien d’alarmant. J’avais remarqué un petit trio plus enivré et turbulent que les autres. L’un deux avait cependant déjà trop bu pour se déplacer, et apparemment cela avait suffi à fixer les deux autres dans un coin du bar avant qu’ils ne fassent une bêtise. Je n’aimais pas vraiment les petites auberges de bourgades surtout dans la région, trop de rancune flottaient en ces lieux, et l’alcool ne faisait que la stimuler. J’avais payé la plus grande chambre, au sommet du bâtiment, avec ma propre baignoire et une porte solide. Après avoir régler le souci de l’avoine pour l’attelage et assurer la réparation de la roue pour le lendemain matin je grimpais directement dans ma chambre en commandant un repas chaud.

Je pensais pouvoir passer une soirée tranquille, mes males avaient été montées et je comptais bien prendre un bain pour enlever la crasse de mon corps, et retrouver un peu mon élément. Yn avait vadrouiller dans toute la région pour mettre à mal un petit trafic pour le compte d’un seigneur local, et alors que je reprenais enfin l’ascendant, voilà que la roue du carrosse brisait un essieu la première journée. J’étais maudite ! Deux fois… Je riais à cette pensée, chassant la larme au coin de mon œil.

Une fois dans la chambre, je sortais quelques affaires, et commençais à me dénuder, soupirant de satisfaction quand je libérais ma longue chevelure pourpre de son attache, les laissant s’abattre sur mes épaules dans une agréable caresse. Je sortais un petit sachet d’herbe parfumé et m’approchais de la baignoire, il ne me fallut qu’un instant pour constater que l’eau était on ne peut plus froide, et en me penchant je découvrais un braséro vide de la moindre trace de chaleur aussi. Je sifflais de frustration et me dirigeais droit vers le lit, m’emparant du long peignoir de soie rouge aux brodures dorées que j’enfilais prestement, l’attachant d’un petit nœud. Le tissu tomba sur mes épaules, mais pas plus bas, aguicheur mais pas trop révélateur, comme je l’avais souhaitée en le commandant. Je m’emparais aussi de la poignée de Soleil pourpre qui glissa hors de son fourreau sans un son, et je quittais ma chambre d’un pas décidé.

Cependant en arrivant dans le couloir menant à la salle commune, je tombais sur une scène désagréable à l’œil, du moins en partie. Les deux gaillards toujours en état du trio stupide avaient jetés leur dévolu sur une jeune femme, qu’ils portaient à présent vers les chambres, clairement sans son consentement. Surprise de leur audace, je comprenais néanmoins leur choix, la victime prochaine étant un met de choix vu les femmes du coin, belle, jeune, la peau douce et des cheveux aussi rouge que les siens. J’hésitais un instant à les laisser passer, je voulais surtout un bain chaud. Mais le regard apeuré de la jeune femme croisa le miens, puis je vis celui concupiscent de l’un des deux type à mon egard.

-T’as vu ? Elle a une copine en plus ! On a de la veine ce soir, vient par-là toi.

Il tendit sa main vers moi alors que je lui faisais un sourire charmeur. Mais ses doigts ne me touchèrent jamais, d’un souple mouvement du poignet je faisais tournoyer Soleil pourpre devant moi. La main tomba au sol dans un bruit mat, et l’homme regarda son moignon sans comprendre, clignant bêtement des yeux. Je m’avançais d’un pas et la garde de mon arme vint frapper douloureusement le coté de son crâne, l’homme s’effondrant dans l’inconscience son cri de douleur bloqué dans sa gorge. Je posais à présent mon regard sur son compagnon que la terreur avait semble-t-il bien éclairci l’esprit devant la scène. D’une voix chaude et amicale je m’adressais à lui.

-On va devoir l’appeler le manchot à partir de maintenant, tu ne voudrais pas qu’on t’appelle le castré non ? Alors laisse la fille et ramasse ton ami, je suis pressée.

Il y eut une longue seconde de latence mais un petit mouvement de la lame suffit à réenclencher l’instinct de conservation de l’homme qui desserra sa prise sur le bras de l’inconnue et vint soulever son ami par son bras valide pour fuir vers la grande salle. Je me tournais alors vers la jeune femme, un sourire tout aussi amicale au visage.

-Tu peux tenter ta chance en t’enfermant dans ta chambre, mais un bon coup d’épaule et elle volera en éclat. Ou alors tu prends toutes tes affaires et tu fonces jusqu’au dernier étage, j’arrive dans une minute.

Je rajoutais.

-Tu auras à manger, ne t’en fais pas. Décide-toi vite, si tu n’es pas devant mes quartiers quand j’arrive, tu te débrouilles ma belle.

Je lui fis un petit signe de la main et me tournai vers la salle commune sans attendre de réponse. J’entrais dans la pièce avec ma tenue provocante, mais tous les regards étaient tourné vers le duo qui quittaient précipitamment l’auberge, enfin surtout le bout de bras sanguinolent. Quand les regards revinrent vers moi, la présence de l’épée qui goutté encore de sang par la pointe et mon regard amusé vers le duo suffit à convaincre les habitués que je n’étais pas le meilleur point de vue ce soir, et tous ou presque se remirent à fixer leur verre. Je hélais l’aubergiste qui débarqua en se frottant les mains l’air gêné suivit par la serveuse qui elle fixait le sol comme si il s’agissait d’un plancher en or. Apparemment peu fier de l’événement, et surtout que la seule cliente solvable de la boutique y ait assisté, ils ne savaient comment réagir. Sans tenir compte de leur gêne je me lançais.

-Mon bain est froid, je veux des braises chaudes, et des bougies, une demi-douzaine.

Du coin de l’œil je vis une table vide à la chaise renversée, apparemment elle s’apprêtait en effet à manger.

-Qu’avait-elle commandé ?

Le tavernier lui lança un regard surpris, s’étonnant de cette seule question qui ne concernait pas du tout le drame tout juste éviter.

-Euh un plat sans viande.

La jeune serveuse hocha vivement la tête pour confirmer. Une héléo, ici ? Surprenant.

-Un bouillon de de légume, et des fruits frais, pour deux personnes, soyez généreux si vous voulez que je le sois aussi. Et surtout les braises ! Vite !

Je me détournais alors que déjà le tavernier s’affairer et que la jeune serveuse foncait vers l’âtre pour prendre les plus rougeoyant morceaux. Je reprenais la direction de ma chambre, me disant que décidément je n’aimais pas les auberges bas de gamme, et j’atteignais enfin le couloir du dernier étage, relevant les yeux pour voir si j’aurais ou non de la compagnie ce soir.

Ça devait bien finir par arriver.

Je le crois pas ça !! En m'engageant dans cette quête insensée, je me doutais bien que je finirais sans doute par croiser des créanciers qui tenteraient de se rembourser en nature. Mais là quand même, j'arrive à faire très fort ! Ça fait même pas cinq jours que je suis en route, que je me débrouille déjà pour me faire agresser, et par des gens qui ne connaissent même pas mon frère. Vraiment trop fort !

Me débattant comme une furie, une brusque secousse administrée par un de mes agresseurs manqua bien me déboiter l'épaule alors que mes dents s'entrechoquaient, et j'échappais un grognement de douleur - les humains, tous des brutes épaisses. Redressant la tête pour reprendre la lutte, bien décidée à me libérer avant que ces deux colosses avinés n'aient le temps de poser la main sur moi... je croisais le regard d'une jeune femme qui venait d'arriver dans le couloir.

Vêtue d'un simple peignoir à l'étoffe soyeuse, les cheveux cramoisis et les traits juvéniles, elle tombait vraiment mal - je n'espérais pas la moindre aide de sa part... et je n'avais pas spécialement envie qu'on se retrouve à deux en galère par ma seule faute. Résignée, je détournais le regard, me doutant qu'elle allait passer son chemin sans demander son reste... Sauf que bien sûr, le tireur de cheveux ne risquait pas de la laisser filer aussi facilement.

Sauf que visiblement, il n'avait pas plus remarqué que moi le sabre que la jeune femme transportait avec elle.

Alors qu'il tendait la main vers elle, lançant une énième réplique graveleuse de sa voix de basse... Je n'eu pas vraiment le temps de comprendre ce qui se passa, mais soudain le tireur de cheveux se retrouva à terre, avec une main en moins, son moignon pissant le sang sur le plancher. A la fois choquée et fascinée par ce spectacle - je n'avais jamais vu de sang humain couler jusqu'à présent - je restais muette de stupéfaction, les bras ballants, ne réagissant pas immédiatement lorsque le compagnon du tireur de cheveux me lâcha enfin pour s'occuper de l'estropié.

Puis la jeune femme s'adressa à moi, et je tournais la tête pour rencontrer son regard pour la seconde fois - ses iris étaient aussi rouges que ses cheveux, et je compris alors qu'elle ne pouvait pas être humaine. Aucun humain ne pouvaient avoir une chevelure aussi colorée, ni des yeux à l'iris écarlate. Que ?... Elle veut que je la rejoigne dans sa chambre ?...

Toujours un peu perdue, je la suivis du regard alors qu'elle me plantait là pour se rendre dans la grande salle en petite tenue, son sabre dégoulinant encore du sang du tireur de cheveux. Baissant les yeux vers le plancher, je vis la petite flaque de sang frais commencer à s'insinuer dans les rainures du plancher... et je fis soudain volte face pour foncer dans ma chambre.

Attrapant ma cape et mon baluchon que je n'avais même pas encore défait, je jetais le tout sur mon épaule, claquais la porte de ma chambre derrière-moi, et montais en vitesse jusqu'au dernier étage de l'établissement. C'était visiblement ici que s'alignaient les chambres les plus luxueuses - le couloir était particulièrement bien éclairé, propre, et les portes n'étaient clairement pas de la même facture que celles du rez-de-chaussée.

M'adossant contre un mur en soupirant, je me frottais le visage d'une main lasse - j'ai mal partout, j'ai toujours faim, je suis crevée, et j'ai même réussi à me faire agresser par de vulgaires voyous. Qu'est-ce que ce sera quand j'atteindrais une vraie ville, comme Krik ?...

Entendant des pas monter les escaliers, je me redressais immédiatement, sur le qui vive - mais ce n'était que mon inopinée sauveuse qui s'en revenait vers ses quartiers, et je lui adressais un petit signe de tête en guise de salutation.

- Merci... pour tout à l'heure, lançais-je alors avec un sourire fatigué. Je m'appelle Lula, me présentais-je dans la foulée.

[HRP : je voulais juste te préciser que dans ta réponse, tu surpasses un peu les limites du RP quand tu dis que Lula hésite en regardant vers la grande salle ^^ C'était davantage à moi d'en décider ^^ Ce n'est pas très grave, et c'est plausible pour mon personnage... mais la prochaine fois, n'anticipe pas autant les réactions possibles de Lula, merci ^^]

Elle était finalement venue, patientant devant la porte de ma chambre, elle me salua d’un simple mouvement de tête et se présenta suite à un petit remerciement, je prenais le temps de l’observer plus attentivement. A présenté son statut d’héléo sautait aux yeux, ses cheveux aussi rouge qu’un grenat, son regard d’un étrange éclat, et son odeur de coquillage qui titillait mes narines si loin de l’océan. Je lui rendais son salut.

-Je n’aime pas qu’un homme s’approprie une femme sans au moins lui offrir un verre. Et visiblement tu n’es pas vraiment de ce genre. Appelle moi Yn’Kye, ravie de te rencontrer.

Je m’avançais en la dépassant, déverrouillant la porte de ma chambre. J’entrais et l’inviter à m’y suivre. La pièce était large, un grand lit de plume tout à fait adapté à deux personnes était appuyé à l’un des murs, un baldaquin clairement rajouter vu la différence de bois venait tenter de donner un peu de style à celui-ci. Un effort raté mais appréciable. Deux petites commodes encadrée la fenêtre, dans un bois sombre, une faute de gout flagrante en termes de luminosité, j’avais l’habitude de mieux, mais aussi de bien pire. Une extension de la pièce créer un renfoncement transformer en salle d’eau, une grande baignoire de cuivre y était positionnée, ainsi qu’une toute petite table avec un récipient d’eau clair et fraiche, et une éponge. Au centre de la chambre se trouvait sans doute le seul meuble de valeur de la pièce, une table ronde pour au moins deux personnes, dont le pied était finement sculpter, laissant deviner un mélange de fleurs et de lianes.

Alors que je m’apprêtais à refermer la porte, je découvrais au bout du couloir la jeune serveuse accourant avec au bout d’une pince qu’elle tenait fermement, le seau de braise que j’avais réclamé. J’ouvrais un peu plus grand la porte et la laisser entrer à son tour, la laissant faire son travail dans la salle de bain. Je m’en retournais vers mes affaires et sortit un torchon blanc avec lequel j’essuyais soleil pourpre avant de la rengainer dans son fourreau.

-Installe toi donc, les commodes sont vides si tu le souhaites, je n’en aurais pas l’utilité.

Je vis la jeune employée jeter un regard à Lula avant de repartir en fermant la porte, je n’essayais pas vraiment d’en comprendre la raison, me contentant d’aller vérifier que les braises étaient en place et que l’eau du bain s’était mise à chauffer. Je me tournais de nouveau vers mon invitée.

-Alors, Lula donc ? Vers où voyages-tu ?

Je demandais une destination, point un objectif, les gens de la route avaient bien souvent une raison très personnelle de se déplacer, surtout seule, et je n’étais pas de celle qui veulent tout savoir, la discussion ménerait peut être à des révélations, mais mon invitation ne forçait en aucun cas à la confession. Avant qu’elle ne réponde je lançais une autre phrase.

-Oh mais je manque à tous mes devoirs, je me suis permise de commander un repas pour deux, veux-tu boire quelque chose en attendant ? J’ai une très bonne bouteille qu’on m’a offert il y a peu, ou bien de l’eau.

Joignant le geste à la parole j’allais piocher dans une malle deux gobelet de métal dont la simplicité était compensée par de fines gravures décorative, j’extirpais aussi la fameuse bouteille et déposer le tout sur la table.

-J’aime faire la conversation, mais je ne t’y force pas petit coquillage.

HRP: J'espère que ça te convient mieux ainsi.

Ça devait bien finir par arriver.

Me jaugeant du regard, j'en fis de même avec elle, et me demandais alors quel age elle pouvait bien avoir - elle avait l'air si jeune, avec ses joues rondes et ses grands yeux de poupée... Mais tout dans son attitude clamait sa maturité, et je déterminais qu'elle devait être à peu près de la même année que moi. Et sans doute une Héléo, même si sous sa forme humaine, il était difficile d'en juger autrement que par la couleur de ses yeux et de ses cheveux. Esquissant un sourire, je me décollais du mur pour la suivre dans sa chambre, espérant brièvement que je n'avais pas échappé à un danger pour me jeter tout droit dans un autre. Après tout, vu comme elle maniait le sabre, si elle se retournait soudain contre moi, je serais à sa merci...

- Enchantement partagé... de même que notre point de vue sur la question. A la différence que toi au moins, tu sais te défendre, soupirais-je en la suivant dans sa chambre.

Chambre qui ne valait clairement pas le même prix que le placard à balais meublé d'un lit simple et d'une table de chevet que j'avais loué même pas une heure plus tôt. La pièce était grande et claire, dotée de meubles disparates mais de qualité. Le lit paraissait particulièrement confortable, et vu sa taille il y aurait eu la place d'y faire coucher une troisième personne entre ma nouvelle amie et moi.

Entendant des bruits de pas dans le couloir, je me retournais pour voir Yn'Kye laisser entrer une jeune fille apportant des braises fumantes, et je me demandais bien quel usage Yn'Kye avait l'intention d'en faire. Déposant mon baluchon sur la table, j'échappais un soupir détendu - c'était peut-être naïf de ma part, mais je me sentais en sécurité ici.

- Oh je te remercie, mais je repars demain au plus tôt, je n'ai donc pas l'intention de trop m'étaler, répondis-je avec un sourire.

Surtout que si je m'amuse à faire ça, j'ai toutes les chances d'oublier la moitié de mes affaires en repartant.

- C'est bien ça, confirmais-je en hochant la tête. Vers le Sud, pour l'instant mon objectif le plus proche, c'est Krik, répondis-je sans trop entrer dans les détails non plus. Et toi alors, tu n'es pas d'ici n'est-ce pas ?... Qu'est-ce que tu fais, perdue au fin fond de la vallée d'Accro ?... Et de l'eau sera très bien, merci, ajoutais-je en m'avançant vers elle pour discuter plus aisément.

L'observant tirer de son sac deux gobelets et une bouteille en verre, je décidais que puisque ma nouvelle amie ne semblait pas du genre pudique - après tout, si elle était Héléo comme je le soupçonnais, c'était là un trait que nous avions en commun - j'allais me mettre à l'aise moi aussi, et je commençais donc à défaire le lacet de mon corset pour ne garder que ma tunique blanche typique de mon peuple.

- Ça ne me dérange pas de discuter... après tout, je te le dois bien, et puis, je n'ai rien à cacher, répondis-je en souriant. Et puis... ça me fait plaisir de croiser une autre Héléos si loin dans les terres des hommes, ajoutais-je avec une œillade complice.

J'espérais que je n'avais pas outrepassé une quelconque limite personnelle en mettant ce sujet sur le tapis... mais l'entendre me surnommer son "petit coquillage" avait achevé de balayer mes doutes quant à sa véritable nature, et à en juger par sa familiarité, elle-même avait deviné mon appartenance au même peuple qu'elle.

Je lui servais donc une coupe d’eau et moi de vin en réfléchissant à ma réponse, je ne pouvais clairement pas lui dire que Yn avait massacré un gang local pour améliorer l’image politique d’un petit baron, cela aurait donné un ton étrange à la conversation, non, mieux valait en rester à la situation actuelle. Je m’affalais sur une des chaises en saisissant ma coupe, mon bain ne serait pas chaud avant quelques minutes.

-Je me rends aussi à Krik, une soirée mondaine de l’une des Familles prospère de la ville. J’avoue ne pas avoir hâte d’y être, elles sont toujours d’un ennui mortelle.

J’observais sans gêne le corps un peu plus dévoilé de mon invité, savourant la vue qu’elle m’offrait en même temps que je buvais mon verre de vin, les héléo avaient toujours eu un certain gout pour les vêtements qui en dévoilé peu mais en laisser deviner beaucoup, et les belles formes de son enveloppe humaine étaient évidente dans ce voilage blanc.

C’est vrai, j’étais une héléo moi aussi, je pouvais comprendre la proximité qu’elle ressentait, même si je dus admettre que ce point de détail ne m’influencer presque plus, après tant d’années sur la terre ferme, mes rares liens encore prononcé avec l’Océan étaient une souffrance qu’un réconfort pour moi. Le visage de ma sœur m’apparut un instant avant de disparaitre dans le brouillard de mon esprit.

-Tu sembles nouvelle sur les terres humaines, d’où viens-tu ?

J’avais légèrement relâché les pans de mon peignoir de soie, le tissu ayant bien glissé sur mes épaules, dévoilant tout le haut de mon buste sans révéler de détail intime, une main sur mon ventre suffisant à empêcher que la tenue ne s’ouvre en grand. La chaise était plus confortable que je ne l’aurais cru, et avoir une jolie chose avec laquelle discuter rendait la situation plus agréable à vivre qu’une simple nuit dans une auberge miteuse.

Alors que je m’apprêtais à reprendre la parole, on toqua, j’autorisais la personne à entrer et retrouver la petite serveuse avec un grand plateau couvert de victuailles. Elle s’approcha le regard baisser et le posa au centre de la table juste entre nous, avant de repartir aussi discrètement qu’elle était venu, je me levais cependant pour cette fois-ci verrouiller la porte derrière elle, mieux valait jouer la prudence. Je revins à la table en piochant dans les fruits une grappe de raisin, laissant le bouillon sous son couvercle chaud.

-Sers-toi si tu le souhaites, je compte prendre mon bain avant de me restaurer.

Je lui lançais un regard amusé et quelque peu provocateur.

-Ou peut-être veux-tu te baigner un peu aussi ? la route semble avoir été longue.

Sans donner de précision sur la manière de partager la baignoire je buvais une nouvelle gorgée de mon verre.

Ça devait bien finir par arriver.

Tirant sur le lacet de mon corset, je l'enroulais ensuite autour de mes doigts en poussant un petit soupir d'aise - ok c'est bien pratique comme acoutrement, surtout à cheval, mais en attendant à la fin de la journée, je suis pas fachée de m'en débarrasser... Et encore, le mien est serré juste comme il faut, et constitué de cuir souple qui épouse mes formes comme une seconde peau. Bonnie m'avait raconté que certaines humaines de la haute société en portait des rigides comme du métal, et qu'elles les serraient à se couper le souffle pour avoir l'air plus mince... brr, j'en frissonne rien que d'y penser.

Déposant mon corset sur la table à côté de mes affaires, je roulais des épaules pour achever de me détendre, avant de ramener ma tresse sur mon épaule pour commencer à la dénouer. Bonnie m'avait fait acheter deux outils formidables, un peigne en corne et une brosse en poils de sangliers, et j'avais découvert que j'adorais passer longuement l'un puis l'autre dans mes long cheveux, jusqu'à ce qu'ils soient entièrement démêlés. Mes premiers jours sur la terre ferme avaient été plutôt épiques à ce niveau là, j'ignorais totalement quoi faire de mes cheveux une fois à l'air libre, car sous l'eau c'était une question que je n'avais jamais eu à me poser. J'avais même failli finir par me résoudre à les couper, mais heureusement, j'avais trouvé Bonnie et ses précieux conseils avant de commettre l'irréparable...

Acceptant ma coupe pleine d'eau avec un sourire, je m'assis à mon tour pour lui faire face, hochant doucement la tête à sa réponse, bien que je n'ai pas la moindre idée de ce à quoi pouvait bien ressembler une soirée mondaine chez les humains. En tout cas, pour y être invitée, c'est qu'elle devait être sacrément bien intégrée dans ce monde...

- Je vois... bon courage alors, ce ne sera qu'un mauvais moment à passer, l'encourageais-je du mieux que je pus. Et oui, en effet... Je viens d'Hélia, du côté du récif d'Emeria, précisais-je au cas où elle serait originaire d'une autre zone. Et toi, d'où viens tu ?... Tu as l'air... plutôt familière des coutumes Humaines. Je me trompe ?... demandais-je, avant de prendre quelque gorgées d'eau.

Sentir l'eau glisser dans ma gorge me rappela comme il était agréable de respirer sous l'eau, en avalant ainsi des gorgées d'eau claires filtrées et rejetées ensuite par mes branchies. Je portais machinalement une main à mon cou, caressant distraitement la peau lisse sous mes oreilles, là où je m'attendais presque à sentir de l'eau ruisseler malgré ma forme humaine. C'était une chance, ce cadeau inespéré qui nous permettait de quitter les fonds marins pour prendre pied sur la terre ferme... et en même temps, c'était si étrange, jamais je ne me sentirais plus à ma place ailleurs que dans l'océan.

- Je vais t'attendre alors, je suis affamée, mais je n'aime pas manger seule, et ça fait trop longtemps que je n'ai pas partagé un repas en bonne compagnie, répondis-je à Yn'Kye une fois la jeune servante repartie. Tu es toujours aussi généreuse ?... demandais-je ensuite avec amusement, piochant à mon tour une belle fraise bien juteuse.

Bon en fait, y'a quand même des trucs vraiment bien aussi sur terre, et qu'il n'y a pas sous la mer, comme les fraises, par exemple.

Lula évita ou ne réagit pas à mon invitation à un bain, soit trop intelligente soit trop ignorante du sous-entendu pour le saisir. Je la regardais avec un œil amusé, s’occupant soigneusement de sa longue chevelure, apparemment trouvant une certaine satisfaction à cela, je me souvenais de la simplicité avec laquelle nos cheveux se démêlaient dans l’océan, la terre ferme en était d’autant plus rebutante avec ce problème. Avec un sourire je continuais la conversation d’un ton évasif.

-Je viens de Laosa, juste au bord des abysses. Mais cela fait bien longtemps que je n’y suis pas retournée, l’océan n’est que rarement ma destination. Je suis en effet une habituée des terres humaines, j’y ai même une petite place à présent, au prix de quelques années d’efforts. Cela a un certain charme quand on s’y habitue.

Alors que je lui répondais, Lula caressait son cou du bout des doigts, cherchant sans doute trace de ses branchies, un réflexe très courant pour les héléo peu habituée à leur forme humaine. Je dus admettre que le naturel de son geste sur sa peau blanche avait une allure particulièrement érotique malgré toute l’innocence de la chose. Les héléos avaient une symbiose avec leur corps qui était très attirante, expliquant notre succès auprès des humains, et des autres héléos sans doute.

Je me redressais acceptant donc notre contrat oral, mon bain serait certainement plus court que prévu, ne voulant pas faire attendre outre mesure celle qui était mon invitée. Lui tournant le dos je défaisais le nœud de mon peignoir qui s’ouvrit et chuta au sol, dévoilant mon corps sans réelle marque de pudeur, de plus je me demandais qu’elle serait la réaction de la jeune femme. J’avançais tranquillement vers la baignoire et y trempait les doigts, l’eau était chaude à souhait. Je répondais à Lula en pouffant.

-En toute honnêteté, tu as eu de la chance, ils étaient vulgaire, je déteste ce genre de comportement, surtout si je suis sobre, et de plus….

Je tournais mon visage vers elle, dévoilant de ce fait une partie de mon buste, j’affichais un large sourire.

-Tu as eu la chance d’être assez jolie pour attirer mon attention.

C’était honnête de ma part, j’aurais sans aucun doute laisser faire ce crime si les deux idiots ne m’avaient pas impliquer et si leur victimes avaient été repoussante, j’avais connu trop de crime et de violence sur les terres humaines pour être encore vraiment atteinte par un simple viol dans un village crasseux. Avec un ronronnement de plaisir je me glissais dans l’eau chaude, et immerger presque totalement mon corps. La baignoire était plus large qu’il n’y paraissait. Un nouveau regard à la jeune femme.

-Tu es certaine que tu ne veux pas me rejoindre ? Elle est vraiment bonne.

J’avais un immense sourire sur le visage en la fixant.

(#) Sujet: Re: Ça devait bien finir par arriver. [Yn'Kye]

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Ça devait bien finir par arriver. [Yn'Kye]

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