Mersine Holton

Plus Billy hésitait, planté là avec la vivacité d'une mouette trépanée, plus Mersine avait la très désagréable impression qu'on l'avait pris pour un con. Deux solutions : la première, cet abruti était paralysé par le stress à l'idée de réussir quelque chose devant les autres. Peu probable, vu combien il avait été fier de se comporter comme un crétin devant tout l'équipage un peu plus tôt. Deuxième hypothèse...

Il n'eut pas le temps de la formuler complètement.

Cap… Capitaine ! Il y a un monstre accroché au navire !

C'était Liara, et il reconnaissait le ton qu'elle avait pris. Ils étaient vraiment dans la merde. Aucun doute là dessus. Quelques abrutis rirent en pensant qu'elle faisait diversion et Mersine leur jeta un regard noir. Ce n'était plus le moment de s'amuser à bizuter les nouvelles recrues ! Ils auraient tout le temps plus tard, mais il fallait d'abord rester en vie.

Le temps qu'un deuxième marin confirme les dires de Liara, Mersine avait déjà dégainé son épée. Des Lacertae.... C'était bien leur veine, putain ! Il avait vu des vaisseaux rentrer au port après s'être fait attaquer par ces saloperies, le résultat n'était pas beau à voir. Quand il restait quelque chose à voir d'ailleurs. Certes, la Horla était un plus gros navire que la plupart des bateaux de pêcheurs s'aventurant en mer, mais leur situation restait critique.

« Aux armes ! Aux armes, bordel ! Bougez-vous bande de raclures, où je vous balance moi-même dans leur gueule. Je veux des groupes de trois ! Armez les gamins aussi ! »

Et pendant que tout le monde s'agitait enfin – comme s'ils étaient totalement incapables de prendre des initiatives par eux-mêmes ! - Mersin se précipita sur Liara pour la tirer loin du bastingage. Il sortit lui même la rapière de la pirate pour la coller dans ses mains.

« Bordel, Liara, ressaisis-toi ! Ne m'oblige pas à t'en coller une ! J'ai besoin de toi. Couvre mes arrières. »

La jeune femme revint enfin à elle, rougissant d'avoir perdu son sang froid au plus mauvais moment. Elle serra le poing sur son arme et hocha la tête sans faire de commentaire. Mersine respira un peu plus librement. Il savait qu'elle donnerait sa vie pour le protéger. Et avant d'en arriver là, elle était capable de faire de sacrés dégâts. Il se retourna vers le premier monstre qui était monté sur le pont.

Il n'y avait malheureusement pas vraiment de stratégie à mettre en place s'ils avaient eu le malheur de croiser le chemin d'un banc de ces sales bêtes. Prier Sydilia pour qu'ils ne soient pas trop nombreux, et ne pas se laisser déborder. Protéger les points névralgiques du bateau. Les hommes connaissaient leur travail, et les bleus... Bah, ça ferait le tri entre ceux qui avaient l'instinct de survie et les autres.

« A l'attaque ! Réduisez-les en pièce ! Protégez les voiles ! »

Et comme la meilleure façon d'être obéit, c'était de montrer l'exemple, Mersine s'élança pour régler son compte à la créature. Esquiva d'une roulade un coup de queue cinglant. Se retrouva face au blondinet de tout à l'heure, arme à la main. Il ne s'était pas attendu à le voir en première ligne !

« T'as du cran, gamin. »

Pas le temps de commenter davantage. Liara venait de parer une coup de griffe vicieux qui aurait bien pu l’éventrer. Le capitaine profita de l'ouverture, se glissa le long de la patte écailleuse. Une fois tout près, un ample mouvement du bras lui suffit pour égorger la bête. Elle convulsa. Pas longtemps.

Quatre autres créatures étaient déjà montées à bord et toutes avaient engagées le combat avec d'autres pirates. Mersine savait qu'il n'y avait pas de temps à perdre.

« Billy, Liara, suivez-moi ! On va défendre l'accès aux cales. Si une des ces saloperies descend et attaque la coque, on est morts ! »

Il s'élança le premier, partant du principe que les deux autres allaient forcément faire ce qu'il disait.