Daeymo 1248

« Maitresse Opale, maitresse Opale ! Il s’est passé quelque chose de tragique ! »
Que voulait-il lui ? Ce fanfaron qu’on avait placé sous ses ordres. « Pour ton bien » Avait dit le Ténébreux. Depuis quand avait-elle besoin d’un garde du corps ? La jeune femme comprenait que son manque de contrôle face à une trop grande utilisation de sa Vérité effrayait tout un chacun, mais ce n’était pas pour cette raison qu’elle devait se retrouver avec un homme coller à elle en permanence. L’assassin était sur qu’il ne s’agissait que d’une ruse habile de son bras droit. Un moyen de la surveiller, de l’espionner. Il avait si peu confiance en elle… S’en était déplorable. Il n’y avait pas plus fidèle qu’Opale.

« Et bien quoi, parle. » Dit-elle agacée par cette interpellation grotesque.

Il lui fit part de ce qu’un soldat venait de lui raconter. La mort d’un soldat ? Quelque chose de tragique ? Ce n’était qu’un pion de moins dans l’armée du Ténébreux. Ça n’avait rien de tragique. Un malheureux incident voila tout. Une prière serait dite pour lui et son âme serait rendue à la déesse. Fin de l’histoire. Devant son manque de réaction, l’homme continua son récit. Tué par la créature du lac des Ombres. Ah parce que ce lac était habité ? Les légendes en parlaient. Mais ce n’était que des histoires pour enfant. Des fables sans fondement utilisées pour faire peur.

« Il faut se débarrasser de la créature ! Elle pourrait s’en prendre à d’autres récléyès ! Elle pourrait faire de gros ravages. L’homme qui l’a vu a dit qu’elle avait… »
« Il suffit. Tes jacassements me sont insupportables. Disparait. »

Il en fallait beaucoup pour mettre à mal la patience légendaire de l’assassin. Il avait réussit en quelques minutes. L’accumulation des évènements n’avaient aidé en rien. Il n’avait pas du apprécier de se faire congédier comme un malpropre. Mais ça, l’assassin n’en avait rien à faire. Ça ne changeait rien pour elle. S’il avait des problèmes avec le Ténébreux, elle n’en aurait pas. Qu’il sorte de sa vie et la jeune femme en serait plus que ravie.

Mais il disait vrai. Si une créature menaçait de s’en prendre à l’armée du Ténébreux, elle devait être éliminée. Avant qu’elle ne fasse de dégât. La jeune femme se mit donc en mouvement immédiatement. A cheval, il lui faudrait la nuit pour y arriver. Encore une nuit qu’elle passerait sans dormir. Une de plus. Elle n’avait pas le temps, ou ne le prenait pas. La fatigue finirait par lui tomber dessus, lui imposant le repos tant espérer par son corps. Mais dans l’immédiat, ça n’avait pas la moindre importance. Elle se rendit dans ses appartements, troquant sa robe simple pour ses vêtements de cuirs et ses quelques pièces d’armure. Elle attrapa son arc et partie récupérer son cheval.

A l’aurore, elle approchait du lac. Elle laissa son cheval et finit à pied. Silencieuse, elle avançait prudemment, son arc armé. Le but était de voir de quoi il en retournait exactement avant d’agir. Aucune erreur n’était possible. Elle arriva au sommet d’une petite colline et vit enfin ce qu’elle cherchait. Ce n’était pas un monstre mais un homme. Et pas n’importe lequel. Le masque. Elle avait entendu parlée de lui. Plus d’une fois. Même le Ténébreux avait évoqué son cas devant elle. Elle baissa un peu son arc avant de voir l’homme à ses pieds. Son arc reprit sa position initiale. La flèche prête à partir. Son regard devint sombre et un mort se leva non loin de l’individu masqué. Un simple squelette. Il n’était que pour signaler sa présence. Elle ne comptait pas attaquer. Elle attendait juste des explications.

Quel clown. C’était grossier. Essayer de la repérer en bougeant de la sorte. Stupide soldat. S’il pensait pouvoir le faire comme ça… Dame Opale. Un frisson parcourut son dos. Dame Opale. Une grimace étira ses lèvres. Dame Opale… Mais pour qui se prenait-il celui la. L’appeler par son prénom même avec un titre honorifique… Quelle idée. Soit il oubliait son prénom pour le remplacer par son nom de famille, soit il oubliait le titre. Auquel cas, il risquait d’aller au devant de grave problème. Le respect était une chose importante. L’assassin ne s’était hissée dans la société pour se faire appeler Dame Opale. Mais qu’importe.

Passant lentement dans son dos elle observait la situation. L’homme à terre ne semblait pas se réveiller, mais il ne semblait pas mourant non plus. Au moins un qui survivrait à son erreur. Ou à sa stupidité au choix. Le Ténébreux avait de drôle de soldat. D’un pas lent et silencieux elle s’approcha du soldat, toujours dans son dos. Arrivée non loin elle entendit l’inconscient déliré de nouveau. Elle arqua un sourcil.

« Et bien… Le Ténébreux a placé des hommes étranges sous mes ordres… »

Sa présence était trahie. Il savait où elle était à présent. Débandant son arc elle s’accroupie à côté du blessé pour observer son état. Le squelette se détruisit quelques secondes plus tard. Après avoir faiblement frappé l’homme et obtenu un grognement elle se releva et fit face au clown.

« Vous ne l’avez pas loupé. Mais il s’en sortira. »

A condition que plus de soin lui soit apporté. Opale ferma les yeux de nouveau et se laissa envahir par sa vérité. Une légère aura sombre l’entoura et en même temps qu’elle leva les bras en croix deux corps sortirent de terre. Deux hommes en parfait état. Pas de vulgaires squelettes. Quelques lambeaux de peau pendaient ici et la, mais dans l’ensemble le résultat était bluffant. Elle rouvrit les yeux et ils s’animèrent. Prenant le blessé par les jambes et les bras, ils se mirent en marche. Direction à la tour des ombres. Il fallait espérer que sa Vérité irait jusque la bas. En tout cas le soldat devait le croire. Cela ne faisait qu’augmenter sa réputation déjà bien installer.

Avec un peu de chance, le groupuscule irait assez loin pour être repéré par des gardes. Sinon il finirait dévoré par une créature. A vrai dire son sort importait peu. Qu’il vive ou qu’il meurt, il ne reviendrait pas aux côtés d’Opale. Elle irait dire au Ténébreux qu’elle n’avait pas besoin de garde rapprochée. C’était une perte de temps. Et une perte d’effectif. Ces hommes avaient bien mieux à faire.

Retirant la flèche de son arc, elle la remit à sa place, gardant son arme en main. Un imprévu pouvait arriver. Et elle devait se tenir prête. Elle ne faisait pas particulièrement confiance au soldat non plus. Peut être n’était-il pas réellement un allié. Il n’était pas rare qu’un homme retourne son arme contre un des siens.  Alors avec un drôle de personnage comme lui… Il fallait s’attendre à tout.

Lentement elle se tourna vers le lac et l’observa. Aussi sombre que la nuit. De nombres légendes tournaient autour de cet endroit. C’était le meilleur moment pour vérifier qu’elles étaient vraies. Un sourire froid étira les lèvres de l’assassin. Ça ne laissait rien présager de bon.

« Vous ne m’en voudrez pas si je réveille ce qui dort ici… » Souffla-t-elle en faisant un pas vers l’eau noire.

Finalement le squelette se releva. Il ne sera pas rester longtemps à l’état de vulgaire tas d’os. Il se mit à courir vers le lac. Il servirait d’offrande. Dans les premiers instants rien ne se passa. L’assassin était presque déçue. Les légendes étaient donc fausse… Elle se retourna en soupirant, lançant un regard au clown. C’est alors qu’une légère onde secoua l’eau endormie. La jeune femme fit volte face, ravie. Elle reprit une flèche et la place à son arc. Qu’avait-elle réveillée ? Il lui tardait de le découvrir. Et cela n’allait pas tarder vu comment l’eau s’agitait de plus en plus.