Cher Père,

J'aurai dû vous écrire il y a longtemps lorsque j'étais encore heureuse et que j'avais l'espoir de vous revoir un jour. Peut-être les choses se seraient passées différemment si je n'avais pas ainsi coupé les ponts avec vous. Comme je le regrette aujourd'hui. Si vous me voyez, vous me renierez sans nul doute. Je sais éperdument que je ne vous enverrai jamais cette lettre, c'est pourquoi j'ose coucher sur ce papier jauni que j'ai trouvé au détour d'un couloir tout ce qui m'est arrivé depuis mon exil du désert.

Savez-vous qu'à peine sorti de Karnès j'ai fait une rencontre étonnante et grandiose. J'ai rencontré le général Arvèles, si l'on m'avait un jour prédit cela, je n'y aurais jamais cru, même sortant de la bouche de votre éminente collègue Barbara ou de l'une de ses oracles. C'est grâce à lui que j'ai pu faire mes premiers pas dans le désert, sans lui, un garde de la ville vous aurez très certainement ramené mon corps sans vie, à moins qu'il n'aurait été recouvert par le sable. Quoi qu'il en soit j'ai vécu plus d'une vie depuis mon départ, mais à peine ai-je foulé la terre que j'ai amené le déshonneur sur votre nom.

Je ne suis pas allée à l'Arbre de Vie comme j'en avais rêvé depuis que j'étais gamine, à la place de cela, j'ai aimé un homme et je suis restée près de lui jusqu'à son dernier souffle. Vous ne l'auriez pas approuvé, c'était un petit malfrat, mais il a été tendre avec moi et m'a toujours traité avec respect. Je serais sûrement encore à ses côtés si notre route n'avait pas croisé celle d'un Récleyès. (le dernier mot est écrit maladroitement)

Oh père, comme je regrette d'être partie. Je ne pourrais vous décrire cette nuit affreuse où j'ai vu mon compagnon mourir sauvagement de la main d'un de ces êtres abjects que nous croyions disparu. C'était peu de temps avant leur retour. C'est cette nuit que mon lien avec Cioriel s'est éteint. Comment voulez-vous que je puisse continuer à croire en la vie après ce drame. Même si je n'avais pas tenu ma promesse envers vous, j'étais restée une fervente servante de la déesse. Ainsi, mon cœur s'est déchiré et ma foi avec lui.

Ce que je m'apprête à vous dire et la première chose qui vous tuerez sans aucun doute. Après cet événement et avoir, je ne sais comment, réussi à m'échapper de mon tortionnaire, j'ai prêté serment à Uraang. Peu à peu, je me suis tournée vers lui et c'est en arrivant sur le front de la Tour Ouest que je suis devenue l'une de ses prêtresses. Cela n'a rien eu avoir avec la si belle cérémonie que vous m'aviez organisé à Karnès. Il a s'agit d'une simple promesse entre le dieu et moi, mais vous savez aussi bien que moi que la foi se suffit à elle-même.

(Des gouttes d'eau salées rendent presque illisible les premiers mots) J'ai juré de tous les tuer, mais je suis devenue comme eux. Par pitié, père pardonnez moi, même si je ne mérite plus de porter votre nom et c'est pour cette raison que je ne vous enverrai jamais cette lettre. Je doute de toute manière qu'ils me laissent l'envoyer. Si vous saviez, ce qu'ils font à ceux qu'ils attrapent en Terres Interdites, peut-être comprendriez-vous mon geste. Cela m'a littéralement fendu le cœur.

J'espère qu'à la maison mère et vous avez réussi à continuer à mener une vie paisible. Pensez à vous sous le soleil brûlant du désert me réchauffe lors des nuits où l'angoisse s'empare de moi. Je vous pardonne de ne pas avoir été un père aimant, maintenant, je sais que vous faisiez cela pour m'offrir une vie digne de votre rang. Si seulement j'avais pu le comprendre avant. Vous avez sûrement fait votre deuil depuis mon départ, il y a plus d'un an de cela, je l'espère sincèrement.

J'ai hésité plus d'une fois à me servir de mon reflecto pour vous contacter, je sais que le cercle de la lumière en a un comme tous les dirigeants de Madelle, mais je n'ai pas pu m'y résoudre. Qu'aurais-je bien pu-vous dire.

Je vous aime et vous resterez à jamais dans mon cœur même s'il est aujourd'hui corrompu par la perfidie.