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VENGEANCE
© igorkieryluk
LA PROMESSE

La nuit était arrivée sans crier gare dans cet endroit hostile, assit dans la poussière et le dos contre un arbre, Zaraze n'arrivait plus à bouger. Il avait tenté tout l'après-midi de se lever, sans réussir, pas même ses orteils ne daignaient lui obéir. Le mage se voyait déjà mort, si une bête ne le remarquait pas, il finirait de toute manière par mourir de soif.

La seule chose qui lui restait en cet instant était ses souvenirs, mais l'ancien n'arrivait pas à se remémorer ceux qu'il désirait ardemment. Il se repassait en boucle les événements de la veille lorsque Evangéline, sa gouvernante, lui avait apporté son repas. Elle faisait partie des fidèles qui avaient rejoint la confrérie peu de temps après sa création. Comment avait-elle pu le trahir ? Pourquoi avoir voulu sa perte ? À moins qu'elle ne se soit rendu compte de rien ? Non ce n'était pas possible, Zaraze ne pouvait le concevoir, il était clair pour lui que sa décadence avait été orchestrée par des personnes proches de lui, car il ne gardait aucun souvenir de son enlèvement, les mercenaires avaient donc dû l'extirper de son lit.

Comment ses gens avaient-ils fait pour ne rien voir, ils ne pouvaient pas tous être de mèche avec ces scélérats tout de même. Le mage ne se souvenait que de quatre ou peut-être cinq ombres, il n'était sûr que d'une seule chose, une longue chevelure d'ébène avait caressé son visage, il ne pouvait s'agir que d'une femme. C'était là le seul détail qui lui restait en mémoire. Zaraze ne désirait qu'une chose en cet instant, tous les tuer. Il rêvait de se lever et de leur courir après pour leur ôter la vie. Durant une journée et une nuit le jeune homme ne pensa qu'à cela, sa rage ne cessant de s'intensifier au fil des heures.

Cependant, très vite son envie de sang se retourna contre les dirigeants madelliens, car après tout, les mercenaires n'étaient que de simples outils. Le mage savait pertinemment que les commanditaires de son enlèvement ne pouvaient être que ses rivaux. Il s'était montré trop impertinent et aujourd'hui il en payait le prix. C'est en ce jour que Zaraze se fit la promesse solennelle de revenir un jour vers eux pour leur ôter à tous la vie de ses propres mains. Le jeune homme qui était autrefois animé par des rêves de paix mourut en ces lieux pour laisser place à un être sombre dont la seule motivation fut jusqu'à sa mort la vengeance.



SURVIVRE

C'est en ces lieux que le mage noir commença à prendre forme. Exténué, Zaraze s'endormit au petit matin, son sommeil fut envahi par des visions de mort. Il se réveilla dans l'après-midi, alors qu'il se préparait à vivre une journée similaire à celle de la vieille il lui sembla que quelque chose avait changé depuis, il avait des courbatures. Peu à peu le mage put à nouveau bouger, au départ il ne s'agissait que de ses orteils et avant que la nuit n'arrive il réussit à reprendre le contrôle de son corps pour finalement se lever, cependant il était encore très faible. Ne connaissant pas ces lieux, il décida de marcher droit devant lui, il ne voulait pas mourir ici, il ne le devait pas !

C'est ainsi que durant un mois il essaya de survivre tant bien que mal. À plusieurs reprises il crut bien que la mort était venue le chercher, car dans cet endroit infertile vivaient des monstres que jamais auparavant il n'avait croisés dans Madelle. Ces animaux n'avaient rien de comparable à la faune du Continent. Ils étaient tous si sanguinaires et ils ne recherchaient que la mort. Ainsi plus d'une fois Zaraze faillit rendre son dernier souffle, mais lorsqu'il pensait que tout était perdu, l'homme se remémorait sa promesse et il faisait tout son possible pour anéantir l'animal ou s'enfuir le plus loin possible.

La mage ne trouvait jamais de répit, il dormait peu et avait du mal à trouver de la nourriture, jusqu'à ce qu'un jour il vit au loin une silhouette humaine.



RENCONTRE

Le mage crut qu'il commençait à devenir fou, car depuis son exil il n'avait jamais rencontré d'être humain, l'ombre à l'horizon pourtant ne cessait de s'avancer. Zaraze se précipita alors sur un rocher afin de pouvoir attaquer l'inconnu dès qu'il serait à sa portée, car étrangement il avait l'impression qu'il venait pour lui. Cependant lorsqu'il put voir le visage de cet homme, le cœur du mage se serra dans sa poitrine et son souffle se coupa, il n'était plus en mesure de faire un seul geste. Pourquoi était-il ici ? Faisait-il partie des traîtres ?

Gordack, l'ami d'enfance de Zaraze se trouvait à à peine quelques mètres de lui. Celui-ci se mit alors à crier le nom de son ami, mais Zaraze resta muet. Alors qu'il était prêt à faire demi-tour croyant qu'il avait rêvé son ami, le mage se décida à descendre de son perchoir. Gordack se retourna et le vit. Lorsque celui-ci avait disparu, il n'avait pas voulu croire à la mort de l'Ancien, il savait au plus profond de lui qu'il était encore en vie. Il avait alors réussi à trouver l'un des mercenaires qui l'avait emmené ici et lui avait fait avoué où son ami avait été emmené. Il n'avait alors pas hésité à traverser la frontière, quitte à mettre sa vie en danger pour venir le secourir.

Les retrouvailles entre les deux hommes furent plutôt distantes et nerveuses, tous deux n'arrivaient pas à réaliser que tout cela était vrai, ce fut Gordack qui brisa le silence qui s'était installé. Puis lorsqu'il eut commencé, il ne s'arrêta pas, désirant rattraper le temps perdu il s'empressa de raconter au mage comment les gens avaient pris l'annonce de sa mort. Il lui décrivit les lieux de prières qui avaient vu le jour à travers tout le pays en son honneur ou bien comment sa gouvernante avait fui rapidement la capitale. C'est ainsi qu'il en vint à lui raconter que de nombreuses personnes étaient rentrées chez elles pour laisser Faras à moitié vide. Il lui expliqua que malgré tout un certain nombre d'individus croyaient encore en la cinquième confrérie, n'hésitant pas à se réunir en différents lieux, espérant en secret le retour de leur sauveur.

Zaraze resta muet pendant l'histoire de son ami préférant l'écouter. Lorsqu'il eut finit le mage se contenta de répondre une seule phrase à son ami "je me vengerai, ils périront tous sous mon joug".

Sachant désormais que son ami était bel et bien vivant Gordack repartit pour le continent espérant que les fidèles de la confrérie de Récleyés accepteraient de le suivre et de croire au retour de leur messie, car Zaraze décida de rester dans les Terres Désolées. Au cours de son périple, le mage s'était souvenu d'une légende de son enfance. Il y avait de cela fort longtemps dans le pays des Dieux, Sydilia, la déesse de la Perfidie, avait bravé l'autorité de la déesse Mère. Elle avait voulu créer sa propre race intelligente, mais ce privilège était réservé à Mère Nature. C'est pourquoi la déesse impétueuse fut exilée du royaume céleste et trouva refuge dans la Forêt Hurlante des Terres Inexplorées.

Zaraze avait pour ambition d'aller la voir pour lui demander son soutien dans la guerre qu'il avait l'intention de mener contre le continent.



LE RENOUVEAU

Quatre années passèrent durant lesquelles Gordack s'efforça de reconstruire la confrérie en attendant le retour de son ami, il réussit à convaincre un certain nombre des anciens fidèles de Zaraze, mais la moitié d'entre eux avaient décidé de retourner auprès de leur confrérie d'origine. Lorsqu'un soir un homme demanda à entrer dans la tour sombre, repère de la cinquième confrérie. Il avait de longs cheveux lui arrivant dans le dos, son visage était caché par un capuchon et il était vêtu de haillons.

Il s'agissait de Zaraze, il revenait enfin parmi les siens, l'homme avait bien changé, seul son ami arriva à le reconnaître. Comme lors de leur dernière rencontre Zaraze resta silencieux pendant que Gordack lui expliquait la situation. Quand il eut finit, il demanda à ce que tous les membres de la confrérie soient rassemblés en un même lieu.

Ce fut cette nuit-là que les dons des Récleyés changèrent, grâce à la volonté de la déesse Sydilia. Cette nuit sombre fut remplie de cris de lamentations, aucun d'entre eux ne comprenaient pourquoi leur corps les faisant tant souffrir. Certains se griffaient jusqu'au sang, tandis que d'autres se recroquevillaient sur eux même. Devant ce spectacle Zaraze afficha un sourire malsain, en particulier lorsque le mal rongea à son tour son ami. Au petit matin la plupart des Récleyés étaient allongés à même le sol, alors que durant la nuit ils désiraient tous se venger sur Zaraze, désormais une certaine paix s'était installée en eux et par un maléfice de la déesse tous acceptèrent leur changement sans se révolter.



La cinquième confrérie telle que nous la connaissons aujourd'hui venait de voir le jour.